« Cette réforme va faire entrer les méfaits du capitalisme à la fac ».
Cette phrase, on a pu l’entendre tournée dans tous les sens dans nombre de facs bloquées de France, ces dernières semaines. Son auteur viendrait-il du fond des âges ? Serait-il au courant du monde d’aujourd’hui ? Sans doute, pour lui, l’université française va pour le mieux. Sans doute ne sait-il pas que la première université française, au récent classement de Shanghai, est classée 39ème (il s’agit de Paris VI). Sans doute ne sait-il pas que certaines facultés (par exemple Jussieu) sont en travaux depuis 10 ans. Outre le fait que si le capitalisme n’a sans doute pas toujours fonctionné à merveille, on ne peut considérer l’entreprise, que cette loi tente de rapprocher de l’université, comme un « méfait ». C’est oublier que l’entreprise, c’est le quotidien de la majorité des actifs. Sans doute l’auteur de cette phrase oublie qu’un jour, il devra faire avec. Mais pour lui, non, qu’on ne touche à rien. Tout va pour le mieux.

L’une des craintes des opposants à la loi Pécresse, pourtant pas vraiment ambitieuse, est d’arriver, à terme, à « une indépendance, une libéralisation, et à une autonomie totale des universités sans contrôle de l’Etat ». Comment affirmer que l’Etat se désengage de ses facs alors qu’il s’apprête à donner 9 milliards d’euros pour l’enseignement supérieur et la recherche, représentant une hausse de 5 % par rapport à cette année ? Pourquoi s’inquiéter de la possibilité désormais offerte aux entreprises de faire du mécénat envers les facultés locales ? Pourquoi s’inquiéter de la possibilité offerte aux universités d’embaucher des contractuels, de gérer leurs biens ? Le mythe du tout Etat, pourtant bien souvent éprouvé, n’a pas, chez certains, disparu. Les meilleures universités mondiales, telles Harvard et Cambridge, travaillent de concert avec les entreprises. Va-t-on dire d’elles qu’elles sont délaissées par leur Etat ? C’est sans doute la dernière chose que celui-ci souhaiterait ! Soit l’on veut faire de l’université une étape formatrice dans la vie de chacun, soit on la laisse telle qu’elle est aujourd’hui : pour beaucoup, une sorte de voie de garage retardant au maximum le passage à l’âge adulte.

Barthélemy