Le Gouvernement a présenté fin avril son programme de stabilité (PSTAB) pour la période 2023-2027 à la Commission européenne. Ce programme présente l’évolution des finances publiques pour l’année passée, en cours, et pour au moins les trois années suivantes. Il présente de manière peu détaillée notamment l’évolution des recettes, des dépenses, et du solde, ainsi que de l’endettement public pour les années concernées, exprimée par rapport au PIB. 

Cet exercice est toutefois salutaire car il oblige les gouvernements à dévoiler leur stratégie financière, ce qui constitue un élément d’analyse de leur crédibilité, et une manière de donner un éclairage de moyen et long terme à l’action publique qu’ils proposent de mener. Malheureusement, cet exercice est souvent, pour la France, un exercice de communication pour les bureaux de Bruxelles et des marchés financiers, et ne constitue en rien une authentique « feuille de route », un programme fiable que l’on croit pouvoir être respecté. 

Afin de mieux apprécier la réalité des données, nous avons, comme les années précédentes, converti ces prévisions (exprimées en ratios du PIB) en milliards d’euros, en tenant compte des éléments inscrits dans le document. Il nous a toujours semblé essentiel et plus démocratique que les informations financières soient exprimées pour nos concitoyens en monnaie courante et non en pourcentages incompréhensibles pour le plus grand nombre. On constate, sans surprise, qu’en raison de l’évolution positive du PIB attendue, la baisse des ratios qui est prévue entraînera une augmentation en valeur absolue des dépenses – et des recettes – des APU. Rappelons toutefois que ces prévisions ainsi exprimées en valeur absolue sont tout particulièrement sujettes aux aléas des prévisions d’évolution du PIB (de la croissance réelle comme de l’inflation, si volatile ces derniers mois), prévisions que beaucoup d’analystes estiment, pour cette première, sous-estimée, et cette seconde, surestimée. 

Le Gouvernement annonce un « retour à la maîtrise des finances publiques », et un désendettement. Il faut beaucoup de foi pour y croire. La France devrait parvenir à un retour de son déficit sous le seuil de 3% du PIB d’ici 2027 – à 2,7 % fin 2027, contre un objectif de 2,9 % affiché jusque-là. Le désendettement devrait arriver à partir de 2024 ; ce qui constitue un enjeu d’autant plus important que les intérêts de la dette devraient s’alourdir rapidement, et la charge peser toujours davantage sur les dépenses publiques (il en coûterait 70 Md€ à la France en 2027, deux fois plus que l’an passé). Pour rappel, le déficit français s’élevait l’an passé à 4,7 % du PIB, contre 6,5 % en 2021. La dette, qui s’élevait en 2021 à 112,9 % du PIB, a légèrement reflué à 111,6 % l’année passée, d’après l’INSEE.

Soyons clairs : les finances publiques de la France se trouvent dans une situation particulièrement délicate, les efforts nécessaires pour faire face à la pandémie de Covid-19 ayant achevé d’aggraver une situation difficile depuis de nombreuses années. La France toutefois ne risque pas de procédure pour déficit excessif, exclusivement parce que la crise sanitaire a conduit à l’activation de la clause de sauvegarde du Pacte de stabilité et de croissance (en vigueur depuis 1997), permettant aux 27 de dépasser la « règle d’or » – ainsi suspendue – des 60 % de PIB pour leur dette (sur laquelle beaucoup s’étaient déjà assis avant), et 3 % de PIB pour leur déficit. 

La transmission des programmes de stabilité relance le débat déjà vif – depuis la crise Covid, et la prise de conscience de plus en plus forte de la nécessité d’un tournant écologique – sur la soutenabilité des règles budgétaires actuelles. Le mercredi 26 avril, la Commission a présenté sa proposition de réforme du Pacte de Stabilité et de croissance. La Commission, divisée sur les modalités de la réforme, propose pour le moment le projet d’une trajectoire budgétaire de référence sur quatre ans, adaptée à la situation de chaque État, dans le but de diminuer sa dette tout en accélérant la croissance. 

Une nouvelle loi de programmation des finances publiques devrait être présentée et votée lors d’une session extraordinaire du Parlement cet été. Il est fort à parier malheureusement qu’elle ne soit que trop peu prise en compte lors des prochaines lois de finances, alors même que seules les trajectoires pluriannuelles permettent de définir des orientations et des actions durables pour notre Pays.