Nous avions posté un billet lors de la parution de l’interview sur le site Medipart mais en me promenant sur Dailymotion, je découvre que la journaliste, très douée, en a posté d’autres que je vous invite à visionner ! La première traite de la relation particulière, car très ancienne, entre le Président de la République et Alain Lambert et la seconde vidéo traite de l’indépendance des deux « favoris » à la Présidence du Sénat par rapport à Nicolas Sarkozy.
Affaire Tapie : on nage en eaux troubles
Depuis 1993, de recours judiciaires en recours judiciaires, Bernard Tapie poursuivait le LCL (ancien Crédit Lyonnais), pour l’avoir lésé, selon lui, dans l’affaire de la vente de l’entreprise Adidas dont il avait chargé la banque.
L’État français était concerné puisque, depuis 1995, et à la suite de la faillite du Crédit lyonnais, il a pris la charge des dettes de cette banque.
Dans cette affaire, la Justice s’était prononcée contre les attentes de Tapie puisque, le 9 octobre 2006, la Cour de cassation avait annulé la précédente décision d’un tribunal, en refusant le versement de dédommagements au plaignant.
Au printemps 2007, cependant, en pleine course à l’Élysée, Tapie déclarait son soutien à la candidature de Nicolas Sarkozy. Même si cette flamme soudaine pour un champion de la droite pourrait sembler suspecte, de la part d’un homme du Parti Radical de Gauche (PRG), je ne doutais pas, à ce moment, un seul instant du désintéressement de son geste. (Monsieur Tapie avait déjà soutenu des personnes par le passé)
Néanmoins, le nouveau Président élu, les parties concernées, dont l’État (sans visiblement en avoir averti le Parlement)donc, décidèrent de remettre l’affaire de Tapie et du Crédit Lyonnais sur la sellette en convoquant un tribunal d’arbitrage. Une telle cour n’a aucune relation avec le système judiciaire officiel et n’importe qui peut y avoir recours pour régler un différend. Il suffit pour les adversaires d’accepter de se soumettre à la décision des « arbitres » choisis par eux.
Première anomalie, on voit l’État avoir recours à une justice privée pour remettre en question une décision prise par « son » système judiciaire.
Seconde anomalie, les « arbitres » n’ont pris la peine de n’écouter que Monsieur Tapie et à aucun moment ses contradicteurs. (A commencer par le banquier (désolé je n’ai plus le nom) qui fait l’économie au Modem.
Troisième anomalie, la personnalité de deux des arbitres. Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, a fait fonction de vice-président dans le « Comité de réflexion sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions ». En d’autres termes, il est la cheville ouvrière de la réécriture, aux ordres de Monsieur Sarkozy, de la réforme de la Constitution. Jean-Denis Bredin, avocat, a aussi été vice-président du MRG (Mouvement des radicaux de gauche). Le parti, devenu PRG, auquel a appartenu Monsieur Tapie, comme je l’ai dit plus haut. Cela crée des liens. Sans abuser, l’indépendance de ces «juges », me semble douteuse.
Quatrième anomalie, vendant Adidas, Monsieur Tapie avait dégagé une plus-value de 200 millions de francs. Il n’était donc pas perdant. Or, la cour d’arbitrage lui a accordé une indemnité de 285 millions d’euros, à laquelle il a ajouté les intérêts et 45 millions pour « le préjudice moral ». Comme le fait remarquer François Bayrou dans « Le Monde » du 25 juillet, « l’indemnité moyenne, pour une veuve, après la mort d’un conjoint victime de l’amiante, est de 45 000 euros, soit mille fois moins ». Et un homme qui a passé 10 ans dans nos prisons, pour en fin de compte se voir innocenté, a reçu 1 Million d’euros. Oserais je dire que son "préjudice moral" était bien plus important?
Cinquième anomalie, à titre de dédommagement, les trois arbitres se partagent un million d’euros. Plus de 300 000 euros chacun. A titre de comparaison, plus de deux millions de francs lourds. Royal comme pourboire, non ?
Sixième anomalie, l’État français payant les dettes du Crédit lyonnais rebaptisé LCL, c’est à lui que revient le règlement de la facture. Donc au contribuable. Certes, Monsieur Tapie doit rembourser quelques créances. Il lui restera néanmoins 22 millions d’euros à se mettre dans la poche.
Voyez-vous, dans la suite de ces anomalies, la preuve d’une action concertée, destinée à privilégier les intérêts d’un homme aux dépens de la collectivité ? Le dire serait médire.
Selon vous, Monsieur Lambert, l’argent public a t il bien été dépensé? On peut raisonnablement se le demander.
Pendant ce temps là, nos soldats payent eux mêmes leur équipement ! Et n’ont pas les moyens financiers et humains pour se défendre ! (Quelle bonne pub que ce rapport publié dans un journal Canadien. Je suis sure que les Talibans se marrent déjà !)
Voilà une belle leçon qui pourrait s’appliquer à d’autres cas de figure: la possibilité de l’équation loyal et indépendant, critique et fidèle. Que ces paroles d’Alain Lambert soient bien méditées. Ne pas être le toutou de son chef, garder sa liberté dans toutes les occasions, faire des choix sans qu’ils soient guidés, faire du mieux possible ce que l’on croit juste pour soi et pour autrui et ne pas sombrer dans le louange sectaire pour être aimer du prince…