Dans l’édition du Monde de ce jour un excellent article de Claire Guélaud présente les travaux réalisés par le Conseil d’Analyse Economique sur la modernisation de l’Etat. En effet le CEA a présenté, jeudi 18 janvier, à Jean-François Copé, ministre du budget, 19 propositions pour réorganiser l’Etat, donner plus de liberté de gestion aux managers publics et aller vers une règle d’or budgétaire consistant à « réserver l’emprunt aux seules opérations d’investissement ». Voici la suite de son article :
Ces différentes mesures figurent dans un rapport rédigé par le président du CAE, Christian de Boissieu, par l’économiste Jean-Hervé Lorenzi et par deux membres du cabinet du ministre délégué au budget, Edward Arkwright et Julien Samson, pour qui la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) n’a pas de secret.
Le rapport, Economie politique de la LOLF (http://www.cae.gouv.fr/), est un plaidoyer pour la réforme de la sphère publique. Il invite implicitement les politiques à s’appuyer davantage sur la réforme budgétaire de 2001 pour rénover la gestion publique. Désireux d’obliger l’Etat à expliciter ses choix, le CAE préconise de systématiser l’évaluation a priori des décisions publiques, de réorganiser l’administration en généralisant les agences.
Partisan de « confier les structures publiques à de véritables patrons » en élargissant au privé le recrutements des responsables de programmes budgétaires, il veut doter chaque administration d’un conseil de surveillance, à la culture pas exclusivement publique, et chargé de « contribuer à l’amélioration de la conception et de la mise en oeuvre des politiques publiques ».
Comme les « pères » de la LOLF, Alain Lambert, sénateur UMP de l’Orne, et Didier Migaud, député PS d’Isère, qui ont remis le 31 octobre 2006 un rapport au premier ministre, le CAE déplore la persistance de vieux réflexes gestionnaires (Le Monde du 3 novembre 2006). Il propose de remettre en cause l’annualité budgétaire. Il faut, dit-il, mettre en place des outils budgétaires pour permettre à l’action publique de « s’inscrire dans la durée ».
Le CAE prône, au nom du rétablissement des finances publiques (comme l’UMP), » un réexamen significatif, exhaustif et sans tabou des dépenses publiques dès le premier euro ». Il souhaite que la norme de dépenses s’applique à l’ensemble des catégories de dépenses de l’Etat (prélèvements sur recettes, dépenses fiscales…). Cette mesure, également défendue par le sénateur (UMP, Oise) Philippe Marini, rendrait quasi impossibles les tours de passe-passe pour minorer les dépenses. Le CAE souhaite étendre l’esprit de la LOLF – notamment la culture de la performance – à toute la sphère publique, Sécurité sociale comprise.
Claire Guélaud
Article paru dans l’édition du 20.01.07
J’allais justement vous signaler cet article et surtout le rapport "Economie politique de la LOLF" qui va tout à fait dans le sens de vos préconisations avec M. Migaud. Surtout continuez. Avec le renfort d’aussi brillants économistes, cela va encore donner de la force à vos propositions au sein de l’appareil d’Etat.
Merci de nous tenir si précisément au courant des remèdes proposés à la dérive de la dette publique.
Ce qui est désolant, c’est que de partout des voix s’élèvent pour dire "ça ne peut plus durer" et pourtant, ce sont les tenants de l’immobilisme qui domine – avec le soutien de la gauche, malheureusement !
Bonne idée certes celle des agences, à condition qu’elles aient l’autonomie effective de décision, et que les cabinets ministériels ne soient pas en permanence à vouloir influer les opérations voire à changer leurs dirigeants (on pourrait donner des exemples).
Le système français des cabinets ministériels devenus pléthoriques ne permet pas l’autonomie de décision: le rapport du CAE s’attaque-t-il à cela?
Sans vouloir être taxé d’atlantisme (pseudo-injure à la mode), regardons ce qui se passe aux US: des ministres peu nombreux, quasiment sans cabinet, des responsables d’agence forts (NSF, NIH, DARPA,…), et le "système des dépouilles", càd la plupart des fonctionnaires ou politiques responsables d’agence changent à chaque alternance majeure.
