Le Gouvernement entretient un discours ambigu sur l’avenir des départements. C’est dommage. Dommage, notamment pour tous les Français, nombreux, qui vivent dans les départements ruraux et qui se trouvent ainsi menacés d’abandon au profit des grandes métropoles, devenues l’alpha et l’oméga de la politique d’aménagement du territoire. L’injuste grief dont on les affuble serait qu’ils couteraient trop cher ! Quelle mauvaise querelle ! Ce ne sont pas les départements qui coutent cher mais les politiques publiques que l’Etat, depuis des années, leur commande de mener, sans les rembourser au niveau promis, comme il en avait été convenu originellement.
Pour avoir participé au premier rang à un acte majeur de réforme de la gestion publique avec la LOLF, je n’apprécie pas les mauvais procès qui sont instruits contre les gestionnaires départementaux placés dans une situation impossible.
Cela étant, toutes controverses entre institutions désespèrent encore davantage nos concitoyens qui n’ont pas besoin de cela, c’est pourquoi je préfère présenter une offre constructive au Gouvernement pour contribuer, à proportion des facultés de mon département, au redressement si nécessaire de nos finances publiques.
Je supplie le Gouvernement, en première priorité, qu’il présente au Parlement, lors de l’examen de la loi de finances pour 2015, dès septembre prochain, une annexe retraçant précisément toutes les dépenses figurant dans les comptes des collectivités territoriales et dont le prescripteur est l’Etat. Il ne s’agit pas d’obtenir une évaluation ultra précise. Un ordre de grandeur suffira pour une 1ère fois. Mais l’exercice sera salutaire, car il permettra, pour la 1ère fois dans l’histoire des finances publiques, de déterminer le périmètre et le montant approximatif des charges dont l’auteur n’est pas celui qui les retrace dans ses comptes !!!
En deuxième priorité, je suggère également au Gouvernement qu’il indique lui-même aux régions et départements qui en feront la demande, le montant exact des économies qu’il leur propose de réaliser pour les trois exercices à venir, année par année. Cette méthode serait tellement plus efficace que cette baisse aveugle et générale des dotations. Les dotations sont un sujet « recettes » alors que le problème est celui des « dépenses ». Engager cette démarche, à la demande des collectivités volontaires, ne saurait être interprété constitutionnellement comme une atteinte au principe de libre administration.
Venons-en à l’exemple Ornais. Il est trop simple, en effet, de raisonner dans l’abstraction, de Paris, en regardant les 40.000 entités publiques locales comme si elles étaient toutes les mêmes. Selon des comptes résumés en annexe du présent billet, nos dépenses sont reclassées en trois catégories : celles « obligatoires et réglementaires » (sur lesquelles l’assemblée départementale n’a strictement aucune prise) pour un montant de plus de 180 millions d’euros, celles « obligatoires et modulables » (sur lesquelles le Conseil général dispose d’une influence infime mais possible) pour un montant d’environ 75 millions d’euros, et enfin celles dites « facultatives » pour un montant d’environ 15 millions d’euros (sur lesquelles l’arrêt du financement est juridiquement possible mais probablement funeste pour l’eau, l’assainissement, l’agriculture, le sport, la culture, le tourisme). Depuis trois ans, nous menons une politique de rationalisation active de nos dépenses. Les dépenses « facultatives », celles résultant de notre propre pouvoir, ont baissé de 3,41 %. Celles « obligatoires et modulables » ont été stabilisées sur 3 ans à une augmentation symbolique de 0,68%. Et enfin, celles « obligatoires et réglementaires », c’est-à-dire celles décidées par l’Etat, d’un coût plus de dix fois supérieur, ont augmenté, elles, de 5,59 % ! Notre masse salariale est stabilisée en valeur depuis 3 ans, malgré le GVT, les hausses des catégories C. Nous aurons baissé toutes les subventions de 10% en deux ans.
Cette analyse démontre que la maitrise des dépenses du Conseil général de l’Orne, comme beaucoup de ses semblables, ne dépend nullement de ses élus départementaux mais des décisions prises par le Gouvernement !
Mon « offre départementale de service » au Gouvernement consiste à lui proposer, sur la base des chiffres sus-indiqués, de me faire part de ses propositions de rationalisation des dépenses afin que je puisse les intégrer dans mon prochain débat d’orientations budgétaires. Les informations qui précèdent démontrent que les « économies » qu’il attend porteront inévitablement à 95% sur les dépenses dont il décide lui-même et dont je ne suis que le délégataire. En bon et loyal serviteur, je ne demande pas mieux de répondre à ses souhaits, encore faut-il qu’il me les exprime clairement.
Qu’on me comprenne bien. Je n’entends, sous aucune forme, freiner le nécessaire redressement des finances de la France. Bien au contraire. Je souhaite simplement mettre de la lumière dans un débat dont l’obscurité devient pesante. On ne peut pas demander de réduire des dépenses à celui qui ne les décide pas !!! L’Etat dispose de tous les pouvoirs et les outils pour le faire. Il lui suffit de décider ! Et de cesser de détourner l’attention des Français en disant que c’est la faute des autres.
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