J’ai pensé que le jour de Noël pouvait être approprié pour réécouter, si vous en avez le temps et l’envie, __cette ITW, réalisée le 23 janvier 2004, sur les ondes Radio Notre Dame__ avec Guillaume Roquette et Inès de Warren. Une atmosphère de paix intérieure, de confidence, de complicité s’était établie sur le plateau et je me souviens m’être livré très au delà de mes habitudes sur des sujets, au fond, assez personnels. Malheureusement le support n’a pas résisté au temps et la fin de l’émission n’a pu être sauvée par mon magicien David, malgré tous ses soins. Si vous avez des commentaires sur ce type d’émission d’hésitez pas.
Pour écouter l’émission :
Retour sur une ITW réalisée sur Radio Notre Dame sur Politique et spiritualité
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[audio:https://www.alain-lambert.org/wp-content/uploads/2004/01/Coeur_de_metier_240104.mp3|titles=Coeur_de_metier_240104]
Merci Mr Lambert pour ce message qui parle au cœur de l’homme au-delà des différentes croyances.
Je n’ai pas de religion, mais pourtant, j’ai la même conception que vous de la spiritualité. Je crois aussi que les humains ont besoin de moments de silence et de méditation pour retrouver leur profondeur et la clarté de l’esprit.
J’apprécie que vous mettiez la valeur humaine et le respect des personnes au cœur de votre action politique. C’est important de comprendre la souffrance et aussi faire prendre conscience de la valeur et de la responsabilité de chacun. Cette conception inclut la solidarité, n’entretient pas l’assistanat, stimule la créativité.
Les partis et les schémas politiques ne sont que des outils. Leur réussite et leur efficacité dépendent du niveau de maturité de la société et des politiques. Vous voulez entraîner les citoyens à créer une société au-delà des partis, en faisant appel à leur humanité qui nous rassemble tous.
Merci, Monsieur Lambert pour ce beau témoignage.
Je vous souhaite pour l’année qui commence beaucoup de bonheur personnel.
Je nous souhaite que vous gardiez votre belle énergie et que votre influence fasse tache d’huile dans le monde politique et dans la société parce que nous allons avoir à gérer des moments difficiles. Souhaitons que nous soyons capable de faire de cette crise une opportunité pour créer plus d’harmonie .
Etonnante MONIQUE : …." pas de religion " dites vous ?et pourtant vos propos pourraient paraitre directement inspirés par l’Encyclique "Sollicitudo rei socialis " qui souligne que l’un des principes de la doctrine sociale de l’Eglise ( catholique ) est le principe de solidarité "une vertu humaine et chrétienne " ….
Par ailleurs j’ai trouvé très beau votre commmentaire et partage pleinement votre appréciation concernant notre hote.
C’est rare qu’un homme politique se livre comme cela alors votre témoignage est fort intéressant.
Maintenant que nous sommes bien installés dans une société laïque, que les religieux n’aspirent plus à s’immiscer dans les pouvoirs temporels, j’aime bien que chacun fasse état librement de ses convictions profondes. La spiritualité et la religion ne sont plus des sujets tabous. Chacun doit pouvoir faire état de ses croyances, de ses non croyances et de ses doutes.
Je crois aussi que pour bien communiquer, qualité essentielle d’un homme politique, il faut savoir s’ouvrir. Et s’ouvrir c’est exprimer ses sentiments profonds sans pudeur. Et là vous nous donnez une leçon.
Belle interview, oui; d’autant plus qu’il est difficile de ne pas faire dans le "people voyeuriste".
L’avantage est que vous dites à la fois des choses vraies et difficiles à entendre (= refus de la démagogie).
Sur la famille vos formules sonnent justes et sincères !
Par contre je suis très réservé sur vos goûts musicaux …
Enfin deci-delà on repère quelques mots "codes" : "humaniste" (qui normalement signifie "franc-mac") et "chrétien" ou "spiritualité" mais jamais "catholique" (avec le choix de Taizé qui laisse une ouverture ambiguë).
