Numérique : Gutenberg des temps modernes

Numérique : Gutenberg des temps modernes

À la naissance de l’écriture, comme à celle de l’imprimerie, la ques- tion de la profanation du réel s’est posée. L’inscription de signes peu déchiffrables sur un support incertain ne risquait-elle pas de déformer la vérité, souiller la preuve ? Deux millénaires plus tard, le débat n’a toujours pas trouvé d’issue : il n’en existe pas en réalité, sauf à renoncer à l’évolution des sciences et des techniques.

La généralisation du numérique est le dernier avatar de cette controverse millénaire. Elle rallume les éternelles querelles entre les anciens et les mo- dernes. Elle réveille de nouvelles chimères en définissant le virtuel comme un état de simple éventualité, ou pire comme un procédé de manipulation.

Or, étymologiquement, est virtuel ce qui a la vertu du réel : c’est bien de cela que le numérique nous enrichit. Il constitue un nouvel instrument d’écriture qui multiplie presque à l’infini les outils de représentation. Leur interconnexion enrichira notre connaissance et donc notre compréhension du réel et démultipliera notre capacité à en attester l’authenticité.

Certaines craintes sont certes légitimes. Comme la déshumanisation de l’acte juridique par exemple, mais elle sera conjurée tant que l’instrumen- taire restera une personne physique et non des algorithmes, ainsi qu’en rêvent les plus fervents promoteurs de la blockchain. Ou comme la perte des symboles, d’où la nécessité qu’ils soient conservés soigneusement et transposés inchangés dans l’univers numérique, afin qu’une signature reste graphique et qu’un sceau ne soit plus abaissé au rang de carte à puce. Quant à la peur des risques de falsification, elle demeure infondée : ce sont précisé- ment l’éthique et la déontologie de l’officier public qui les conjurent, quelles que soient les techniques.

Dès lors, considérons la révolution du numérique comme un simple Guten- berg des temps modernes. Elle commandera simplement d’avoir d’autant plus « de conseillers désintéressés, de rédacteurs impartiaux, de juges vo- lontaires » que sont les notaires.

 

Éditorial issu de Defrénois – N°38 – 16 septembre 2021 – P.1. 

 
Par |2023-02-23T15:10:30+01:0023 février 2023|Notariat, Numérique|0 commentaire

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