Il ne faudrait pas que le débat post régional ne se nourrisse que de questions de personnes. La France mérite mieux. En revanche, je pense que nous ne pouvons faire l’économie d’un débat sur les institutions et leur pratique. Oui ou non, en revient-on à l’esprit et à la lettre de notre constitution ? Le Président préside et accomplit son PREMIER devoir qui est de veiller au respect de notre constitution (art 5). C’est le Gouvernement qui détermine et conduit la politique de la Nation (art 20). Le Premier Ministre dirige l’action du gouvernement (art 21). Tous ces principes fondamentaux de notre République ont connu, pour le moins, une pratique « nuancée » depuis 2007. Continue-t-on en ce sens ? Et alors, il faut changer les textes. Ou en revenons-nous aux principes de la 5ème République, non modifiés d’ailleurs, lors de la dernière révision. Les socialistes vont inévitablement débattre de ce sujet. N’attendons pas qu’il nous soit imposé !
L’élection du président au suffrage universel direct a constitué un dévoiement de la 5e République. Elle est directement responsable du caractère archaïque de notre vie politique et du très lent renouvellement des élites politiques. Alors qu’en Grande Bretagne de nouveaux leaders émergent tous les 10 ans, ce qui garantit un flux d’idées et de pratiques nouvelles à la tête de l’Etat, chez nous, on ne peut être élu président qu’à un certain nombre de conditions qui ruinent tout espoir de changement réel dans la conduite des affaires et la pratique institutionnelle; Je m’explique:
– pour espérer exercer réellement le pouvoir, il faut être élu président,
– pour être élu président, il faut être obsédé par la conquête du pouvoir depuis l’âge le plus tendre, et organiser toute son existence en fonction de ce but,
– on n’y parvient qu’après au moins trente ans de vie politique tout entière tendue vers ce but,
– à ce moment-là, si on y parvient 1/on est complètement déconnecté de la réalité (trente ans de vie politique) 2/les idées formées vers 20-30 ans et qui ont guidé la personne en question toute son existence sont dépassées et personne ne va oser le lui dire de crainte d’être écarté du centre du pouvoir.
Par conséquent le seul changement institutionnel utile serait de revenir aux sources de la Ve, de supprimer l’élection du président au suffrage universel direct et de faire du Premier ministre le vrai leader de la majorité. Un Premier ministre qui perd des élections devra ainsi laisser sa place à un nouveau leader, ce qui permettra peut-être un accès bien plus rapide aux responsabilités de gens plus jeunes et d’horizons plus variés.
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This post was mentioned on Twitter by alainlambert: La question institutionnelle : http://tinyurl.com/yetncw8 – Votre avis ?…
Vous croyez vraiment que le problème est là! Franchement ! Pas autre chose de plus important en ce moment. Vous avez tous l’air de faire comme si nous ne venions pas de traverser une crise terrible !!!
Si je puis me permettre, il me semble c’est la forme qui a changé, beaucoup plus que le fond. Pompidou, Giscard, Mitterrand et Chirac (hors cohabitations) n’était-ils pas des hyperprésidents masqués ?
D’un certain point de vue, la réalité est peut-être l’inverse de ce que vous écrivez : en 2007, on est passé d’une « pratique nuancée », subtile et discrète de la Vème à une pratique sans nuances, ostentatoire et brutale, le président ne laissant plus exister son premier ministre.
On a ainsi perdu les 2 grands avantages de la diarchie.
Le président, avec sa hauteur de vue, son impartialité affichée et sa parole rare conservait un socle de confiance et de respect bien utiles pour faire faces aux crises intérieures ou extérieures.
Le premier ministre, empêtré dans le quotidien, était un fusible bien pratique pour donner une nouvelle dynamique à l’exécutif en cours de mandat.
Par son activisme, Sarkozy a réussi l’exploit d’apparaitre comme un fusible prêt à sauter et de laisser à penser que le recours était à Matignon : Fillon a aujourd’hui la popularité et le statut d’un président de cohabitation…
En tirer les conséquences institutionnelles et se priver définitivement des bénéfices d’un exécutif à deux têtes me semblerait une erreur : mieux vaut revenir à la « pratique nuancée ». Mais la pratique est une question de personnes, et il me semble que seule une personnalité toute en nuances pourra faire revivre la Vème telle que nous la connaissions – et l’aimions…
Il était clair, Monsieur le Sénateur, que le passage du septennat au quinquennat allait entraîner une présidentialisation du pouvoir.
