Il y a 7 ans, à quelques jours près, je publiais un billet sur les paradis fiscaux intitulé « Les paradis ou les enfers fiscaux ? » L’actualité dite des « Panama Papers », me laisse à penser que les choses n’ont guère progressé.
Nous pouvons nous attendre à des clameurs indignées de gouvernements de tous bords, gonflées de surenchères moralistes à provoquer l’extase de toute la bienpensance professionnelle. Puisque l’on parle de paradis, de quoi s’agit-il ? De paradis « fiscaux » ? « sociaux » ? « législatifs et réglementaires » ? « judiciaires » ? Une variante de ces paradis sont les centres dits « offshore » (par exemple Jersey – Iles Vierges).
Evidemment, en bons citoyens, soulagés de pouvoir enfin démontrer la cupidité sordide de milliardaires voyous, nous n’imaginons pas un instant que les Etats pourraient être les complices de ce genre de « paradis ». Qu’ils en sont eux-mêmes, qu’ils en créent, qu’ils les utilisent voire qu’ils les nourrissent par des attitudes irresponsables.
Savons-nous que le Royaume Uni a fondé une partie de sa prospérité économique sur une industrie financière, souvent localisée dans ce type de territoires ? Que les Etats-Unis ont avec l’Etat du Delaware une plate-forme commode pour certaines opérations. Que la Suisse (même si elle a fait beaucoup de progrès), le Liechtenstein et bien d’autres destinations sont réservées à un tourisme spécifique. Je ne parle pas de la Russie qui, depuis des siècles, a ses propres méthodes.
Quels Etats auront, les premiers, la sincérité de nous révéler la raison sociale, le siège et les actions de sociétés encore détenues par eux dans ces paradis fiscaux ? Même notre sentencieux pays, et sous tous les gouvernements, n’a pas échappé à ces inévitables acrobaties. Parfois bien contre son gré. Il serait intéressant de savoir si cette pratique a cessé et depuis quand ?
Enfin, et sous la pression conjointe des Etats-Unis (curieusement épargnés par la tornade actuelle) et de la Commission Européenne, les pays développés ont tous totalement confondu libéralisation et dérégulation. La libéralisation des activités de marché était inévitable, et sans doute souhaitable, pour sortir de l’économie étatique administrée, en raison de la globalisation des échanges. Mais précisément, cette libéralisation devait s’accompagner d’un appareil de régulation fort, reconnu et respecté. Or que veut dire « régulation » sinon l’affirmation de « l’Autorité publique » sanctifiant les règles de marché, et veillant à leur respect et à leur exécution. On a fait tout le contraire. La simple évocation de « l’Autorité Publique » créait une crise d’urticaire à tout fonctionnaire européen, relevait d’une langue étrangère pour un politicien anglo-américain et suscitait la risée condescendante dans les déjeuners de banquiers. Pourtant, le rétablissement d’un nouvel ordre mondial requiert, non pas le fardeau de l’Etat kafkaïen et bureaucratique, mais le retour de « l’Autorité Publique » régalienne dont aucune force ne saurait contrarier les prérogatives de puissance.
C’est simple. Cela ne coûte rien. Mais cela ne se fait pas. Parce que cela ne peut venir que d’une coalition très large réunissant au moins tous les pays occidentaux, sans exception, et les pays émergents le plus aptes à respecter les engagements nécessaires. C’est à dire sans la Russie et son bloc d’influence ? Ce serait déjà un pas pour sortir l’économie mondiale de l’enfer, à défaut de gagner immédiatement le paradis.
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