Les Français s’inquiètent des conséquences de la crise économique, financière et sociale, et craignent pour leur emploi, leur pension, leur minimum vital.
Et que fait le gouvernement, selon vous, durant cette période ? Pensez-vous qu’il veuille rassurer, qu’il cherche des solutions de bon sens, bref, qu’il veuille aller à l’essentiel ?
Vous allez rire, eh bien pas du tout, ce serait même le contraire !
Trois décrets viennent d’être publiés concernant la QUALITE NUTRIONNELLE. Ce, malgré l’avis défavorable unanime du collège d’élus de la CCEN (Commission consultative d’évaluation des normes).
La priorité du gouvernement est d’assurer à la population des denrées d’une « bonne qualité gustative » notamment en obligeant les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux à servir des repas « adaptés aux goûts des résidents ou des patients ».
On pouvait imaginer que ces principes de bon sens fussent aller de soi ou qu’un guide de bonnes pratiques eussent pu les rappeler. C’eût été trop simple, tout cela figure dans trois décrets, de sorte que tout usager d’une cantine pourra, demain, traîner la collectivité organisatrice devant le Tribunal au motif qu’elle ne sert pas une nourriture adaptée à ses goûts. Restaurant 3 étoiles pour tout le monde !
Chaque enfant scolarisé pourra probablement choisir son menu. Je vous laisse imaginer le casse-tête pour les maires des petites communes rurales qui servent des repas de grande qualité composés de produits du terroir. Tout cela sera rangé au placard de
l’histoire. La bureaucratie française l’aura emporté et le gouvernement se sera, une fois de plus, montré incapable de calmer ses ardeurs.
Le plus triste et le plus grave dans cette anecdote qui en dit long sur la dérive normative de notre pauvre Pays, c’est la cause réelle de cette gesticulation. Voyez-vous, il ne s’agit en rien d’améliorer votre vie et votre sort, de vous offrir un service public, performant, adapté à vos besoins. Non, il s’agit, tout, simplement d’augmenter, au 31 janvier 2012, le taux de production de décrets par rapport aux lois. La démarche vise exclusivement à produire des textes en nombre tel que le Gouvernement sera réputé avoir agi.
Pourtant, agir pour un gouvernement sérieux, c’est abroger les textes inutiles, c’est lever tous les handicaps qui freinent l’action publique et créent des dépenses ruineuses sans mieux-être pour les citoyens.
Agir, pour un gouvernement sérieux, c’est refuser d’utiliser la loi ou le règlement pour donner le sentiment qu’on s’occupe des problèmes, alors qu’on en crée tout simplement de nouveaux.
Qui arrêtera cette machine infernale ? Vous les citoyens ! Par votre bulletin de vote ! En mettant dehors tous ceux qui auront utilisé vos suffrages pour dégrader le droit et l’entraver par des textes inutiles, abscons, couteux. Les collectivités locales subissent actuellement UN TEXTE NOUVEAU PAR JOUR ! Jamais notre Pays n’aura connu une telle entreprise de démolition de notre édifice juridique. Et ce n’est pas faute pour moi de ne pas avoir mis en garde : http://tinyurl.com/78a2pm2
En la circonstance, le Premier Ministre n’a pas été à la hauteur ou a été bien mal conseillé.
Bonus : un passage de L’art français de la guerre, d’Alexis Jenni (prix Goncourt 2011), sur le génie français à faire des lois !
nous ne sommes pas du même bord politique, mais je respecte votre positionnement et votre action, comme bien des blogueurs je pense, Mr Lambert. ce billet reflète une position de bon sens qui devrait effectivement prédominer. Et encore, vous ne prenez là qu’une exemple mineur. je vois au travers de mes lectures bien des magistrats, avocats et personnels judiciaires se plaindre de l’accumulation sans précédents de matériel législatif… A tel point qu’ils ne peuvent plus suivre ! il me semble avoir vu quelque part une étude sur le sujet qui démontre que seulement 30 % environ des lois adoptées pendant ce quinquennat sont effectivement appplicables… Dont celles issues du fameux discours de Grenoble… Mais qui s’en soucie, à part une minorité de gens surinformés ? Pourtant, vous avez entièrement raison, cela consitute une atteinte à notre système démocratique.
Absolument d’accord.
Vous avez totalement raison ! La production normative est devenue folle. Le principe de précaution, stupidité inscrite dans notre loi fondamentale, est en train de paralyser la France. Il serait judicieux que la CCEN se penche sur les normes produites en matière d’amiante… L’Etat – pendant 90 ans de 1906 (année au cours de laquelle des médecins commencent à alerter sur le caractère dangereux de l’amiante) à 1996 – a encouragé la production et l’utilisation massive de ce minerai dangereux pour la santé. Depuis son interdiction en France (car sa production et son utilisation se poursuit dans de nombreux pays), pour compenser un laxisme coupable en la matière, l’Etat réglemente à qui mieux mieux. Le secteur du logement est en train de subir les coûts exponentiels que ces normes nouvelles accroissent au quotidien. Bientôt, à ce rythme, il ne sera plus possible d’intervenir sur le bâti produit avant 1996. Peut on se le permettre à l’heure où le mal logement est une préoccupation forte de nos concitoyens ? A t’on bien évalué les risques réellement encourus alors que le laisser faire a régné pendant un siècle ? Quels sont les coûts économiquement et socialement acceptables par la société ? Quelles conséquences de mesures réglementaires nouvelles, où sont les études d’impact ? Avant de réglementer à tout va, ne pourrions pas nous poser sereinement ces questions qui relèvent du simple bon sens qui, il est vrai, a depuis trop longtemps déserté les ministères ?