La question de l’austérité, que l’on appelait la rigueur, dans les années 80, n’est pas nouvelle. Elle revient en boucle, à peu près tous les dix ans, lorsque le cycle économique est défavorable. Elle est sans solution, en dépit d’un foisonnement d’analyses. Une ligne de fracture impossible à réduire existe au sein de la communauté des économistes, entre les tenants de l’école keynésienne et les autres. La vérité est qu’il n’est pas possible de déterminer l’efficacité d’une politique de relance et qu’il est, de toute manière, inenvisageable pour un pays de la mener sans coordination, tant les économies nationales sont aujourd’hui interdépendantes. Dans ce contexte où les économistes ne sont pas capables d’apporter des certitudes, voilà que les décideurs politiques s’emparent de ce débat pour alimenter et justifier leurs contradictions. Il en résulte une navigation à vue, une perte de temps, et le report de la question de savoir quelle génération paiera la dette.
Puisqu’il n’existe pas de vérité économique incontestable, il convient de trouver une solution politique. Depuis plus de 30 ans, le choix de l’Europe a été fait. C’est le seul raisonnable. Même si la gouvernance européenne est loin d’être à la hauteur des enjeux.
En 1983, François Mitterrand imposa le « tournant de la rigueur » ! Dans un contexte d’attaques contre le franc, il lui était impossible de poursuivre la politique de relance engagée en 1981, sans sortir du système monétaire européen. Il dut revenir sur ses engagements de début de mandat et créa un grand désarroi dans l’électorat de gauche.
Dix ans plus tard, en 1992, il dut faire face à une nouvelle crise monétaire, suite au rejet par le Danemark par Référendum du Traité de Maastricht, la campagne difficile pour le référendum français, et la défense de la parité nominale de notre monnaie face au mark. Une déroute électorale s’en suivit en 1993.
Cinq ans après, en 1997, Jacques Chirac procéda à une dissolution de l’Assemblée Nationale qui fut moquée sur le plan politique puisqu’elle produisit une alternance. Mais, à la vérité, son motif reposait sur l’impossibilité face à laquelle il se trouvait de construire le budget pour 1998 avec un déficit inférieur à 3% qui était pourtant indispensable pour la qualification à l’euro.
Cette série d’exemples montre que le débat franco-français sur les vertus et dommages de ce que l’on nomme improprement austérité ou rigueur dissimule des questions infiniment plus lourdes que les caprices de ministres. Il s’agit purement et simplement de notre appartenance à l’Union européenne, et de respecter nos engagements passés avec nos voisins pour construire notre monnaie. Que nous ne voulions pas partager leur vision de la discipline budgétaire est une chose. Encore que nous l’avons choisie ensemble. Que nous voulions leur imposer la nôtre est totalement irréaliste.
Il y a donc urgence à sortir des faux débats économiques entretenus car ils ne trouveront pas de réponse incontestable. La seule question est notre appartenance à l’Union européenne. Ceux qui veulent en sortir doivent le dire et l’assumer. Pour les autres, il est urgent de nous entendre et de travailler tous ensemble pour y recouvrer notre crédibilité. Nos discours et nos théories n’intimident plus personne depuis longtemps. Seuls nos résultats comptent.
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