Le premier quinquennat ayant été assumé par un homme d' »ancien régime » rodé aux règles et usages du septennat, les Français n’ont pas constaté de changement.
Avec Nicolas Sarkozy le style change sous le double effet de la personnalité – qui vous visiblement vous irrite – du Président, et du changement – que vous avez voté – de la Constitution.
Le débat que vous suggérez n’a pas lieu d’être sauf à réouvrir le débat sur le mode d’élection du Président et la durée de son mandat. Mais inévitablement un Président élu au suffrage universel pour un mandat de même durée que celui des députés appelés à soutenir le gouvernement, aura toujours vocation à s’impliquer directement dans la politique ce qui entraîne un relatif effacement du rôle du Premier Ministre.
Seul l’hypothèse très improbable d’une cohabitation pourrait entraîner un ephémère retour à l’ancien style.
Une petite précision, peut-être me suis-je mal exprimé, mais, pour ma part, je ne préconise pas du tout la présidentialisation constitutionnelle du régime. Je reconnais tout à fait que la réduction de la durée du mandat présidentiel a eu pour effet de renforcer la tendance à la présidentialisation. La difficulté est que la réforme constitutionnelle de 2008 (que je regrette une nouvelle fois d’avoir au dernier moment votée) n’a pas équilibré de régime par rapport au Parlement. Par ailleurs, celui-ci ne parvient pas à changer sa culture du « fait majoritaire » depuis 1962. C’est pourquoi je pense que c’est plutôt une question de « bonnes pratiques ». Mais quand on a vécu de près l’Exécutif on avait tout lieu d’être parfois fatigué de l’ingérence permanente de Matignon, mais aujourd’hui c’est bien pire car c’est l’Elysée qui commande à tout sans avoir le staff pour le faire de manière appropriée. Voilà mon sentiment. Mais je suis impatient de lire les autres. Et notamment sur le rôle du Premier Ministre dans cette nouvelle République.
Bonjour, je suis étudiant en master contentieux public à Caen et je ne suis absoluement mais absolument pas d’accord avec vous sur le fait que le président empiète sur les pouvoirs du PM ! et encore moins sur le fait que la réforme n’aurait selon vous pas équilibré les rapports entre l’exécutif et le législateur… La réforme de 2008 est bonne et saine pour nos instutions car elle rééquilibre les pouvoirs… par exemple, elle constitutionnalise le pouvoir de contrôle du pouvoir législatif sur le gouvernement (art 24 modifié de la constitution). de plus, le gouvernement ne peut dorénavant plus demander au parlement d’étudier un texte en procédure accélérée si la conférence des groupes parlementaires s’y oppose. En outre, on crée une commission des affaires européennes, on reconnaît des droits spécifiques au groupes palemantaires minoritaires et d’opposition, on encadre le pouvoir de nomination du président car si un vote d’opposition à une nomination recueille les 3/5 des suffrages exprimés de l’ensemble des commissions, le président ne pourra pas nommer la personne en question… Et à part ça, vous affirmez qu’on n’a pas équilibré les pouvoirs du parlement vis-àvis de l’exécutif ? Franchement, avant d’affirmer des choses, il faudrait en vérifier la véracité… D’autant que la liste des éléments de la réfomre constitutionnelle qui vont dans ce sens est mlongue car je n’ai pas tout cité…
Depuis 2007,
La France a amplifié considérablement le Présidentialisme. C’est un fait. Mais la question de l’accountability se pose. Qui est responsable devant qui ? les pouvoirs de l’exécutif se concentre sur le Président de la République qui est irresponsable durant tout son mandat.
Le Premier ministre a beaucoup perdu de son autorité. Si la Veme république a toujours été un régime parlementaire présidentialiste, où le Président de la République tranchait les questions majeures. Il restait un régime parlementaire car le Premier ministre tranchait les autres questions et apparaissait comme le chef de la majorité. Il était surtout responsable politiquement devant l’Assemblée nationale. En cas de difficulté, il peut poser la question de confiance. Il pouvait être aussi poussé à démissionner par sa majorité qui dispose de la motion de censure.
Aujourd’hui l’hyper présidence donne quasiment aucune marge de manoeuvre au Premier ministre. L’invitation des parlementaires de la majorité régulièrement à l’Elysée et bientôt tous les mois va encore amplifier ce phénomène. la France s’éloigne du régime parlementaire, où l’exécutif est responsable devant la chambre basse, les députés. Le Président n’est pas responsable politiquement. Il ne tient son autorité que de son élection au suffrage universelle directe.
