L’apport des civilisations aura presque toujours été la culture et la prospérité. Une fois un certain niveau de développement atteint, elles se gâtent et déclinent. En cela, elles ressemblent aux êtres humains dont elles sont le produit.
Avec l’élection de Donald Trump, assiste-t-on à « la chute de l’empire américain » ? Et donc d’une certaine forme de civilisation occidentale ? Comme l’annonçait un célèbre film franco-québécois, il y a déjà 30 ans. Il ne faut certes pas précipiter notre analyse. Cependant, soyons conscients que nous sommes face à un séisme, à interpréter comme un dernier avertissement avant l’accident démocratique. Nous dansions joyeusement au bord du gouffre, sans bien nous rendre compte que notre démocratie représentative était malade. Désormais nous sommes prévenus.
Note civilisation, comme toutes, recèle de nombreuses choses critiquables, mais elle a cependant produit de nombreux fruits. Il serait dommage de les voir anéantis en une seule génération. Son premier péché est de s’être crue éternellement supérieure aux autres. Alors que toutes sont vulnérables, à l’image des humains dont elles sont le portrait. Leur évolution passe généralement par trois stades : l’avènement, l’apogée et le déclin. Nous avons dépassé depuis longtemps le stade de l’avènement. Personne n’oserait prétendre que nous traversons l’apogée. Alors gardon-nous de ne pas nous précipiter vers le déclin.
Il est vrai que le thème du déclin de l’Occident n’est pas nouveau. Il s’agit d’un thème récurrent, qu’on ne cesse de comparer à la chute de l’Empire romain. Mais ce n’était jusqu’alors qu’une hypothèse, une parole en l’air. N’est-elle pas en train de devenir réalité ? Une disqualification aussi fracassante du politique en est un symptôme inquiétant.
Nos contemporains sont déboussolés. La politique traditionnelle a perdu à leurs yeux sa crédibilité d’organisatrice irremplaçable du système démocratique. Ils sont à la recherche d’une autre voie, plus franche, plus vraie, plus proche. Plus nous avançons dans la marche du temps et du monde, plus les « centres de décision » trop concentrés perdent le contact et la confiance avec le périphérique. Les dirigeants politiques ne se rendent compte de rien, ils poursuivent leur marche aveugle, guidés par leurs administrations, vers de grands ensembles, de grandes concentrations. Pourtant, on le constate en tous domaines, nos concitoyens veulent savoir comment et qui produit ce qu’ils mangent, ce qu’on enseigne à leurs enfants à l’école, qui assure leur sécurité, qui décide de leur futur, les politiques ou la technocratie ? Ils veulent de la proximité, de l’authenticité. Ils sont fatigués ou ne croient plus au modèle politique et économique conçu après-guerre.
Dans son essai « Le Déclin de l’Occident » Oswald Spengler développe une synthèse historique qui résume bien l’évolution cyclique ou « sphérique » de l’Histoire. Chaque culture est déterminée par son héritage, ses valeurs, mais aussi par sa capacité à vouloir un destin.
Croire à son destin, vouloir un destin, le construire, en avons-nous encore envie ? Nous pensons-nous encore concernés ? Avons-nous même conscience qu’il nous revient de nous y consacrer nous-même ? Chacun ! Et pas seulement les autres !
N’est-ce-pas la première cause du déclin de l’occident ? Son apathie, sa résignation qui l’ont conduit à consommer l’héritage, en oubliant les valeurs qui l’avaient constitué et la volonté multiséculaire qu’il avait fallu enchainer pour construire le grand destin dont nous sommes les prodigues héritiers.
Pour relever le défi qui nous est lancé, en France et en Europe, nous avons d’abord à nous remettre vite au travail. Nous n’avons aucune chance de conserver la moindre place et la moindre influence, dans le concert du monde, sans accélérer notre rythme de travail. Nous devons révolutionner toutes nos approches, notre droit, notre économie, notre vision du monde. Nous devons nous soumettre aux disciplines de la volonté, du courage et de la lucidité.
C’est à cette condition que nous pourrons reprendre un peu la main, et nous préserver une chance de pouvoir infléchir la politique occidentale et américaine. Celle imprévisible de Trump.
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