Le débat qui vient de s’ouvrir entre le département de la Mayenne et le Gouvernement n’affecte en rien l’attachement de tous à la dignité de la personne humaine et notamment celle des enfants. Mais il révèle le désordre insensé du fonctionnement de notre Pays.
Pour bien connaitre Jean Arthuis, et depuis longtemps, je comprends parfaitement son exaspération et suis absolument sûr qu’il ne relève en aucune manière d’une quelconque stigmatisation des enfants mineurs étrangers isolés.
Au contraire. Qu’on ne s’y méprenne pas : les conflits latents entre l’Etat les Départements vont se multiplier ! Si rien n’est fait très vite pour clarifier enfin l’exercice des compétences sociales aujourd’hui partagées d’une manière totalement désordonnée entre les administrations centrales et les conseils généraux, le blocage est imminent. Pour l’instant les pratiques sont simples : les centrales décident et les conseils généraux payent ! Ils sont même priés d’applaudir. Nous avons atteint le summum de l’autisme administratif. Cela ne peut plus évidemment continuer pour plusieurs motifs. En voici les principaux.
Le premier motif est que les départements sont d’ores et déjà purement et simplement ruinés par ces pratiques. Ils ne peuvent plus faire face aux engagements souscrits pour leur compte, sans leur demander leurs avis, par l’Etat lui-même, et sans leur donner les moyens pour y faire face.
Le deuxième motif est celui communément appelé de « bonne administration ». Il est devenu irresponsable, insécure, insensé de prétendre déterminer et conduire une politique par plusieurs autorités en même temps. L’une commande et l’autre paie. Comme la première n’a aucune idée des couts de ses prescriptions ininterrompues, l’autre ne peut plus payer et pourrait même faire défaut au cours de la présente année 2013.
Le troisième motif est l’inefficacité de ces politiques sociales. Elles sont devenues « sans visage », aveugles, fabriquées à la chaine, sur imprimé, dépersonnalisées, pilotées d’en haut par des gens jamais confrontés à la réalité sociale qu’ils prétendent savoir améliorer. Leurs mauvaises politiques créent des effets d’aubaines pour des filous qui vivent au crochet de la société, laissant à l’abandon de vrais pauvres, dignes, reclus dans leur détresse qu’ils n’osent révéler.
Le quatrième motif est financier. Le précepte « qui commande paie » entre les administrations doit être érigé en principe constitutionnel. A défaut, la France fera faillite. Si ses très et trop nombreuses et dispendieuses administrations se renvoient les factures tout en brandissant leur superbe autonomie, le comptes déjà en rouge vont devenir écarlates. La pluralité d’administrations ne doit pas faire oublier qu’il n’existe qu’un seul contribuable. Il menace de renoncer à sa condition de citoyen d’un Pays revenu au moyen âge avec ses féodalités administratives et bureaucratiques rivales entre elles.
Dans le débat ouvert par Jean Arthuis, il n’y a pas de jugement de valeur sur la politique menée par le gouvernement en matière de mineurs étrangers. Il ne fait que souligner que s’agissant d’une politique décidée au niveau national, elle doit être mise en œuvre et financée par le niveau national. Si, comme les ministres le prétendent, cette politique relève de la compétence des départements et de leurs finances, alors qu’on les laisse décider eux-mêmes de la politique qu’ils veulent mener.
Nous avons besoin de cas pratiques comme celui-là pour constater l’invraisemblable désordre dans lequel fonctionne en effet notre Pays.
J’ai le sentiment pour ma part d’y avoir consacré la plus grande partie de mon temps depuis 6 ans, en n’ayant que rarement pu retenir l’attention des administrations centrales. D’où le courroux qui monte et qui se traduit par des tribunes de plus en plus insistantes.
La question des normes n’est qu’un aspect de la funeste déconnexion du pays entre ses administrations centrales et ses administrations déconcentrées et décentralisées. La déconnexion est pleine et entière, sous tous les aspects, juridiques, financiers, sociaux, et surtout de responsabilité.
Je n’ai cessé d’appeler à la consolidation des comptes publics entre toutes les administrations afin qu’il apparaisse clairement le gaspillage de deniers publics entre des échelons qui font tous un peu la même chose et qui se renvoient la facture laquelle finit toujours aux dépends du seul contribuable. Personne ne veut comprendre !!!
Finissons-en ! Le blocage pur et simple de l’exercice des politiques partagées entre administrations tant que de l’ordre ne sera pas remis est une solution à envisager.
Que le débat lancé par Jean Arthuis serve à cela.
Lire rapport Alain Lambert au Gouvernement sur les relations entre l’Etat et la Collectivités Locales : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/074000741/0000.pdf
Voir aussi Schémas d’enchevêtrement Etat APUL_
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