Mais il ne s’approche pas du régime présidentiel américain, où le Président est également irresponsable politiquement, mais le parlement dispose de très grands pouvoirs en contre partie (budgétaire, nominations) et où l’exécutif ne dispose pas d’outils de contrainte à l’égard de sa majorité parlementaire. Le régime présidentiel peut être aussi qualifié pour cette raison de régime congressionnel.
En France, malgré des améliorations, le Gouvernement dispose de pouvoirs de contraintes sur les parlementaires.
La question institutionnelle aujourd’hui est le déséquilibre qui s’instaure entre l’Exécutif et le législatif, et la disparition de la responsabilité politique.
Les ministres ne sentent plus responsables. devant le peuple Ils le sont « devant le Président de la République », comme ils le disent. Si plusieurs ministres ont connu des échecs importants aux élections locales, aucun d’entre eux n’a démissionné.
L’absence de remaniement véritable n’a pas permis de donner un vrai appel d’air en faisant entrer de nouvelles personnalités au gouvernement et en trouvant des responsables à l’échec des régionales.
Sont ils vraiment des vrais ministres, même ? On peut en douter en écoutant les prises de parole des conseillers du Président et l’autorité de ceux ci qui leur donnent parfois les allures de vrais ministres, ou de cabinet présidentiel américain.
Aujourd’hui le présidentialisme de Nicolas SARKOZY crée des fortes tensions sur sa personne. Ils concentrent tous les pouvoirs. Il assume toutes les politiques menées, les annoncent, les dirigent. Il est assez fidèle à sa conception d’une hyper présidence, pour laquelle il ne s’est jamais caché.
Malheureusement, son camp connaît de grandes défaites et commence à douter. Plusieurs évolutions sont donc aujourd’hui envisageables.
On peut évoluer vers un retour du parlementarisme :
Le Président continue à renforcer son autorité sur l’Exécutif, mais un jour le Président se retrouve avec une majorité à l’Assemblée de sensibilité différente. Il se retrouve dans une situation politique très difficile, contraint de se limiter à ses pouvoirs constitutionnels propres, c’est à dire à une peau de chagrin. Au bout de 5 ans le président est trés affaibli, le régime présidentialiste s’estompe, la Veme République redevient un régime plus parlementaire.
On peut évoluer aussi en cours de mandat, les parlementaires perdent leur confiance au Chef de l’Etat car les élections locales sont trés mauvaises et que la baisse de popularité du Président ne cesse de dégringoler. Celui ci se retrouve avec une majorité parlementaire de sa sensibilité mais où il n’est plus le Chef de son parti (qui peut être alors le Premier ministre. Le Premier ministre peut alors imposer une lecture plus parlementaire au Président du régime de la Vème république.
Le Président peut aussi poursuivre le renforcement de ces pouvoirs. Il faut alors trouver des contre pouvoirs. Le Sénat et les collectivités territoriales pourraient apparaitre comme des remparts.
On peut aussi entrer dans une vraie crise politique, soit interne à la majorité : les députés démissionnent en bloc pour faire pression sur le Président ; soit par le peuple qui se rebelle et manifeste : on aboutit à une crise de type mai 68 ; soit par l’opposition qui conquiert tous les pouvoirs (Régions, départements, grandes villes, Sénat, Présidence et Assemblée nationale… La droite peut ainsi sortir complètement décimer.
Outre la question institutionnelle, le comportement du Président de la République me pose personnellement des questions (attirance pour l’argent, autoritarisme…).
Je trouve bien courageux votre billet sur le site de Public Sénat. En effet le Président a laissé apparaitre un visage qui ne semble pas en adéquation avec ses fonctions.
