emprunt_d__etat.jpg A Bercy, en Mars 2003, au moment où la croissance menaçait de devenir négative, j’étais ministre du budget. Le sol se dérobait sous nos pieds. Je me souviens avoir alors envoyé une note personnelle au Premier Ministre, Jean-Pierre Raffarin, un dimanche soir. Tombée aujourd’hui dans le domaine public, je crois pouvoir la publier. Elle n’a jamais connu de réponse d’ailleurs. Pourtant, plus de 6 ans après, je n’en renie pas un mot ! Oui, la crédibilité d’un gouvernement se mesure d’abord dans sa capacité à maîtriser la dépense plus que dans son génie à l’inventer. Oui, toutes les dépenses de fonctionnement sont « plafonnables » en euros courants, dès lors qu’on le décide. Encore faut-il le croire pour le vouloir et en conséquence le pouvoir. Oui cette pratique consiste tout simplement à garantir aux Français que l’on s’engage à ce que leur sphère publique ne leur coûte pas un euro de plus que l’année précédente. J’y évoque l’idée de lancer un grand emprunt, sans intérêts, exonéré de droit de succession ! J’y souligne la portée symbolique forte. Considérant que chaque épargnant français accepterait sans doute de prêter un peu de ses économies à son Pays pour alléger le fardeau de la dette transmise à ses enfants.
Je conserve le souvenir de discussions homériques avec le corps incroyablement expert des hauts fonctionnaires de Bercy qui m’instruisaient du caractère désuet et contraire au droit européen de mon idée.

La suppression des droits de succession, sans contrepartie, fut décidée par l’équipe de campagne du Président Sarkozy, contre ma recommandation. Sans doute est-ce d’ailleurs, à compter de cette époque, que commença à s’instruire en coulisses mon procès en excommunication. Je n’en tire d’ailleurs aucune amertume puisque j’ai continué, tel un moine soldat, à défendre le programme fiscal présidentiel, face à Eric Besson qui défendait celui de Ségolène Royal. Il conserve toute ma sympathie parce que Dieu que le job est ingrat !
Aujourd’hui nous n’avons plus d’exonération à offrir aux prêteurs, il faudra donc leur servir des intérêts et donc accroitre encore nos dépenses de fonctionnement.
Quant aux dépenses d’investissement que le produit de l’emprunt financera, j’en frémis d’avance. Il se cache dans les dossiers de nos administrations des tonnes de milliards d’euros d’investissements débiles et ruineux. Les études préalables sont souvent prêtes. Puisque ces dossiers foireux n’ont souvent pas passé le cap des derniers budgets. L’ordre de service peut être donné immédiatement. Comme une croissance asphyxiée ne trie pas l’oxygène, j’imagine déjà ce qui risque d’en sortir. A l’inverse, des dossiers séculaires d’infrastructures méritent d’être engagés. Ils peuvent changer le visage de la France et son destin économique. Réalisons vite les études nécessaires et surtout confions au privé le soin de les réaliser. A défaut, une ruine pire encore nous menace.
Oui, décidément notre situation financière n’est pas fatale. Nous pouvons encore la redresser. Cela commande du courage, de la constance, de la méthode et une forte capacité à convaincre l’opinion publique plutôt qu’à lui obéir.