Dans le précédent billet, il s’agissait de se demander si les chartes de gestion allaient constituer un frein à la liberté des nouveaux gestionnaires publics. Au contraire, ne pourraient-elles pas permettre de clarifier les relations entre les différents niveaux de responsabilité et ainsi devenir un outil permettant au Parlement de contrôler plus efficacement la gestion des programmes.

En effet, le cadre de déclinaison opérationnelle des programmes aboutit à une multiplication des niveaux de responsabilités (Programmes – BOP – UO). Dès lors que les fonctions de chacun des acteurs-responsables ne sont pas clairement délimitées par un texte, le risque est grand que cette stratification entraîne une dilution des responsabilités. Il est à craindre en effet, comme certains exemples étrangers ont pu le démontrer, que les différents responsables se « renvoient la balle » s’agissant de la responsabilité d’une éventuelle faute de gestion.

Sans revenir sur l’articulation des responsabilités politiques/managériales des décideurs, on peut très bien imaginer que face à une défaillance dans la gestion d’un programme, le RPROG se défende en soulignant une inefficacité de certains services opérationnels, le RBOP en prétextant un mauvais cadrage (ou pilotage) de l’administration centrale ou encore le RUO en prétendant qu’il ne disposait d’aucune liberté décisionnelle…

C’est sur ce point que la charte de gestion pourrait avoir un effet indirect particulièrement bénéfique pour la responsabilisation des gestionnaires puisqu’elle précise les règles de gestion applicables au programme et les responsabilités de chacun des acteurs. Il suffirait alors d’identifier la cause du dysfonctionnement et la personne disposant effectivement du pouvoir décisionnel pour identifier le responsable et lui imputer ou non une éventuelle faute de gestion.

Certes, un tel mécanisme apparaît quelque peu idyllique. Encore faut-il pouvoir en pratique identifier le dysfonctionnement pour pouvoir l’imputer à un responsable ou à un service. Encore faut-il aussi que les dysfonctionnements ne soient pas multiples et imputables tant à une mauvaise gestion qu’à de mauvaises décisions. Il est évident que la bonne ou la mauvaise gestion d’un programme ne se déduira pas de la simple lecture des chartes de gestion. Mais incontestablement cet outil pourrait permettre de responsabiliser chacun des acteurs et à tout le moins, pour le Parlement, d’avoir une vision claire et précise des modalités concrètes de fonctionnement du programme. N’est-il donc pas indispensable que ces documents puissent faire l’objet d’une grande transparence et soient, en particulier, mis à la disposition des parlementaires ?

Si les chartes de gestion sont considérées comme des « documents à usage interne à chaque programme » (J.-F. Soumet, DPMA), il était envisagé qu’elles soient communiquées à la Cour des comptes, au CIAP et aux missions parlementaires. Espérons que cette solution ait été retenue dès lors qu’elle va incontestablement dans le sens de la transparence et la responsabilisation voulue par le législateur organique.

Catteau Damien, Université de Lille 2, Laboratoire du GERAP-GREEF.