La lecture de la thèse d’Amicie Maucour-Isabelle * sur ce sujet nous rappelle que cette rénovation était impensable il y a encore quelques années, tant l’affaiblissement du rôle des Assemblées paraissait inéluctable. Cet ouvrage pose une vraie question centrale : oui ou non le Parlement est-il prêt à saisir la nouvelle chance qu’il s’est offerte d’un rééquilibrage des pouvoirs budgétaires entre Gouvernement et Parlement ?

Voici quelques paragraphes par extraits de sa conclusion générale :

« En s’engageant résolument et au moment opportun dans la voie du renforcement des pouvoirs de ses assemblées en matière budgétaire, la Ve République vit aujourd’hui une étape fondamentale de son histoire, qui doit être comprise comme le signe de sa maturité. L’occasion est peut-être la bonne de renvoyer une fois pour toutes aux vestiges de l’histoire les propos d’Edgar Faure sur la litanie, liturgie et léthargie du débat budgétaire. »

« Finalement, la question pressante est celle qui consiste à se demander si les parlementaires seront disposés à assumer pleinement les nouvelles responsabilités que la loi organique du 1er août 2001 leur assigne désormais en matière budgétaire. À ce propos, l’augmentation des pouvoirs parlementaires ne passe-t-elle pas par la reconnaissance de droits accrus à l’opposition ? Comme en Grande-Bretagne ? Car il semble bien que la démocratie s’enrichisse du conflit entre la majorité et l’opposition. « L’opposition », écrivait Georges Burdeau « n’est pas une force simplement négative, poids mort qui gênerait l’action gouvernementale. Si, par hypothèse, elle n’est point partie au gouvernement, elle forme avec la majorité ce qu’en mécanique on appelle le couple. C’est de leur relation que naît l’énergie politique ».

« Alors, simple coup de pinceau pour rafraîchir la façade ou véritable reconstruction des pouvoirs du Parlement et nouveau socle pour moderniser l’État ? Il est clair que la loi organique du 1er août 2001 est susceptible d’avoir de grandes incidences sur la réforme de l’État. En appelant chaque ministère à repenser à son action par objectifs et par programmes et à y adapter ses moyens budgétaires, elle dispose d’une capacité incontestable à conduire à une réforme en profondeur des structures. Encore faut-il qu’elle soit bien interprétée par l’ensemble des acteurs concernés comme un moyen de repenser les politiques publiques. S’il s’avère à l’usage qu’avec la nouvelle constitution budgétaire, il ne s’opère qu’un simple rééquilibrage du curseur entre efficacité budgétaire et démocratie financière, alors il y aura fort à parier que ni la vie du citoyen-contribuable ni son rapport aux institutions n’en seront transformés. Mais si avec elle, la France s’engage dans une véritable réforme de l’État et de son administration, alors la rénovation des pouvoirs financiers du Parlement sous la Ve République restera gravée dans l’histoire comme une étape décisive de la modernisation de notre pays. »

 

Amicie Maucour-Isabelle – Docteur en droit. – Thèse pour le doctorat en droit de Paris I Panthéon-Sorbonne.
Soutenue le 8 septembre 2003 et honoré du prix de thèse 200 4 de la Fondation Jacques Descours-Desacres. Chez Dalloz.