La Banque centrale européenne (BCE) a injecté jeudi un montant historique record de 94,8 milliards d’euros dans le circuit monétaire de la zone euro pour compenser des mouvements inattendus sur le marché liés à la crise du crédit à risques. La BCE a procédé à un appel d’offre rapide, un type d’opérations auquel elle a recours quand des déséquilibres apparaissent sur le marché. Le précédent record datait du 12 septembre 2001, au lendemain des attentats du 11 septembre aux Etats-Unis. La BCE avait alors injecté 69,3 milliards d’euros.

« La BCE note qu’il y a des tensions sur le marché monétaire européen malgré le niveau de liquidités dans le circuit monétaire », a indiqué l’institut dans un bref communiqué destiné aux marchés.

La crise du crédit à risques aux Etats-Unis a un impact sur le marché monétaire en Europe en réduisant la fluidité de la monnaie disponible. Le taux au jour le jour en zone euro est même monté brièvement jeudi à 4,70%, très au-dessus du taux de refinancement, fixé actuellement à 4%.

« Pour assurer des conditions normales sur le marché », la BCE précise dans un communiqué qu’elle a décidé de « souscrire à 100% les offres soumises ».

Toutes les banques ayant participé à l’appel d’offre – 49 au total – ont donc été servies, précise l’institut.

La BCE procède à des appels d’offre rapide, dont le taux est fixé au taux minimum de refinancement, soit 4% actuellement, pour compenser des excédents ou des déficits inattendus de liquidités dans le circuit monétaire de la zone euro.

Par ailleurs, la BCE a confirmé jeudi son intention de procéder à une nouvelle hausse de taux en septembre et redit qu’elle allait suivre attentivement les turbulences sur les marchés financiers, à l’occasion de la publication de son bulletin mensuel.

« Une grande vigilance » est nécessaire concernant les risques qui pèsent sur la stabilité des prix, indique l’institut, reprenant les termes utilisés par son président, le Français Jean-Claude Trichet, au cours d’une point-presse la semaine dernière à l’issue de la réunion mensuelle de son conseil des gouverneurs.

Jusqu’à présent, l’emploi de cette expression a immanquablement conduit à un relèvement des taux le mois suivant.

« La politique de la BCE reste plutôt accomodante », indique encore l’institut monétaire dans son bulletin mensuel d’août, ce qui signifie qu’à ses yeux, les conditions du crédit restent favorables à la croissance économique en zone euro.

Les gardiens de la zone euro ont décidé la semaine dernière de laisser le principal taux directeur de la BCE inchangé à 4%. Depuis décembre 2005, l’institut a resserré la vis à huit reprises. De 2%, le principal taux a grimpé à 4% en juin dernier.

Parmi les facteurs à risque pesant sur les prix, l’institut monétaire cite toujours l’augmentation des prix du pétrole ainsi que des hausses de salaires plus fortes qu’attendu.

Une nouvelle menace provient aussi des turbulences récentes enregistrées sur les marchés financiers, conséquences de la crise du marché du crédit à risques aux Etats-Unis.

Pour la BCE, cette volatilité « peut être interprétée comme une normalisation de l’appréciation des risques », comme l’avait déjà dit M. Trichet lors de son point presse.

Pour autant, les gardiens de l’euro vont observer avec « une grande attention » les développements à venir sur les marchés financiers, alors que « la possibilité de changements abrupts potentiels du climat sur les marchés financiers mondiaux » représente un risque à moyen et long terme.

La BCE a publié dans son bulletin, comme elle le fait une fois par trimestre, le résultat d’un sondage réalisé auprès d’experts européens dont elle se sert pour pour établir ses propres projections économiques trimestrielles.

Les experts ont révisé en hausse leurs prévisions d’inflation pour 2007 et 2008, à 2%, alors qu’ils tablaient auparavant sur 1,9%. Ceci est dû à l’augmentation des prix du pétrole et aux perspectives plus favorables pour la croissance.

L’inflation dépasserait ainsi l’objectif de la BCE, qui est une hausse des prix à la consommation proche mais légèrement inférieure à 2%.

En ce qui concerne la croissance en zone euro, les experts ont revu leur prévision en hausse pour 2007 à 2,7%, contre 2,5% auparavant. Pour 2008 en revanche, ils tablent toujours sur un ralentissement de la croissance du PIB à 2,3%.

La BCE table sur une inflation de 2% en 2007 et en 2008 et sur une croissance de 2,6% pour 2007 et 2,3% pour 2008, selon ses dernières prévisions publiées en juin.