Très joyeux Noël à vous et aux vôtres !!!
@ julius,
Que quelqu’un se définisse sincèrement comme chrétien plutôt que comme catholique ne me gène nullement, au contraire. Chrétiens et catholiques partagent les mêmes valeurs, seules les dogmes esquissent des nuances que je trouve pour ma part sont peu importantes.
J’ajouterais sans ironie aucune, que pour un homme politique se définir comme « chrétien » est habile car ce terme et plus rassembleur dans le sens où il embrasse des sensibilités diverses. Par contre, «catholique» peut choquer certains laïques étriqués qui pourrait suspecter dans cette appartenance une allégeance au pape (j’en connais).
Je ne pense pas et j’espère aussi que les francs maçons n’ont pas le monopole de l’ " humanisme ».
L’important est qu’un homme politique ait la conscience de devoir s’octroyer des instants face à lui-même.
@Hervé,
je ne dis pas autre chose : c’est une "habileté"; ce qui relativise le caractère "franc et ouvert" de l’interview, mais bien sur c’est normal chez un politique.
Le mot "humaniste", c’est mon expérience, est utilisé aujourd’hui dans notre pays avec un sens bien particulier, qui n’a rien à voir avec l’histoire ou l’étymologie. Je le rappelais simplement …
Bien sur, aucune hostilité là-dedans vis-à-vis de M Lambert, qui reste aujourd’hui un de nos politiciens les plus fiables (en comparaison).
@julius,
Vos propos m’interpellent car j’ai eu il y a quelque temps un échange avec un membre français d’une église évangélique américaine qui à mon grand étonnement diabolisait tout à la fois les francs-maçons et l’humanisme.
J’avoue être complètement étranger à ces querelles et j’aimerais bien comprendre.
Est-ce que la franc-maçonnerie et l’humanisme vous dérangent, et si oui en quoi ?
Je veux bien essayer, sur l’un des 2 points, mais il faut m’excuser si c’est long …
Si vous cherchez le mot "humaniste" sur wiktionnaire, vous verrez : "Celui qui a une connaissance approfondie de la langue et de la littérature grecque et romaine."
C’est de là que vient le mot "humanités". Cela provient du mouvement intellectuel du 16ème siècle qui voulut réagir contre la culture scolastique tardive de l’époque précédente, qui s’était mécanisée, figée, privilégiant certaines méthodes formelles et l’analyse des commentaires de commentaires, plutôt que le retour aux textes d’origine nouvellement disponibles (1453: chute de Constantinople).
Cela a permis une meilleure connaissance de l’antiquité, notamment de Platon. Sur le plan religieux, cela a conduit à privilégier l’accès direct aux textes bibliques et aux pères de l’Eglise. Tous ces gens étaient chrétiens : Nicolas de Cuse, Guillaume Farel, Erasme, Luther, Calvin, Henry VIII, François 1er, Charles Quint,… Ils privilégiaient cependant une relation différente entre l’homme et Dieu : le premier étant "ennobli" par l’incarnation, il était légitime de l’étudier pour lui-même, hors de toute dépendance a priori d’un système théologique donné, trop étroitement fixé sur Aristote.
Avec le temps, les idées ont changé et on en est venu aujourd’hui à qualifier "d’humanisme" ce qui est beaucoup plus la suite d’une partie du mouvement des "lumières" (les "illuminati").
On lit sur wikipedia : "En mettant l’accent sur la capacité d’auto-détermination, l’humanisme rejette la validité des justifications transcendantes, comme une dépendance à l’égard de la croyance sans raison, du surnaturel, ou de textes présentés comme d’origine divine." Cela réduit l’humanisme à n’être qu’une forme d’athéisme.
Il est intéressant de voir quel a été le chemin ; je crois qu’on est passé d’un mouvement exaltant la grandeur de l’homme, dans sa relation à Dieu, à une conception de Dieu comme faisant de l’ombre à l’homme, car humiliant sa raison.
