Le réseau consulaire des CCI s’y prend maladroitement pour procéder à l’évolution de ses implantations. Partenaire au quotidien des collectivités territoriales, et notamment des départements dans les territoires à faible densité de population, voilà qu’il tente d’organiser son déménagement « à la cloche de bois », en refusant tout dialogue, et même en effectuant sur le Parlement une pression inélégante.
Le Sénat, assurant la représentation des collectivités territoriales, l’a utilement rappelé au respect des Institutions et c’est à son honneur. Comme toujours, ce ne sont pas les CCI locales qui sont en cause. Au contraire, elles sont les victimes. C’est la tête du réseau national (CCI France), avec la complicité active des barons régionaux (CCIR) qui, ensemble, sont à la manœuvre pour tenter d’organiser en catimini la centralisation des ressources financières et humaines. La manière est d’autant plus détestable qu’elle est entourée d’arrogance, de mépris, et d’une rare absence de transparence.
Le prétexte avancé serait l’utilité de donner au réseau une souplesse d’administration. Il ne s’agit pas de le contraindre, mais de lui rappeler qu’il perçoit plus d’un milliard d’euros de taxes, lesquelles sont autorisées par un vote du Parlement, lequel est donc non seulement en droit mais en devoir d’en contrôler l’usage.
La majorité sénatoriale est d’inspiration libérale, elle est donc attentive à la liberté d’entreprendre, mais elle l’est tout autant aux prélèvements obligatoires qui pèsent sur les entreprises. Or les CCI ne vivent pas, comme les syndicats professionnels, de cotisations volontaires des adhérents mais de taxes obligatoires qui, en vertu de la DDHC, obligent à rendre compte, et à se soumettre au contrôle parlementaire.
Au surplus, les CCI ne sont en rien légitimes pour décider de la meilleure organisation territoriale de la République. L’échelon départemental a un statut constitutionnel fort, il vient d’être chargé par la loi de la solidarité entre les territoires. Si les CCI refusent d’accomplir leur mission dans les territoires en difficulté, alors qu’elles renoncent aux taxes obligatoires et qu’elles lèvent des cotisations volontaires. On leur souhaite bonne chance !
La réforme consulaire de 2010, adoptée bien avant l’instauration des régions XXL, avait déjà donné lieu à des débats vifs, précisément à propos de l’enjeu de la proximité. La question en devient donc plus cruciale encore. Un texte très souple a ouvert la voie à une régionalisation à la carte. Les chambres régionales ne disposent d’aucun mandat législatif pour tenir autoritairement la plume. Les schémas sectoriels n’ont aucune valeur prescriptive, ce qui a été la volonté du législateur. Le Gouvernement a cru pouvoir passer en force en les imposant dans la loi Macron, ce qui a été invalidé par le Conseil Constitutionnel. Il a pris ensuite une Ordonnance sur la base d’une habilitation contestable qui n’a rien changé au droit existant. Alors, dans l’improvisation, il a déposé en urgence une loi sur le bureau du Parlement, adoptée sans approfondissement par l’Assemblée. Le Sénat ne s’est pas laissé prendre. Il a veillé à insérer deux dispositions essentielles, d’abord l’obligation d’une CCIT au moins par département, afin de garantir la proximité et ensuite il a affirmé le caractère non rétroactif de la loi, afin qu’aucun schéma adopté sous forme indicative ne puisse soudain se transformer en forme obligatoire. Si les CCIR veulent imposer autoritairement un schéma, elles devront respecter la loi nouvelle, c’est à dire en refaire un !
Le Sénateur de l’Orne Jean-Claude Lenoir, qui préside avec talent la Commission des Affaires Economiques du Sénat, a accompli un excellent travail de législateur. Lui et sa Commission ne se sont pas laissé intimider par le lobby parisien des CCI, ni par le Gouvernement. L’excellent rapporteur Michel Houel et plusieurs Sénateurs, comme Elisabeth Lamure, Sophie Primas, Philippe Leroy, Gérard Bailly, Bruno Sido, Daniel Gremillet, Philippe Adnot, Jean-Jacques Lasserre, Nathalie Goulet, connaissant parfaitement la vie économique de province ont rétabli l’indispensable obligation de proximité. Qu’ils en soient félicités.
L’Assemblée des Départements de France a été réactive suite à la demande de nombreux Présidents de Conseils Départementaux indignés par la méthode employée.
Espérons que la Commission Mixte Paritaire saura reprendre à son compte le texte du Sénat, et que le Gouvernement n’essaiera pas, à nouveau, de passer en force. A défaut, il faudra aller devant le Conseil Constitutionnel, soit sur saisine parlementaire, soit par la voie d’une QPC parfaitement possible, attendu les procédures en cours.
Dans la situation économique difficile dans laquelle le Pays se débat, n’y a-t-il pas mieux à faire que vouloir s’obtenir « des petites lois entre amis » pour satisfaire l’appétit des grosses structures centralisées ? La France ne s’en sortira que par la concorde, le rassemblement de toutes ses forces, par le respect mutuel, le dialogue et l’écoute et par des choix transparents et partagés.
On marche sur la tête quand les représentants des entreprises en viennent à décourager leurs meilleurs alliés.
Cher Alain,
Je partage tes commentaires.L’évolution en Normandie est le fruit d’une volonté ne reposant sur aucune légitimité.Certains élus souhaitent que les CCI soient des opérateurs de proximité pour le compte des collectivités.Cette revendication est juste et pertinente lorsque les CCI font preuve de compétences. Mais , faut il que certains élus consulaires n’ignorent pas ,voir méprisent les élus des collectivités locales.Je prendrai contact avec toi dans les jours à venir . Bien à toi.Francis Saint-Ellier