Ce matin, je pars assez tôt au Sénat pour utiliser le savoir-faire de mon secrétariat pour « pister » F. Mer. Après de multiples échecs, nous parvenons à nous parler 2 minutes pour constater que nous sommes grossièrement sur la même ligne d’orthodoxie budgétaire et de liberté économique.
Je rappelle le Premier Ministre pour lui donner mon accord, il m’en remercie et pronostique une publication du gouvernement en fin d’après midi.
Je dois partir immédiatement pour Alençon où je me rends à l’inhumation de mon prédécesseur dans la fonction de Maire : Pierre Mauger. Il a exprimé la volonté que je prononce son éloge funèbre. Ce sera un moment émouvant pour moi. Nous avons commencé comme adversaires politiques. Progressivement nous sommes devenus seulement opposants puis amis personnels. Tout simplement. Mais sincèrement. Une amitié sincère est née entre nous, une vraie complicité même, et son départ m’attriste profondément. J’aperçois comme un symbole au fait qu’il passe sur l’autre rive le moment même où une nouvelle étape de ma vie politique commence. J’ai préparé un texte où j’ai mis tout mon cœur et mon émotion. La cérémonie sera un instant rare de communion entre lui,son souvenir, sa mémoire et moi. Ce moment donne de la densité, de la profondeur, de la portée à nos engagements publics. A l’exigence de les exercer avec la plus haute dignité dont nous sommes capables.
Autour de 18h, sur le perron de l’Elysée Philippe Bas, nouveau secrétaire général lit la composition du gouvernement. J’entends mon nom sans la moindre émotion, comme si l’inhumation dont je sors scande de manière plus puissante encore la vraie vie.
Le téléphone ne cesse de sonner. La famille, les amis, les vrais, les intéressés, les journalistes.
J’appelle Augustin de Romanet qui sera mon Directeur de Cabinet pour lui donner le top départ de la constitution du cabinet dont nous convenons qu’il doit être parmi les meilleurs du gouvernement. Dès le premier instant, nous nous fixons le plus grand professionnalisme possible dans ce que nous ferons.
Laurent Fabius au téléphone : Alain, je te félicite sincèrement et suis heureux que ce soit toi. En revanche fais le maximum pour que la transmission des pouvoirs puisse se faire le plus vite possible. Es-tu à Paris dès ce soir ?
Je lui réponds que je suis en Alençon et que le lendemain matin je souhaite participer aux cérémonies patriotiques du 8 mai.
Alors, demain après midi au plus tard insiste-t-il. Je lui suggère de voir cela avec F. Mer qui est tout de même son homologue.
Florence Parly appelle à son tour : compliments ! Ta nomination atténue mes regrets. Nous plaisantons parfois en disant que nous fait un enfant ensemble. Il s’agit de la LOLF que nous avons comme mise au monde à trois avec Didier Migaud.
Finalement la passation de pouvoirs est fixée au lendemain 18h à Bercy.
Puisque c’est l’heure de l’apéritif, nous joignons dans la précipitation tous les élus de la majorité municipale pour les inviter à partager le verre de l’amitié à la Renaissance, célèbre grand café d’Alençon. C’est un moment de joie profonde partagé par une équipe de gens sincères qui vivent à mes côtés un engagement municipal exemplaire. Je lis la fierté dans leurs yeux. Ils resteront ce que j’ai connu de plus fort, de plus constant, et de plus sincère dans la vie publique.
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