On a d’abord construit une sorte de théisme qui dit après Spinoza : "Deus sive natura", "Dieu, c’est-à-dire la Nature". Un tel Dieu, n’est PAS une personne et est incapable de juger les hommes.
On a ensuite essayé de fonder la morale sur les sciences de la nature (les "lumières" au sens large); cela a conduit d’abord à tenter de changer la morale, puis à l’affirmation que tout relevait du Droit positif.
On a alors rejeté totalement l’idée de Dieu comme archaïque. Ceux qui ont essayé de conjuguer cela avec la foi chrétienne ont pris l’incarnation à rebours, comme une "apothéose" : c’est l’homme qui par ses propres forces devient dieu et occupe une place qui n’existait pas auparavant.
D’où certaines attitudes actuelles, où les croyants conséquents (tous ceux qui croient vraiment en Dieu, pas seulement les chrétiens) se trouvent en opposition avec les tenants d’une "spiritualité humaniste", qui sont en fait des athées.
Ces derniers s’appuyent sur la raison humaine seule, donc sur les évaluations quantitatives, les traités internationaux et les "mouvements
d’opinion progressistes".
Wikipedia cite un théologien français, le père de Lubac qui "croyait que l’orgueil de l’homme pour soi était la cause principale de l’athéisme moderne. Il écrivit que la doctrine humaniste athée conduisait immanquablement vers un manque d’humilité et un manque de charité".
Cela conduit également au relativisme scientifique, car la "vérité" n’est plus alors une valeur objective, puisqu’ayant une prétention transcendante à l’homme.
La raison humaine devient alors purement procédurale, un jeu coutumier.
On finit par détruire ce qu’on avait voulu exalter !
Le mot d’ordre de cette thèse actuelle est la phrase de Protagoras, affirmant que « L’homme est la mesure de toute chose ». Il est piquant de rappeler que Protagoras était un sophiste, que Platon cite justement pour le réfuter. C’est à dire que les humanistes d’origine, rejetteraient totalement ce qu’on appelle aujourd’hui "humanisme".
Pourquoi suis-je opposé à ces gens ? Outre le fait qu’ils ne peuvent être croyants, ils sont à mon sens dangereux, comme l’histoire l’a montré depuis deux siècles.
A mon sens ceci relève d’une confusion des ordres, car sur le plan POLITIQUE, il est clair qu’il est souhaitable que l’Etat soit fondé sur le Droit et que celui-ci soit rationnel, d’une rationnalité humaine.
Mais faut-il en déduire que l’homme tout entier peut être enfermé dans la gloire de sa propre raison ? Ou ne trouve-t-il pas en lui-même des indices suffisants pour penser qu’il ne peut pas se comprendre totalement, se maitriser, se transformer lui-même en son propre outil ?
La politique ne devrait-elle pas prôner une conception de l’homme qui la dépasserait, qu’elle ne pourrait jamais englober ?
Je préfère dire : penser l’homme sans Dieu c’est le mutiler et en faire une machine. "il y a plus en l’homme que l’homme".
Tous mes voeux de bonne année 2009.
@julius,
Merci pour cette longue explication argumentée. Je n’avais jusque là pas compris le lien pouvant exister entre humanisme et athéisme.
Pour autant, je ne partage pas la fin de vos propos :
« A mon sens ceci relève d’une confusion des ordres, car sur le plan POLITIQUE, il est clair qu’il est souhaitable que l’Etat soit fondé sur le Droit et que celui-ci soit rationnel, d’une rationalité humaine. »
Si je vous comprends, vous sous-entendez que l’Etat devrait- être fondé sur d’autres plans que le plan politique.
Je ne partage pas cette opinion, pour moi l’Etat doit rester uniquement sur le plan politique. La grande question : Y a-t-il un Dieu concerne uniquement le domaine privé. L’Etat doit un égal respect envers les croyants et les non-croyants.
