Un plan irréaliste dès l’origine. – Le plan France Très Haut Débit a été lancé en septembre 2013. Conçu en laboratoire à Paris par des technocrates n’ayant jamais traversé le périphérique, il a été fondé sur une idée intelligente en milieu urbain, celle de « la fibre à l’habitant ». Intelligente en milieu urbain, elle est insensée en milieu rural, et irréalisable dans un délai prévisible. Une solution raisonnable a fini par être retenue, celle de la fibre à l’habitant en milieu urbain, et la fibre au village en milieu rural. Cette fibre au village permettant de fibrer les sous-répartiteurs et de réaliser une importante montée en débit pour les abonnés en milieu diffus. Ce plan d’ensemble vise à doter le territoire français d’un réseau internet rapide et performant à l’horizon 2020. Pour atteindre cet objectif, il mobilise un investissement de 20 milliards d’euros en dix ans, partagé entre les opérateurs privés, les collectivités territoriales et l’État.
Une Commission européenne maraboutée par l’obsession de la concurrence. – La Commission européenne partenaire de ce plan s’y est soudain attaquée, depuis octobre dernier, car elle a cru y voir des subventions déguisées à l’opérateur Orange. Au motif que celui-ci pourrait bénéficier en qualité d’opérateur historique d’une modernisation de son réseau à moindre frais. Alors que l’instruction du dossier est toujours en cours, la Commission est incapable de donner la date approximative à laquelle sa décision sera rendue. Cette réaction de la Commission est typique de sa confusion permanente entre fin et moyen. La fin, c’est le développement économique, social et en la circonstance numérique de l’Europe. Le moyen c’est utiliser les solutions technologiques les plus appropriées pour atteindre cet objectif dans les meilleurs délais. Elle mélange les deux et le moyen exclusif de la fibre l’emporte sur la fin qui est d’offrir du débit à tous les Français, où qu’ils habitent.
En finir avec cette obsession de la libre concurrence. – La libéralisation commerciale a été certes à la source de la Communauté économique européenne puis de l’Union européenne. Elle a ensuite accouché d’une sorte de dérive sectaire, visant à magnifier un droit idéal de la concurrence pure et dure, qui s’est développé de manière totalement indépendante. La création d’un marché commun n’impliquait nullement cette dérive obsessionnelle. Ce nouveau droit de la concurrence s’est développé progressivement en s’appuyant alternativement sur des idéologies diverses, ordolibérales, néolibérales, et même parfois social-démocrates. Rien dans le Traité de Rome ne rendait pourtant cette évolution obligatoire. Bien au contraire, la construction européenne reste une construction plurielle, traversées par des dynamiques différentes, tantôt néolibérales, tantôt plus mercantilistes ou redistributives.
Aujourd’hui, la politique de la concurrence est un domaine de domination puissant au sein de la Commission européenne. Un domaine qui semble vassaliser les autres politiques publiques. Les citoyens et les Etats aujourd’hui ne supportent plus cette dérive de la Commission qui est discréditée aux yeux des citoyens par ses invraisemblables exigences, sans aucun avantage concret apporté au consommateur.
L’incapacité de la France à imposer sa vision. – Le Gouvernement fait preuve, dans ce dossier, d’un amateurisme criant. Il n’a cessé de se montrer optimiste sur le calendrier. Alors que les partenaires financiers du plan, la Banque Postale et la Caisse des dépôts et consignations, commençaient à tourner pudiquement les talons… Qui risque de payer le prix de cet imbroglio ? Les collectivités locales, d’abord, car ce sont elles qui pour l’instant ont fait l’avance de trésorerie. Les Français, ensuite, dont la montée en débit du réseau risque d’être retardée, à l’heure où la compétitivité de notre Pays est déterminante pour le retour à l’emploi et la reprise de notre économie. Parfois, on se demande s’il ne faudrait pas mettre Bruxelles en vacances !
Faut-il devenir anti-européen comme les anglais pour être enfin entendu par Bruxelles ? – C’est la question que l’on peut se poser. Car avec son Brexit, le Royaume Uni a fini par être entendu. Si la France veut réussir son plan numérique dans les meilleurs délais, il est temps qu’elle élève le ton et qu’elle rappelle à la Commission que l’Europe peut mourir demain de sa bureaucratie, doublée de son ignorance de la réalité des Pays profonds dont les grognements précèdent la révolte qui monte !
Lire l’article « Plan THD : validation bruxelloise en rythme modem » sur laGazette.fr
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