La gouvernance des Organisations complexes – (privées ou publiques) c’est à dire les ensembles constitués d’un grand nombre d’entités en interaction, – m’a toujours passionné. C’est probablement le fruit de mon seul vrai bilinguisme : le droit et les comptes !

Le temps

La ressource la plus précieuse de toutes est le temps !

Oui, pour le dirigeant, le temps est bien le bien le plus précieux. Il sait d’intuition qu’il est une ressource non renouvelable. Qui s’épuise si vite qu’elle en devient obsessionnelle. Pourtant, souvent, il la gaspille en s’agitant à contretemps, alimentant ainsi son propre Léviathan, s’auto paralysant tout le temps.

Diriger, c’est choisir

Diriger, gouverner, c’est choisir ! Chercher à éviter cette définition, c’est commencer à renoncer.

Or, pour bien choisir, au bon moment, il faut du temps. La réactivité et l’adaptabilité sont le challenge permanent. Face à un environnement incertain, en permanence en mouvement, le tireur en chef ne doit pas perdre de vue sa cible.

Incarner

Dans notre monde d’hyper communication, le dirigeant doit d’abord incarner son organisation. Ses valeurs. Sa vision du présent et du futur, son ambition, la solidité de son modèle, son unité, sa capacité à répondre aux défis qui lui sont lancés, sa cohésion, sa force. Ne pas maitriser son temps, laisser apparaître la moindre fébrilité, affaiblit plus que le dirigeant, mais l’organisation toute entière.

S’entourer

Personne n’ayant encore révélé son don d’ubiquité qui reste le privilège des Dieux, le boss doit donc savoir s’entourer des meilleurs. Les attirer. Les enthousiasmer. Les rendre fiers d’appartenir à son équipe. Libérer leur parole. Laisser chaque génération s’exprimer. Offrir une dynamique propre, un but, une cause justifiant un dépassement. Recueillir les avis les meilleurs pour décider en dernier ressort des questions essentielles rassure. Faire donc en sorte que cela se sache.

L’autorité

Consulter avant de décider renforce aussi l’autorité. Celle-ci sera d’autant plus affirmée qu’en écoutant, consultant beaucoup, sans jamais répondre ni arbitrer trop spontanément, elle sera entourée du mystère nécessaire. Toute organisation a besoin à sa tête d’une personnalité qui incarne l’autorité. C’est rassurant pour toutes les équipes.

L’indépendance

Le dirigeant bien entouré doit cependant veiller à ne pas dépendre de ceux qui le servent. Garder son indépendance vis-à-vis de tous. Chasser les supposées éminences grises. Plus vite encore les favoris ou courtisans. Se méfier de la flatterie plus que de toute autre douceur.

Partager l’exécution

Le vrai dirigeant doit non seulement partager l’exécution, mais éviter de s’y immiscer. L’exécution ainsi déléguée réunit l’autorité en la sienne seule. Une grande organisation dispose des moyens humains et matériels pour atteindre les objectifs qu’elle s’est fixée. Dès lors, le dirigeant doit veiller à n’avoir d’autre tâche que choisir, décider. Pour ce faire, conserver l’esprit clair et frais pour arrêter les grandes orientations proposées, anticiper celles manquantes, et saupoudrer de ses propres épices quelques microdécisions dont le sens pénétrera jusqu’au plus bas de l’échelle de management.

Croire en l’intuition

Comment prendre les meilleures ou les moins mauvaises décisions ? Faut-il faire confiance à l’analyse rationnelle, celle des bureaux, ou à l’intuition ? Un peu des deux. La première est indispensable, mais elle ne vaut que par la validation de l’intelligence cognitive. Les décisions s’adressent aux humains donc à des quadrupèdes doués d’émotions. Ne pas prendre dans la décision ces émotions en compte conduit à se mettre en danger. L’intuition va plus loin que la somme des savoirs, elle cristallise, elle précipite chimiquement les émotions des autres et permet ainsi de les anticiper et de les fidéliser.

S’épargner les pièges classiques

La complexité de l’environnement du dirigeant doit l’inciter à éviter de perdre son temps à chercher la solution magique. Appliquer spontanément, sans réflexion, un ordre hiérarchique manifestement erroné. Céder à la tentation du statuquo qui ne règle rien mais qui n’engage à rien. Habiller de prudence une pusillanimité justifiant l’inertie de tous les allergiques à la responsabilité. Continuer à creuser une impasse sans aucune chance de déboucher. S’arcbouter sur une position mal étudiée.

Assumer

Reconnaissons que décider commande du courage. Le courage de savoir trancher, de reconnaître ses lacunes, de jouer collectif pour maitriser tous ensemble nos émotions et rester solidaires quoiqu’il arrive.

La clé : l’assitant(e)

Renonçant définitivement à quête du don d’ubiquité la seule vraie réponse de l’élargissement du temps du dirigeant est celle de l’assistant ou de l’assistante. Cette personne est la clé du succès ou de son échec. Bien qu’elle soit supposée ne pas exister, elle est notre double. Elle nous connait. Elle sait tout de nous et de ceux qui nous approchent. Elle observe notre mission sous un autre angle. Elle complète notre vision, sans la corriger ni la détourner. Elle « l’augmente » comme la réalité augmentée. Son choix, celui de son adjoint ou son adjointe sont tout autant essentiels.

Savoir lâcher prise

Piloter une grande organisation n’oblige pas à une présence permanente. Une aliénation à des horaires déments. Simplement une autorité sécurisante, réputée apte à concilier décisions stratégiques subtiles et connaissance fine du terrain. La surcharge de l’agenda ne sert qu’à rassurer le manager qui se déculpabilise en s’abandonnant totalement à l’organisation. Au risque de se noyer et d’entrainer le naufrage de l’ensemble.

Promouvoir son entourage

Apprendre à rester visible comme figure tutélaire suppose de savoir mettre en avant ceux qui font, ceux qui délivrent, ceux qui répondent précisément aux innombrables sollicitations. Au risque de surprendre, la santé et l’hygiène de vie pourraient compter autant que l’intelligence, si celle-ci n’était pas si corrélée dans notre Pays aux diplômes et aux concours.

La santé

Oui, les tâches du dirigeant sont épuisantes. Veiller à son repos et à sa santé est un devoir. La fatigue et la maladie sont aussi fatales aux hauts responsables que l’absence de génie.

Se fixer une raison d’Etat

Le dirigeant d’une grande Organisation dont dépend l’intérêt général doit s’imprégner de ce que l’on appelle communément « la raison d’Etat ». Cette sublime intuition qui n’est accessible qu’aux esprits forts, capables d’enjamber le temps, l’espace et de dominer ses sentiments. Ne jamais se laisser détourner des desseins que dicte sa « raison d’Etat ». Résister à la crainte, l’étonnement ou la terreur. Maitriser ses emportements tant contre ses adversaires que ses tendresses excessives pour ceux qu’il aime.

 

Oui, les dirigeants consacrent trois quart de leur temps à des tâches qui ne sont pas de leur niveau. C’est en conjurant cette faiblesse que nous réussirons la nécessaire et urgente transmission entre les générations et l’optimisation de notre capital le plus précieux : l’humain !