Alain Lambert a accordé à L’Orne Hebdo, une interview-vérité. Il n’a pas été question que des élections présidentielles, puisque le sujet était sa nomination comme ministre du budget… C’était il y a 10 ans déjà !
Quels souvenirs conserve-t-il de cette expérience? Quels enseignements en retire-t-il ?
En toute franchise, et comme à son habitude, Alain Lambert nous fait partager ses joies, ses espoirs mais aussi ses déceptions. Il raconte les circonstances très particulières de sa nomination, évoque avec plaisir l’équipe qui l’entourait alors, se félicite de la puissance de l’administration au sein de ce ministère à part, qu’est celui de l’Economie et des Finances. Il se réjouit aussi d’avoir pu bénéficier, au cours de ces deux années, d’une vision panoramique de notre pays, d’un état sincère de ses forces et de ses faiblesses. Il a, enfin, été heureux de pouvoir faire avancer et aboutir des projets cruciaux pour l’Orne.
Il est, en revanche, toujours aussi révolté par la complexité du système français et la lenteur du processus de décision. Le co-père de la LOLF dénonce enfin l’énergie gaspillée au vu de la faiblesse des résultats atteints mais aussi les nombreux freins que nous mettons-nous-mêmes à la compétitivité de notre pays.
Comment bâtir l’avenir de la France, alors ? En oeuvrant tous ensemble à la satisfaction de l’intérêt général, en refusant le monopole des égocentrismes, en soutenant le beau risque d’entreprendre, en renonçant à l’assistanat, en créant des formations adaptées aux besoins des entreprises et amenant à l’emploi.
Mais rien n’est possible sans fondamentaux solides et ces fondamentaux, ce sont des finances publiques saines et un retour des plus rapides à l’équilibre budgétaire.
Comment y parvenir ? C’est très simple, notre hôte a déjà mentionné dans son blog une méthode de redressement viable, la stabilisation des dépenses en valeur qui éviterait des coupes aveugles dans le budget de l’Etat et l’introduction d’une règle d’or dans la Constitution mais pas celle du Gouvernement. Lors de la réforme de 2008, il n’avait pas été écouté.
Pour boucler le budget de l’Etat, pourquoi ne pas partir sur des « conventions » de croissance proches de la réalité ? Et si le redressement de la France passait par ces petits gestes simples ? Il est toujours étonnant de voir nos responsables politiques annoncer des pévisions de croissance astronomiques quand l’INSEE ose un 0.5%. Pour pouvoir dépenser l’argent que nous n’avons pas ? Nous réaliserions déjà, mécaniquement, de substantielles économies si nous nous basions sur une croissance nulle ou négative, du moins pour les deux prochains budgets. Nous pourrions alors commencer à combler notre déficit. Quel ménage arrêterait son budget sur une hypothétique augmentation de salaire ou en tenant compte de son autorisation de découvert ?
La réussite de la France est à notre portée, elle doit être notre objectif ! Notre hôte n’a pas dit son dernier mot. Il entend bien continuer à faire entendre sa voix.
Bonjour Monsieur LAMBERT,
Je vous remercie de bien vouloir continuer à faire entendre votre voix. Peut être, pourriez-vous, comme ancien ministre du budget, mettre un terme à ce délit de discrimination envers les contribuables célibataires de France que pratique notre administration fiscale. Souvenez-vous, l’an dernier je vous ai soulevé le problème. Vous avez écrit à Mr BAROIN et il vous a répondu que pour bénéficier de la déduction des frais de double résidence, il fallait résider dans un lieu distinct du domicile habituel. Malheureusement à Mr CAHUZAC, un an plus tôt, il avait répondu, comme Mr WOERTH, dans un lieu distinct de la résidence DES membres de la famille. Le contribuable célibataire était donc exclu. Le drame est qu’il n’a pas fait suivre le message dans l’administration qu’il dirige. Alors la direction départmentale des finances publiques du pas de Calais fait la même bêtise le 30 septembre 2011 en réponse à mon interpellation du préfet de département. Mr RAFFARIN, ancien premier ministre, a examiné mon dossier et a demandé un nouvel examen à Madame PECRESSE. Pourtant le Conseil d’Etat s’est prononcé en refusant notre pourvoi.