La proposition du CAE d’une administration responsable est intéressante, et sans doute la bonne voie, mais les politiques sont-ils prêts à en tirer toutes les conséquences, à savoir une délégation effective de responsabilité opérationnelle, et conséquemment un pouvoir opérationnel moins fort au niveau des Ministres, ainsi libérés pour définir les orientations stratégiques de leur ministère?
Il ne fait pas de doute que ce rapport s’inscrit dans la logique de la LOLF et que ses préconisations sont cohérentes. Fallait-il toutefois mobiliser tant d’experts pour parvenir à un résultat, somme toute assez évident : évaluation généralisée, réforme de la fonction publique, promotion de l’investissement et maîtrise de la dette … D’autres, dont Alain Lambert, l’avaient dit avant. Le mérite de tout cela est peut-être de contribuer à une certaine médiatisation de ces nécessités …
je n’ai pas trouvé le rapport sur le site CAE c’est peut-être trop tôt , pas encore publié ou mis en ligne ?
pourquoi pas des Agences mais ça ne réglera pas tout : il restera toujours des besoins de petites mains (encore fonctionnaires donc !) pour faire le lien entre les délégués territoriaux par exemple des agences et le local (proximité nécessaire au niveau préfecture ou autres administrations par rapport aux décideurs locaux sans lesquels rien ne sera possible vu le désengagement croissant de l’Etat sur nombre de politiques dites publiques).
Nous autres gestionnaires attendons toujours, à cet instant, non seulement les "premiers euros" des crédits 2007 (qui furent livrés courant avril en 2006), mais aussi, l’autorisation de mettre effectivement en oeuvre la fongibilité asymétrique des crédits, premier élément de la modernisation de l’état.
Pour l’autonomie, on pourrait commencer par l’école ?!
Je ne crois pas à ce modèle basé sur des agences dans notre système français; les exemples ne manquent pas pour montrer que les agences actuelles viennent toujours s’ajouter aux structures existantes et ne diluer qu’un peu plus les responsabilités et le devoir d’initiative.
Tout à fait d’accord avec AlexM pour dire que les politiques devraient tirer toutes les conséquences de ces évolutions c’est à dire un abandon total du pouvoir opérationnel et donc notamment une suppression des cabinets ministériels, un transfert intégral des directions ministérielles centrales, des entités locales dans ces nouvelles agences. C’est très loin de la pratique. Au contraire, la tendance sous prétexte de résultat, est le pilotage en direct des moindres projets susceptibles de donner un peu de visibilité …
Aucun ministre, aucun gouvernement sera assez idéaliste pour se couper les deux bras de sa capacité d’action opérationelle qui sont de plus en plus les seules conditions de son existence politique (Bercy n’est d’ailleurs pas en reste …).
Toute réforme de l’état ignorant le jeux des acteurs et les réelles pratiques de management est vouée à l’échec …
Attention, Claire Guélaud a écrit dans un article il y quelques jours : "solde primaire à 0 => l’etat ne s’endette plus pour payer les interêts de sa dette."
C’est faux !!
En réalité, solde primaire à 0 => l’Etat ne s’endette plus QUE pour payer les interêts de sa dette !
l’idée n’est pas a priori mauvaise, et pour contredire yauraitka, il existe des exemples d’agences qui ne s’ajoute pas à l’existant, mais s’y substitue. Certaines performantes (on n’en parle pas plus que des trains à l’heure), d’autre moins (ANPE, par exemple).
Cela étant, je suis toujours sceptique à l’égard des propositions qui créent des préalables et des conditions (ici : un changement de structures) pour rendre possible l’action. En pratique, ces propositions font plus de mal que de bien, car elles retardent l’action !
Je crois plutôt que c’est inverse : l’action energique et efficace amène l’évolution des structures (ici : la structuration en agence)
Mes excuses, je suis sans doute d’une nullité aboutie, mais je n’ai pu mettre la main sur le rapport en question.
Quelqu’un pourrait-il éclairer ma lanterne ?
dommage, le rapport n’est pas encore disponible sur le site du CAE, ce doit être dû aux lenteurs administratives.
A quand la transformation du cae en agence ?