Poursuite de notre promenade culturelle à travers les rues d’Alençon. Aujourd’hui, arrêtons-nous sur la rue Sainte-Thérèse.

11 – Rue Sainte-Thérèse

« Proche de la maison natale de Thérèse Martin, elle relie la rue Saint-Blaise à la place Bonet.
Probablement ouverte au début du XVIIe siècle, figurant sur le plan de 1745, elle est attestée sous le nom de ruelle des Capucins en 1839. Promue au rang de rue le 7 mai 1875, elle constitue alors un tronçon de celle des Capucins qui relie les rues Saint-Blaise et Cazault en formant un angle droit. La délibération du conseil municipal du 21 mars 1947 la rend indépendante en lui donnant le nom de sainte Thérèse à l’occasion du cinquantième anniversaire du décès de celle-ci.

Thérèse Martin est née le 2 janvier 1873 au numéro 50 de la rue Saint-Blaise. Elle vit son enfance dans un milieu empreint de dévotion, accentué par la personnalité de ses parents dont les vocations religieuses ont été contrariées. Mme Martin meurt le 28 août 1877 d’un cancer ; Louis Martin liquide alors ses affaires et s’installe à Lisieux. A 10 ans, Thérèse tombe malade et elle est la proie de crises d’hallucinations. Le médecin qui diagnostique une maladie grave dont jamais aucune enfant n’a été atteinte assure qu’il ne s’agit pas d’hystérie. De cette épreuve, elle reste psychologiquement fragile et son entourage s’efforce de ne pas la contrarier afin d’éviter des rechutes. Le jour de sa seconde communion, elle sent naître un grand désir de souffrance. Jusqu’ici, écrira-t-elle, j’avais souffert sans aimer la souffrance, depuis ce jour, je sentis pour elle un véritable amour. Pendant la nuit de Noël 1886, Thérèse décide d’être carmélite. Elle est admise au carmel de Lisieux le 9 avril 1888 après avoir écrit la veille à sa sœur Agnès : Je veux être une sainte. En prononçant ses vœux, le 24 septembre 1890, elle devient sœur Thérèse de l’Enfant-Jésus et de la Sainte-Face ; elle suivra les règles du carmel (couvent où les religieuses, cloîtrées, cherchent Dieu par la prière) avec enthousiasme : obéissance, humilité, charité, détachement de toutes choses et surtout amour des souffrances. En 1894, elle commence à ressentir des douleurs dans la poitrine. Sa santé délicate résiste mal aux rigueur de la vie conventuelle. Aux fatigues et aux mortifications se mêle la douleur de la perte de son père décédé le 29 juillet. Un jour, des voix intérieures lui suggèrent que toute sa vie spirituelle n’a été qu’illusion et qu’elle va mourir jeune pour rien. Elle pense au suicide. En 1896, la maladie se fait plus présente. Fin août 1897, le médecin annonce : La tuberculose est arrivée au dernier degré. Après une agonie de quinze jours, elle décède le 30 septembre 1897.
Son autobiographie, Histoire d’une âme, éditée l’année suivante, fait le tour des cloîtres. On parle de Thérèse de Lisieux dans les environs et on vient prier sur sa tombe. Le pèlerinage naît ainsi d’un mouvement populaire qui va s’amplifiant. Durant la Première Guerre mondiale, les soldats des deux camps adoptent la jeune carmélite comme protectrice. La popularité de Thérèse devient immense. Devant ce culte incontrôlé, l’Eglise intervient en la canonisant. Le 14 août 1921, le pape promulgue l’héroïcité de ses vertus et la proclame vénérable, puis elle est béatifiée le 29 avril 1923 et inscrite au catalogue des saints le 17 mai 1925. En 1927, elle est choisie comme la patronne des missionnaires du monde entier. Le pape Pie XII, le 3 mai 1944, proclame Thérèse patronne secondaire de la France à l’égal de sainte Jeanne d’Arc. Le 19 octobre 1997, celle qui écrivit : Jésus n’a point besoin (…) de docteurs pour instruire les âmes, est nommée docteur de l’église par Jean-Paul II.
Après 1951, date du décès de mère Agnès, sa sœur, qui avait la haute main sur l’héritage, certains historiens assurent que ses sœurs ont retouché ses écrits et l’ont mise en scène en forme d’image d’Epinal. Jean-François Six, prêtre et historien, assure que le texte d’Histoire d’une âme a été publié avec 7 000 retouches et que les véritables photographies de Thérèse sont apparues soixante ans après sa mort. Il cite Georges Bernanos qui déclara : Thérèse a été vendue par ses sœurs, souligne la discrétion de certains sur la maladie mentale de son père et le dolorisme de sa mère. Cette petite moniale qui n’a jamais quitté son carmel, dans lequel elle mena une vie sans relief, d’après le Petit Larousse, et qui, finalement, ne s’est distinguée en rien, est universellement connue. Sainte Thérèse est la patronne des fleuristes.»

Texte extrait du Dictionnaire des rues et monuments d’Alençon, d’Alain Champion, illustrations de Fabien Petit, publié aux Editions Cénomane, septembre 2003, 320 p.