Les sociétés politiques se sont toujours développées, surtout en temps de paix sur leur territoire, dans une trop grande indifférence aux valeurs humanistes. La politique française semble choisir de s’offrir au monde en sinistre exemple.

Tous les discours du corps politique sont pourtant généralement emplis d’idéaux de progrès, de raison, et de respect de la personne humaine. Qui aurait oserait d’ailleurs promouvoir le contraire ? Les extrêmes disent certains. Les autres répondent ceux-là, dans une cacophonie presque parfaite. Bref les valeurs humanistes nées en Occident à la Renaissance et prolongées par les philosophes des Lumières sont mises entre parenthèses. Les élections sont passées et cependant rien ne change.

Pourtant la conception humaniste de l’humain est celle d’individus rationnels capables de concevoir leur intérêt personnel en harmonie avec l’intérêt commun dans une perspective de progrès général de long terme. C’est espérons le la conception de toute société politique responsable. Elle est positive et optimiste. Sa morale repose sur une vertueuse espérance de réconciliation universelle des points de vue et des intérêts au sein d’une société pacifiée, rationnelle et responsable.

Cette conception rejette tout acte de destruction ou d’autodestruction comme pathologie ou déviance qui nous ferait sortir de notre condition humaine. Pourtant, l’inhumain nous guette encore comme le barbare guette la civilisation, le mal guette le bien et la folie guette la raison. Le défi ou l’exacerbation, en d’autres termes la guerre, la destruction de l’autre, l’autodestruction deviennent des moteurs plus actifs que l’humain et le raisonnement rationnel des intérêts dans la recherche du Bien commun.

Il nous faut donc nous résoudre, à regret, à reconnaitre qu’il existe dans la société politique, comme hélas dans la société humaine en général, cette notion maudite de part maudite de l’humain.

Nous avons pourtant, sous nos yeux, avec Poutine et l’Ukraine le pire où mènent ces instincts maudits : guerre, terrorisme, pollution, dégradations, injustices, gâchis en tous genres. Imperturbablement, nous semblons cependant vouloir continuer dans le refus de toute solution équilibrée, de réflexion rationnelle et de réconciliation pacifiée des intérêts partisans. La part maudite s’exprime sous la forme du rapport de forces têtu, du dominant dominé. La Raison en quête de consensus ne parvient pas à raisonner les absolutistes. Le refus de l’Autre l’emporte dans une démesure incompréhensible et débordante, dans la trahison de l’humain, dans sa destruction, dans l’autodestruction que l’humain raisonnable cherche à donner comme sens à sa vie.

Cette part maudite logée au cœur de notre corps politique est pathétique et mortifère. Ce corps politique ne parvient pas à faire Un avec lui-même pour incarner l’unité de la France. Il est incapable d’être entièrement rationnel, unifié sous un concept généralement qualifié de républicain. Au moment même où le Peuple déboussolé attend une rationalisation de ses peurs, une unification derrière un projet négocié et raisonnable, une symbolisation sous la forme d’un compromis, d’une coalition comme il s’en était créé une à la naissance de la 5ème République.

L’irréconciliabilité, la division, les rapports de force obstinés doivent être dénoncés comme la part maudite du corps politique français. Qu’il s’en indigne ou pas.

Il n’est pas concevable que le champ politique consacré à l’intérêt général soit envahi par la haine et les querelles incessantes. Une sorte de mauvaise copie de l’émission « scènes de ménage ». Ces scènes de ménage politiques deviennent des espaces de destruction par excellence. Tous les coups semblent permis, toutes les paroles les plus calomnieuses sont prononcées, y compris et surtout les attaques les plus basses, celles qui font le plus mal, par exemple sur la capacité de l’autre à gouverner. Alors qu’il faudra bien un jour s’entendre pour le faire. Les Français vivent sous la tyrannie des pulsions de destruction qui travaillent son corps politique.

Le temps est venu de siffler la fin de cette escalade du sordide. Comme des bêtes abruties, les acteurs s’abandonnent devant les caméras à la danse des mauvais mots dans une agressivité imbécile, sans accepter d’avancer d’un centimètre dans la résolution de la crise politique qui s’installe.

Comme il ne s’agit pas de céder au pessimisme, demandons au Peuple français qu’il ordonne à ceux qu’il vient d’élire de s’entendre pour trouver une solution raisonnable à la contradiction de leurs suffrages. Qu’ils deviennent adultes et responsables dans leur comportement. Que le principe de réalité s’impose face au caprice des partis. C’est de ce principe qu’est née la 5ème République. C’est de lui qu’elle vivra.

Les gaullistes et les socialistes qui s’étaient unis à cette époque devraient s’en inspirer et constituer avec Ensemble une coalition robuste et durable pour affronter le vent mauvais qui se lève.

 

 

Cet article doit beaucoup à Lucas Degryse pour son analyse sur l’autodestruction comme essence de l’humain.