Penser que l’homme reste désespérément seul face à la question de Dieu ce n’est pas le mutiler, ce n’est pas le déifier non plus mais c’est le remettre à sa place … humaine.
Cher Hervé, je dois vous répondre en m’excusant d’abuser encore de l’hospitalité généreuse d’A Lambert.
Non, pas du tout, l’Etat est pour moi totalement politique. Je ne crois pas au "droit divin" (était-ce nécessaire de le préciser ?).
En revanche il intervient naturellement (par le financement par exemple) sur des domaines qui vont au delà du politique, par exemple la science
(le Vrai) et l’art (le Beau).
Il est donc nécessaire qu’il reconnaisse qu’il s’agit de choses, ayant leur légitimité propre, vis-à-vis desquelles il n’a pas réellement autorité. Il en est de même pour la morale (le sens du Juste) et la religion qui au minimum regroupe les absolus que nous trouvons en nous sans pouvoir les maîtriser rationnellement (c’est à dire qui déclenchent notre "enthousiasme", étymologiquement "possession divine").
Qu’entendez vous par "domaine privé" ?
– Est-ce le "domaine individuel" par rapport au "domaine collectif" ?
– Ou bien est-ce le "domaine civil" par rapport au "domaine étatique" ?
La première conception est celle de "la laïcité à la française", elle se méfie des corps intermédiaires, est jacobine et peut mener au totalitarisme (= l’état englobe l’homme tout entier dans son champ).
La seconde est la seule légitimement libérale, conforme au christianisme et aux "lumières anglophones".
L’Etat peut alors intervenir financièrement sur le plan religieux, comme il le fait sur le plan scientifique, artistique et même sportif. (Trouvez-vous légitime qu’on subventionne le football plus que le waterpolo ? N’est-ce pas une entorse à la "laïcité"?).
Cela n’empêche pas l’état d’être fondé sur la seule rationnalité humaine.
"L’homme reste désespérément seul face à la question de Dieu" :
Seul au sens de "individuel" ? Ce serait-alors interdire toute religion …
Seul au sens de "face au silence de Dieu", c’est la position des bouddhistes (et des athées) mais pas des religions révêlées (ce n’est donc qu’une thèse).
Seul au sens de "perdu face à quelque chose que sa raison n’arrive pas à contrôler" ? Là je suis d’accord et tout le monde peut l’être.
C’est ainsi que l’on peut fonder un Etat qui plaise et aux athées et aux croyants …
Amicalement et encore tous mes voeux.
Cher Julius,
Que l’Etat ait une politique culturelle et de développement de la pratique sportive, tout le monde en est d’accord car il y a un large consensus pour affirmer que c’est bon pour le corps et l’esprit des concitoyens.
Que l’Etat ait une politique visant à favoriser la pratique religieuse, c’est pour moi très différent.
Il y a des gens qui pensent que la pratique religieuse élève l’esprit et régule les comportements d’autres qui pensent qu’une telle pratique aliène comme Marx qui disait «la religion c’est l’opium du peuple».
Personne ne peut objectivement départager ces deux thèses.
Cela me ramène à la solitude face à la question religieuse. Puisqu’il n’y a pas de réponse objective, c’est à dire prouvée et admissible par tous, la réponse ne peut-être que personnelle et privée. Dans le sens où c’est à chacun seul de se déterminer sur une éventuelle pratique religieuse.
Sur la morale, j’ai un point de vue différent, je crois que l’Etat devrait s’y intéresser un peu plus en cherchant à définir ce qui pourrait-être une morale républicaine, mais je ne sais pas comment.
Le terme « religions révélées» m’interpelle, je ne prends pas ces mots «à la lettre» car dans ces 3 grandes religions, Dieu n’a pas dicté sa Loi, celle-ci a toujours été transcrite a posteriori suite à des transmissions orales (Cf O. Vallet).
Merci pour cet échange et meilleurs voeux 2009.