je ne pense pas que le president ait commis de faute institionnelle , cependant contrairement comme ses prédecesseurs , il a voulu que ses projets aboutissent le mieux possible de ce fait il s’est impliqué d’autant plus qu’il n’aime pas fuire ses responsabilités ( donc beaucoup de discussions avec les corps intermédiaires :syndicatts ,conseillers ,réunions publiques etc….) De plus les comptes rendus qui sont faits par les chaines de télévision déforment parfois les discours :quelques phrases sont sorties de leur contexte et cela n’a plus aucun sens .Ainsi me passionnant pour la politique depuis 2 007 je reprends les discours sur le site de l’élysée et je saisis beaucoup mieux ; je lis dans certains commentaires : le président aime l’argent ; les autres ne l’aimaientpas? gagnaient moins ? là tout est transparent , avant on ne le savait pas ; quant au salaire il n’y pas eu beaucoup de députés ou de sénateurs pour dire que son salaire était normal face à ses responsabilités . Que gagne un sportif un acteur , un journaliste ,quand l’argent ne sera plus un poison en france : les soi-disants riches ne la volent pas ; Et pourtant je suis retraité ,je gagne 2000euros par mois
assez de pessimisme moi j’aime la transparence mais pour beaucoup qui ne vont pas chercher elle devient insupportable
alors maintenant il faut une droite au sein de laquelle il y ait une grande force de construction pour continuer les réformes Arrêtez les zizanies les attaques destructices , sans consensus pas de résultats possibles ; du courage et encore du courage tout humain a des qualités et des défauts ; il faut savoir prendre le meilleur pour travailler en efficacité
bonne chance, on compte sur vous
Depuis l’élection de Nicolas Sarkozy à la Présidence, y-a-t-il eu des décions prises au mépris du pouvoir Législatif? Sarkozy a-t-il gouverné par décrets? Quelqu’un peut-il citer un seul cas où la Présidence aurait agi de façon contraire à la Constitution? A plusieurs reprises le Conseil Constitutionnel a désavoué les décisions du gouvernement et donc – soyons clairs – les volontés du Président et que je sache le Président s’est incliné.
Alors d’où sort cette fable d’un Président abusant de son pouvoir? Quand? A quelle sujet? Dans quelles circonstances?
Je lis qu’il aime l’argent!!! A la belle fable. A l’occasion du procès Clerstream Villepin a annoncé gagner 29.000 € par mois et le fait que le Président en gagne 19.000 fait scandale.
Les Présidents à la retraite comme Chirac et Giscard D’Estaing gagnent chacun actuellement 30.000 à 31.000 € par mois. Mais eux n’aiment pas l’argent. Ils l’acceptent…….par gentillesse!
A ce jour ce gouvernement honni, de gens qui « aiment l’argent » pour reprendre une expression courante, n’a encore été éclaboussé par aucun scandale d’argent.
Pas d’affaire Boulin, pas de délits d’initiés d’intimes du Président, pas de diamants africains, pas de Carrefour du développement, pas d’affaires URBA, et j’en passe et des meilleures.
Mais cependant ces gouvernements précédents semblent aujourd’hui parés des mérites que justifie une grande honnêteté et le gouvernement actuel semble choquer.
On croit rêver!
je suis tout à fait d’accord avec ber et valois !!!
Déjà en 2007. Il y a si longtemps. Alors, je vivais loin de France et votais auprès du Consulat de France à Saint-Pétersbourg. Par presse interposée et Internet, je me tenais informé. Je viens de retrouver des archives du Journal de l’Orne qui, à l’époque, m’avait permis d’exprimer mes préoccupations à propos de l’étonnante (déjà) pratique sarkozienne de la Constitution. De Saint-Pétersbourg, j’ai alors rédigé trois articles publiés dans le dit Journal de l’Orne les 9, 16 et 23 août 2007. Inutile de dire qu’à l’époque, je n’ai rencontré qu’ironie ou indifférence polie. Mais quand-même, merci à la rédaction de ce journal. Alain Lambert et ses amis n’auront, j’en suis certain, aucune difficulté pour consulter ces archives. Bienvenu au club Alain Lambert car je commençais à me sentir bien seul…
Un autre chose me préoccupe sérieusement : jamais le PS ne fait référence au piétinnement des articles 20 et 21 de la Constitution par Nicolas Sarkozy. M. Aubry s’adresse constamment à lui personnellement et ignore superbement le Gouvernement et le Premier Ministre. Le PS ignore superbement les législatives à venir en 2012 et ne parle que des présidentielle comme si, dans l’article 5 de la Constitution, résidait la détention du pouvoir du peuple souverain. Qui pourra me dire ce que ce silence du PS signifie ?
@Doyennel Claude
Votre fraîcheur d’esprit est émouvante! Auriez-vous oublié François Mitterrand écrivant sur « le coup d’Etat permanent » que représentait, selon lui, la Constitution, lorsqu’il était opposant au Général de Gaulle.
A-t-il pour autant changé cette Constitution lorsqu’il est arrivé au pouvoir?
Non! Soyez sans illusion! Les pouvoirs conférés par la Constitution ne semblent excessifs qu’à ceux qui n’exercent pas le pouvoir! Ensuite ils les trouvent à peine suffisants!