Le temps m’a manqué pour vous raconter ma belle journée passée mercredi dernier sur la chaîne parlementaire de télévision « Public Sénat » qui invite, de temps de temps, un Sénateur comme « Rédacteur en Chef d’un jour ». Plutôt perplexe sur l’initiative, lorsqu’elle m’a été proposée, je l’ai trouvée absolument passionnante et je remercie l’ensemble de la rédaction de me l’avoir offerte, et aussi pour m’avoir accueilli avec simplicité et spontanéité.

En cinq minutes, j’étais assimilé. Immédiatement, Philippe Di Nacera, en véritable chef d’orchestre m’a expliqué, dès mon arrivée à 9h30, les choix que nous devions d’ores et déjà opérer dans l’actualité pour les sujets principaux des journaux et des autres émissions de la journée. Doté d’un système d’informations très opérationnel, il me décrit, par le menu détail, ce que l’agenda de la journée contient d’événements et de rencontres justifiables de faire l’objet d’un traitement. Je mesure d’emblée que la question de la hiérarchisation de l’information n’est pas simple. Après échanges avec l’équipe, il est convenu de retenir 4 à 5 sujets. J’ai milité pour le choix de 2 d’entre eux. Celui relatif aux annonces du Gouvernement en matière de stages pour les jeunes, car j’y trouvais une illustration parfaite de la frénésie communicante des pouvoirs publics qui engendre ensuite la prolifération normative excessive si néfaste pour l’économie et l’emploi. Le second sujet concernait la retraite de Zidane. Pour l’avoir rencontré longuement en quasi tête à tête, et m’intéresser au football, je sais combien l’homme est exceptionnel. Et l’annonce de sa décision de mettre un terme à sa carrière est un événement auquel chaque Français sera sensible, j’en suis sûr, il est donc parfaitement légitime que nous en parlions. Je regrette de ne pas avoir suggéré de demander à mon ami alençonnais Stéphane Guy de Canal + qui a réalisé l’ITW exclusive de Zinédine de venir nous en parler.
Puis vient, à l’antenne, le moment d’expliquer aux téléspectateurs les raisons de ma présence. C’est Sylvain Attal qui s’en charge. Afin de conserver la plus grande spontanéité, nous n’évoquons pas les questions qu’il me posera. Or, il a lu mon Blog le matin et m’interroge sur la CGT sur laquelle j’ai posté un billet. J’avoue être involontairement passé à côté de sa question, n’ayant pas vu le lien entre les deux. Je souligne simplement mon souhait de voir ce syndicat accepter de participer à l’oeuvre si urgente de modernisation de notre économie. Et donc de notre droit du travail.
Avant l’ITW suivante, nous partageons un café à la buvette du Sénat qui nous permet de saluer les amis qui passent. Madame Canto-Perber, nouvelle présidente de l’Ecole Normale Supérieure, est de passage. Elle était l’invitée de Jean-Pierre Elkabbach le matin même sur Europe 1. Je la salue. Dans les 30 secondes, elle m’explique qu’il lui faut des moyens supplémentaires. Je me dis qu’elle a déjà été prise en main par le système. Je ne suis pas assez familier pour lui suggérer qu’elle ne changera rien si elle ne va pas immédiatement dans le privé chercher les compétences de gestion nécessaire. La pauvre, et – j’ai la plus grande admiration pour elle, – si elle savait combien je la crois menacée d’inertie, si elle reste dans le conventionnel.
Puis arrive le moment de l’émission où je dois jouer le « journaliste », sous la clémente protection de Sylvain Attal. J’ai invité mon ami Loïc le Meur, la star de la Blogosphère. Je crois à l’importance des Blogs dans la modernisation de la communication politique et Loïc est un excellent pédagogue, « un bon client » comme on dit à la télé. Il est passé superbement et je constate immédiatement que mes copains, les vrais journalistes, l’ont déjà « reniflé » comme un « client » à ne pas perdre de vue. Vous pouvez regarder le Podcast de l’émission.
