La crise de ses finances publiques n’est-elle pas un symptôme grave mais pas unique du déclin de l’occident ? De nombreux auteurs en pressentent le risque depuis de nombreuses décennies. Les plus belles histoires, les cultures, ne sont-elles pas comme des êtres biologiques qui naissent, se développent, déclinent et meurent ? Les agonies étant scandées de crises, de fracas, de mélancolies de fin du monde.

Au fond, depuis le premier choc pétrolier, le monde dit « développé », n’a pas vraiment cherché de modèle économique alternatif conciliant partage progressif de la richesse et soutenabilité d’un système dont les fondamentaux étaient périmés.

Le recours à l’endettement a été le moyen, au départ, d’amortir les difficultés de l’ajustement, et ensuite d’en différer les douloureux effets.

Trente cinq ans après, la montagne de dettes accumulées rend le système aveuglément surréaliste. Certes, l’orchestre du Titanic aura joué jusqu’au dernier instant toutes les langoureuses mélodies de la dette, souvenons-nous du grand emprunt dont les enchères montaient aussi vite que la mer, mais vient toujours le moment où le prêteur cherche soudain le garant et découvre avec effroi qu’il s’agit du contribuable. Lequel menace de s’envoler ou de se révolter selon sa condition.

Nous y sommes. Les dirigeants du monde s’offrent en héros des temps modernes en daignant s’occuper de nos tristes affaires de leurs palais d’été. Ils morigènent ces diseuses de mauvaise aventure, ces agences de notation qui ne croiraient soudain plus en leurs promesses. Que diable, qu’on les transforme en lois ! Et si cela ne suffit pas qu’on les érige en constitution ! Qu’on finisse enfin de douter des souverains.

Cela suffira-t-il ? Pas sûr. Le panurgisme est un cookie de la mondialisation. Et de la nervosité à l’irrationalité en passant par la fébrilité, il n’y a qu’un pas. Les gouvernants feraient d’ailleurs bien, par leur propre comportement, de ne pas alimenter cette atmosphère de panique qui s’empare du système financier.

Puis cessons de raconter des histoires qui défient le sens commun. Il n’est pas illégitime qu’un chinois dont le niveau de vie reste compté se préoccupe de savoir si le fruit quotidien de son travail devra, toute sa vie, être mis à la disposition d’un américain. Les générations montantes d’Europe devront-elles accepter de réduire leur propre niveau de vie pour garantir celui de leurs parents à un niveau supérieur au leur ? Ces questions, les gens simples se les posent. Ils se demandent simplement si les dirigeants politiques y ont songé. Si l’esprit de conservation ou de conquête du pouvoir, en amérique comme en europe, ne l’emportera pas, le moment venu, sur le traitement transparent et sincère de leurs préoccupations.

Le déclin n’est jamais fatal. Les crises se résolvent. Il faut simplement des rencontres entre des personnes et des valeurs. Des personnes du niveau que l’histoire du moment requière. Des valeurs exigeantes de sincérité, de vérité, de courage, d’opiniâtreté. Des personnes et des valeurs qui transcendent les frontières mentales des partis, des pays, des continents. Des personnes et des valeurs qui ont une vision élevée de l’humanité.