La LOLF, notre nouvelle « constitution financière », va entrer dans notre quotidien à compter du 1er janvier prochain (2006).
Elle est totalement inconnue du grand public. Or il s’agit d’une véritable « révolution copernicienne » qui va changer en profondeur le fonctionnement de l’État, c’est pour nos administrations un bouleversement aussi important que celui que nous avons connu, nous les citoyens, lors du passage à l’euro ! Ce n’est pas une réforme de plus, mais un nouveau départ pour l’État.
Qu’est-ce que cette LOLF va changer ?
Pour les ministres : Désormais, ils ne pourront plus se contenter de promettre aux Français qu’ils vont faire mieux, au seul motif qu’ils vont leur coûter plus cher ! Au contraire, ils vont devoir expliquer, en « langage citoyen », comment va être utilisé chaque euro dépensé, quels sont les objectifs qu’ils arrêtent pour répondre aux besoins de la population et les résultats qu’ils se fixent pour améliorer leur efficacité. Il ne sera plus possible d’« empiler » les réformes sans présenter les résultats obtenus au fur et à mesure.
(par exemple : pour la justice, il ne s’agira plus de demander des millions d’euros et des emplois supplémentaires, dans le cadre d’une loi de programmation ; il s’agira de définir ce qu’est un système judiciaire performant, notamment en termes de délais de jugement, de qualité des décisions rendues, d’efficacité dans l’organisation des services et quelles sont les priorités. etc.)
Pour les administrations : l’obligation de justifier, dès le premier euro, leurs besoins en crédits, alors qu’aujourd’hui, grâce aux « services votés », elles sont assurées de recevoir 94% des crédits de l’année précédente. Elles vont aussi devoir se mettre en ordre de bataille pour atteindre les objectifs fixés par leurs ministres. Elles devront expliquer leur méthode de travail et éclairer le Parlement et les Français sur leurs coûts et leurs résultats. Le pari de la réforme est bien de faire confiance aux personnes qui, dans les bureaux parisiens ou au plus près du terrain, gèrent l’argent public : elles vont bénéficier de plus de liberté et plus de souplesse dans l’utilisation de leurs moyens, elles devront mettre l’accent sur l’efficacité et l’utilité de la dépense et ne pas se contenter de dépenser dans le respect des règles ; elles seront responsables de leur gestion, ce qui veut dire qu’elles devront rendre compte de leurs choix et justifier de leurs actions.
(par exemple : pour les formations en alternance, quel est le pourcentage des apprentis qui trouvent un emploi à l’issue de leur formation ? pour la politique de lutte contre le chômage : quelle action ouvre le mieux l’accès à l’emploi ? avec quel taux de succès ? pour quel coût par emploi trouvé? Au lieu de multiplier les dispositifs de retour à l’emploi, ne faut-il se limiter à quelques-uns et concentrer l’effort sur eux ?)
Pour le Parlement : au lieu de débattre à l’infini chaque année, sur seulement 6% des crédits, il va pouvoir juger si les objectifs poursuivis répondent correctement aux attentes des Français, apprécier, dès le premier euro, si les moyens demandés peuvent financer les ambitions affichées, et observer, grâce aux indicateurs de performance, si les résultats promis ont effectivement été atteints. Il devra donc, comme le font d’autres Parlements, moins se focaliser sur le détail du budget de chaque ministère et plus sur la manière dont sont effectivement utilisés les fonds publics.
Les parlementaires devront, pour leur part, exercer avec plus de détermination leurs pouvoirs dans la procédure budgétaire et le contrôle, pouvoirs qui sont dès aujourd’hui importants mais qui ont été renforcés par la LOLF. Ils auront aussi plus d’éléments pour proposer les réformes susceptibles d’améliorer le fonctionnement de l’État et des services publics.
Et pour les citoyens : la LOLF permettra de mieux connaître ce que l’Etat fait pour eux et combien il leur coûte pour chacune des missions qu’il remplit ! Le bienfait de la LOLF est la transparence !
Lorsqu’une personne achète un produit ou un service dans le privé, elle en connaît exactement le prix puisqu’elle le paie ! Elle peut aussi comparer prix et qualité, pour le même produit ou le même service, chez le commerçant d’en face.
La personne qui utilise un service rendu par l’Etat doit pouvoir en connaître le prix dans les mêmes conditions, qu’elle le paie d’ailleurs en tout ou en partie. Selon la nature du service, elle en paiera une partie comme usager et une partie comme contribuable. C’est le cas par exemple du transport. Il sera instructif pour le citoyen et pour le voyageur de connaître le prix réel de son déplacement, la fraction payée par lui, celle payée par le contribuable.
Grâce à la LOLF, chaque citoyen pourra désormais connaître le coût réel du service qui lui est rendu par l’État, et examiner si le rapport qualité/prix de ce service est bon pour les Français. Le but n’est pas de stigmatiser ou de culpabiliser qui que ce soit mais, au contraire, de faire toute la transparence, sur la base de critères objectifs portant sur les résultats et les coûts.