Peut être que l’ancien ministre du budget saura m’expliquer pourquoi le fisc,le tribunal administratif de LILLE et la Cour d’appel de DOUAI ont condamné mon fils célibataire par ce que faute de ne pouvoir fixer son domicile prés de son lieu de travail, il l’a fixé chez ses parents ? Ce nouveau domicile est exactement à la même distance du nouveau lieu de travail que l’ancien domicile. Pourquoi condamner mon fils, alors que le fisc, le tribunal administratif de LYON et la Cour d’appel de LYON ont condamné Mr Laurent BLANC,lui aussi célibataire, oui, oui, l’illustre entraineur de notre équipe nationale de football, pour ne pas avoir fixé son domicile chez ses parents ? Il n’avait pas le droit de le fixer en Italie lorsqu’il jouait à NAPLES, selon le fisc et la Justice. Je pensais bêtement sans doute, que la loi était la même pour tous. Comment ne pas rejoindre le clan des indignés !
Il y a un moyen de résoudre toutes nos difficultés budgétaires d’un coup : décidons d’un taux de croissance de 10 % l’an. Ce sera formidable : en 2015, plus de problème et une dette publique en baisse …
Il y’a 10 ans déjà…
Fraîchement nommé, je me souviens avoir été appelé à me rendre dans votre nouveau bureau du 5ème étage de Bercy. Je me souviens, j’étais fébrile et tout en sueur, j’avais une immense appréhension dans la perspective de rencontrer l’un des personnages les plus importants et puissants de France.
Prenant mon courage à deux mains, je prends enfin la décision d’entrer dans votre bureau et je vois ce grand bonhomme, beau et majestueux, entouré de quelques personnels de Bercy et par réflexe acquis pendant mon service militaire en présence d’officiers militaires que j’appréciais, presque inconsciemment, je vous annonce : « Bonjour Monsieur le Ministre, je vous présente mes respects ! ». Presque immédiatement, vous vous approchez de moi le bras tendu et vous me serrez la main en me disant : Enchanté jeune homme ! Quel est votre nom ? »
De ce jour dont je me souviens comme si c’était hier, c’est toute une frange de mes fondations partisanes qui s’est effritée en l’espace de quelques secondes et qui n’a cessé de s’effondrer au cours de l’exercice de mes prérogatives tout au long des deux années où vous avez occupé le poste de Ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
A mon sens, le meilleur Ministre du budget de la Vème république, sans doute le plus sympathique et honorable. Sincèrement, je ne me suis jamais senti aussi proche d’un ministre depuis que je taffe à Bercy.
Jamais vous n’avez été désagréable malgré les fortes pressions qui pesaient sur vos épaules. Vous avez toujours fait preuve d’une attention sincère, d’une gentillesse remarquable, d’une bonté exceptionnelle et d’une générosité incommensurable.
J’adorais travailler à vos côtés et je respectais et appréciais énormément vos conseillers et votre Dir-Cab, M. De Romanet.
A contrario, moi qui ait partagé les cabinets de DSK et Fabius à Bercy avant 2002, je peux vous certifier que l’atmosphère dans les cabinets ministériels de Bercy n’était pas la même et que le respect dû à des citoyens de seconde zone dont je fais partie, m’a incroyablement impressionné sous votre mandature.
Et puis en avril 2004, lors du remaniement ministériel de Raffarin (que je ne peux pas voir en photo une seule seconde), j’ai pleuré, moi qui ne pleure jamais, de vous voir quitter le ministère du budget alors même que vous avez fait un taffe remarquable (ce n’est qu’après que j’ai su que Francis Mer avait réclamé votre tête avant son départ du ministère de l’économie et des finances (sic…).
Depuis, je ne vous ai jamais oublié. Je vous suis très régulièrement. Je vous soutiens systématiquement. Je considère que vous représentez l’homme politique français le plus chouette, le plus noble, le plus courageux et sans doute, le plus humaniste.
Et malgré mes convictions partisanes, si je pouvais voter pour vous, je le ferais les yeux fermés parce que vous représentez incontestablement mon politique français préféré.
Enfin Monsieur le Ministre, comme à la vieille époque, je tiens à vous présenter une fois encore, mes plus sincères respects et à moins de 2 heures du résultat des urnes de la présidentielle de 2012 (dont je connais les résultats grâce aux médias suisses et belges), François Hollande risque d’annoncer une ouverture au centre. Je vous demande de prendre position parce que la France a besoin de vous en cette période particulièrement difficile… Et vous êtes actuellement le meilleur budgétaire de France.
Machu