Ce deuxième billet consacré aux responsables de programme aborde cette thématique sous l’angle de la responsabilité. Derrière ce titre quelque peu provocateur, je voudrais aborder la question de la responsabilité des RPROG devant le Parlement telle que l’envisage la DRB… Les responsables de programme, au centre de la logique de performance, sont, dans le système envisagé, soumis à une double responsabilité : devant le ministre dans le cadre de la responsabilité dite « managériale » et devant le Parlement… Or, ce système apparaît quelque peu déséquilibré et d’autres solutions doivent, à mon sens, être envisagées…

La responsabilité du RPROG devant le ministre est tout à fait indiquée même si on peut regretter l’absence de définition claire et précise du système de responsabilité « managarériale » et le fait que cette dernière semble occulter la nécessité d’adapter le système de responsabilité financière aux nouveaux enjeux de la LOLF (mais c’est un autre sujet).

En revanche, on peut se montrer plus critique sur la responsabilité des RPROG devant le Parlement, celui-ci n’ayant aucun moyen d’action à leur encontre (sauf à exiger qu’on les « démissionne » ou que le ministre mette en oeuvre la responsabilité « managériale »). En somme, la responsabilité du RPROG se limiterait, devant le Parlement, à une simple obligation de rendre compte… De plus, le système risque de se bloquer dès lors que le RPROG auditionné justifiera les écarts constatés concernant les objectifs à atteindre par des directives ministérielles ou des mesures de régulation budgétaire… Plus simplement, mettre en avant cette responsabilité, c’est surtout masquer la responsabilité politique du ministre.

Une distinction a été posée au Canada concernant la responsabilité des ministres et celles des sous-ministres (dont les fonctions sont, sinon équivalentes, assez proches de celles des RPROG) : Au Canada, seuls les ministres ont une « obligation de rendre compte » (c’est-à-dire une responsabilité) devant le Parlement, les sous-ministres n’ayant qu’une simple « obligation de s’expliquer » (qui exclut la responsabilité) afin « d’assister la responsabilité individuelle du ministre ». Ainsi, si le sous-ministre à l’obligation d’éclairer le Parlement sur la gestion du programme, c’est bien le ministre qui endosse la responsabilité politique de la gestion du programme… Cette distinction est essentielle même s’il faut concéder qu’elle pose quelques difficultés d’application…

Rapport du Comité permanent des comptes publics : « La gouvernance dans la fonction publique du Canada : obligation ministérielle et sous-ministérielle de rendre des comptes ».

Pour conclure, si les responsables de programme doivent être entendus devant les Commissions des Finances, ils ne sauraient être responsables devant elles… Reste qu’un tel système, assez logique, repose néanmoins sur le postulat d’un ministre responsable devant le Parlement… Or, face aux limites de cette responsabilité politique (pas de culture de la démission comme dans les pays anglo-saxons et ineffectivité des mécanismes juridiques), il faut soit se résigner à une responsabilité des RPROG qui serviront alors de « fusibles », soit envisager d’autres solutions tels un changement culturel (la culture de la démission) ou l’apparition d’un mécanisme de responsabilité individuelle des ministres…

Catteau Damien, Université de Lille 2, Laboratoire du GERAP-GREEF.

NB : Le titre de ce billet est un hommage à mes professeurs Michel Lascombe et Xavier Vandendriessche, auteurs de nombreux « Plaidoyer pour… » et dont les travaux ont toujours constitué pour moi un modèle et une véritable source d’inspiration.