De même, il sera possible de comparer nos coûts et la qualité de nos services avec ceux de nos voisins et partenaires, allemands, belges, italiens, espagnols ou anglais. Nos administrations pourront d’ailleurs comparer et échanger leurs savoir faire pour mesurer les progrès qu’elles accomplissent afin d’améliorer sans relâche le rapport qualité/prix au bénéfice de nos compatriotes.
Par exemple, il sera intéressant de comprendre pourquoi, en France, un élève du secondaire coûte plus cher qu’un étudiant de l’enseignement supérieur.
La LOLF, c’est l’instrument de la transparence et de la vérité sur les buts, les modalités et les coûts de l’action publique conduite par l’État. Elle est la clé de la modernisation de la gestion publique.
Ce sera une source de ré enchantement et de stimulation pour nos administrations dont l’action sera mieux connue des Français. Ce sera également passionnant pour les parlementaires qui pourront descendre dans les « ateliers de fabrication » des services rendus, auditer les méthodes de travail et d’organisation et comparer les coûts et, bien sûr, s’interroger sur les stratégies poursuivies par l’État.
La LOLF est de ce point de vue, en effet, une vraie révolution. Les ministres demandaient toujours plus d’argent, sans jamais informer les Français sur les objectifs qu’ils se fixaient, sur les résultats qu’ils obtenaient et sur le coût réel de leur action. Au fond, le « bon » ministre était surtout celui qui dépensait davantage en faisant croire qu’il ferait mieux et plus. Hélas, au bout de 40 ans, la vérité oblige à dire que les dépenses supplémentaires n’ont pas toujours été accompagnées par une amélioration du service rendu aux Français.
Être ministre sera désormais beaucoup plus exigeant qu’aujourd’hui …
Voir aussi le site du MINEFI : http://www.minefi.gouv.fr/lolf/index1.html
Puisse ce travail considérable être bien utilisé. Ce qui me trouble ce ne sont pas tant les lois que les textes rédigés ensuite pour leur application…
Il est loin le temps des rédacteurs du Code civil qui en une phrase énoncent une règle, résument un principe tel que "Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer"
Mais oui ce qui ce conçoit bien…..
Mais je crois en votre veille….
l’exemple sur la Justice me plait bien !! Peut etre arrivera t on a faire comprendre le fonctionnement interne de ces administrations au grand public qui découvrira des solutions toutes simples à des soit disant graves problèmes. Je pense notamment à la demande de création de poste de magistrats qui coutent si cher, alors qu’il suffit de se demander combien de jours de congés peut prendre un magistrat dans ce pays! La réponse 47 ! Mais pourtant 5 semaines de congés payés, ca fait moins! Et oui ! le doubles des autres! 9 semaines et demies ! j’ai bien dit peut-être !
Préparer l’avenir en organisant : Très bien.
Mais il faut impérativement :INFORMER LES FRANCAIS LES FORMER AUX REALITES ECONOMIQUES ET FINANCIERES A COMMENCER PAR LES HOMMES POLITIQUES pour qu’ils puissent comprendre ce qui se passe à tous les niveaux de la vie politique : National, régional,départemental…Budget de la sécu (qui paie, qui touche…..)
Pouvez-vous demander aux candidats et aux responsables de réciter tous les jours l’exhortation d’A. Lincoln :" Vous ne pouvez pas…."mais cela n’est pas de la démagogie c’est considerer les citoyens en tant qu’hommes responsables.
Voudriez-vous décoder le sigle LOLF pour les Béotiens (nes) ?
Loi d’Orientation ……. France (…)
Les Français vont confondre avec le "Loft" ! A en juger par le succès de ce dernier, la confusion présenterait un intérêt national…
Il faut étendre la LOLF à tous les niveaux de gestion publique de ce pays, pas seulement à l’Etat, mais aussi aux collectivités locales et territoriales.
Elle doit être adaptée puis appliquée par l’ensemble des collectivités locales, tout en respectant leurs grandes diversités et compétences.
Si cela n’est pas fait, il y aura la France d’en haut avec la LOLF et la France d’en bas, sans LOLF.
Moderne en haut et vieillote en bas ? Il est vrai que les collectivités locales sont plutôt, et heureusement, en avance sur ce plan-là, la proximité du citoyen et la sanction aux élections y est certainement pour beaucoup.
Mais beaucoup de progrès restent à faire.
Alors, bannissons l’action politique, la gestion publique et citoyenne à deux niveaux : il faut porter la LOLF dans nos villes, nos campagnes, nos départements, nos régions et l’exporter en Europe. Il faut porter la LOLF au coeur de chaque citoyen, la vulgariser et la faire comprendre pour qu’il soit en état de connaître et d’apprécier les résultats et de demander des comptes. Ce n’est plus une affaire d’initiés, l’action politique et les missions de nos fonctionnaires ont tout à y gagner. Les ministres et l’appareil d’état ne sont pas les seuls concernés, nos élus locaux le sont aussi.
Je trouve votre rapport très prudent sur ce sujet, vous qui êtes pourtant proche de la vie locale. Pourquoi ?