Puis vient l’heure de la grande Conférence de rédaction ou le « big boss » préside en personne : Jean Pierre Elkabbach. La salle est pleine à craquer. L’échange est libre. Chacun s’exprime sans formalisme. Jean-Pierre anime plus qu’il ne commande. Tout en finesse. J’ai bien aimé ce moment car je mesure mieux l’espace qui sépare les obligations des journalistes de celles des politiques. Ils doivent braquer des milliers de watts sur l’actualité de l’instant. Le politique, le vrai, droit pousser lui l’horizon le plus loin qu’il peut pour défricher des pistes d’avenir. Il est souvent seul, sans lumière.
Il est déjà 13h15. J’avale bien vite un sandwich à la buvette car je dois partir à 13h30 rencontrer des hauts fonctionnaires du ministère de la défense pour échanger avec eux sur la LOLF. Ces rencontres sont précieuses, elles nouent un contact direct entre ceux qui doivent appliquer la loi et celui ou ceux qui l’ont votée. Beaucoup de malentendus ou d’incompréhensions sont levées.
Je reviens pour 16h, car Didier Migaud me rejoint au Sénat, avec nos équipiers respectifs, pour préparer la nouvelle mission que vient de nous confier le gouvernement sur la mise en oeuvre de la LOLF.
Il est déjà 17h30, je dois retourner à Public Sénat, pour visionner les sujets du journal de 18h. Philippe me reprend en mains avec souplesse mais efficacité. En professionnel, à l’oeil sûr, il préconise une infographie sur un sujet qu’il pressent comme complexe. Pendant le journal, je mesure combien son idée était utile. Je suis admiratif aussi pour le jeune journaliste qui a fait les modifications aussi rapidement.
J’assiste de la salle technique (cela s’appelle autrement, c’est une vraie cabine de pilotage) au journal, c’est tout un art. On devrait réaliser une émission pour nous montrer comment cela marche.
Puis il faut courir au maquillage pour participer à 18h30 comme « journaliste » au Face à la Presse » animé par Michel Grossiord. Nous accueillerons successivement deux personnalités hautes en couleur : Philippe de Villiers et Jean-Luc Mélanchon. Je m’inquiète un peu, à vrai dire, de mon positionnement. Si je suis réputé journaliste pour le moment de l’émission, je n’en suis pas moins politique et je ne veux naturellement pas ni servir la soupe au premier, ni cogner sur le second. Je me dois donc de les interroger sur les prérogatives des grands élus qu’ils sont l’un et l’autre au regard de ce sujet difficile qu’est l’immigration. A l’issue, je sors très intéressé par l’expérience car je l’ai vécue plusieurs fois comme invité, mais jamais dans la position d’observateur. Je suis sincèrement épaté par le poids qui pèse sur les épaules de Michel. Il doit aller au charbon et il y va, avec des arguments solidement préparés. Rien n’est laissé au hasard. Puis, naturellement je regarde ces animaux politiques que sont nos deux invités, l’un et l’autre sortent de l’ordinaire. Ce sont de vrais professionnels chacun dans son art. En les observant, je me dis que j’ai encore beaucoup à apprendre. Aussi différents qu’ils soient, je les connais bien l’un et l’autre, en dehors de la politique, j’ai beaucoup d’estime pour eux. Pour tout vous dire de l’amitié au risque d’irriter ceux, parfois nombreux, qui les détestent.
Il est déjà 19h20, je dois courir bien vite au démaquillage, comme un voleur, sans saluer personne, au mépris de la plus élémentaire délicatesse à l’égard de tous ceux qui m’ont si chaleureusement accueilli toute la journée.
Je cours. Ce soir, nous avons un dîner. Catherine, mon épouse, est un exemple de patience, elle m’attend depuis 35 ans que nous sommes mariés. Encore faut-il ne pas lui laisser porter seule l’intégralité de notre vie de famille.
Nous rentrons vers minuit. Avant de commencer la préparation de celle du lendemain, je lui raconte ma journée bien remplie. Elle a été pour moi une découverte formidable. Philippe, Sylvain, Michel, Pierre-Henri, Emmanuel et les autres, merci pour tout, merci à Karine pour les enregistrements, vous avez été formidables. Bravo, vous êtes des pros et vous faites un excellent travail. Jean-Pierre, tu as vraiment une bonne équipe.