La chose est jugée depuis longtemps : toute la misère du monde viendrait des profits des entreprises, intrinsèquement honteux et dont les niveaux sont de toute façon scandaleux. Poursuivant l’exploration des « mythes économiques », il est donc intéressant d’aller voir ce qu’il en est, tant du niveau des profits que de leur rôle économique. François Mitterand avait découvert au cours de ses mandatures que les entreprises étaient à l’origine de la création des richesses – et des emplois -, il est clair que sa leçon n’a guère été retenue par ses successeurs.
Commençons par mesurer le profit, ce qui n’est déjà pas simple. Au-delà de la triviale définition du supplément de recettes sur les charges, on peut retenir une notion plus comptable, l’excédent brut d’exploitation (EBE), qui correspond à ce qui reste aux entreprises de la richesse qu’elles ont créé (la valeur ajoutée), après notamment le paiement des salaires (incluant les charges appelées « employeurs »). L’analyse, pour des raison de simplicité, sera limitée aux seules « entreprises non financières », c’est-à-dire hors banques et « entreprises individuelles » (les commerçants, agriculteurs, professions libérales …). En 2004, les entreprises de ce périmètre ont affiché un EBE de 255 milliards d’euro, soit l’équivalent d’un peu moins de la moitié de la rémunération du travail de leurs salariés (539 milliards qui représentent 65 % de leur valeur ajoutée).
Avec cet EBE, elles ont réglé leurs bailleurs de fonds, c’est-à-dire les banques, leurs actionnaires « autres entreprises » et leurs actionnaires « personnes physiques » : ce sont 18 milliards d’euros payés au titre des intérêts nets (c’est-à-dire la différence entre intérêts reçus et intérêts payés) et 59 milliards au titre des dividendes nets et des coupons nets d’obligations et autres financements. Pour leur part, les ménages ont reçu 48 milliards (6 % de la valeur ajoutée), dont 29 milliards de dividendes (3,5 % de la valeur ajoutée). Ceux qui pensent que pour accroître substantiellement les recettes de l’Etat, il suffit d’accroître l’imposition des revenus du capital en seront pour leurs frais ….
Après impact de la fiscalité notamment, il reste aux entreprises 128 milliards d’euros. Encore convient il de préciser que ce solde n’inclut pas l’usure de l’outil de production, l’amortissement, que, pour 2004, l’INSEE estime à 120 milliards ! Ceci dit, cette charge ne se traduisant pas par un décaissement de trésorerie, elle ne modifie pas la « capacité de financement des entreprises », ces 128 milliards. Cette capacité, qui est une forme de chiffrage du profit, contribue très largement au financement de l’investissement, lequel a représenté 157 milliards.
Alors, en quoi le niveau des profits serait il scandaleux ? Son rôle premier, c’est le financement des investissements, donc celui de l’avenir : s’il n’y a plus de profits, il n’y a plus d’investissements. On pourrait être critique face à des entreprises dégageant durablement des bénéfices qui ne seraient pas réinvestis. Ce n’est quasiment jamais le cas, et lorsque ce phénomène a été constaté, c’était face à un choc touchant l’économie, comme en 1993 avec la hausse forte des taux d’intérêt. De façon paradoxale, les 29 milliards de dividendes versés aux ménages contribuent également et indirectement à financer le besoin de capitaux des entreprises : en effet, il est difficile de faire appel à l’épargne publique et de ne pas la rémunérer. Les dividendes d’aujourd’hui font les financements de demain. A cet égard, l’évolution de la législation sur les coopératives, il y a déjà quelques années, a été des plus intéressantes, puisqu’elles ont été autorisées à faire appel à des « adhérents non producteurs », en raison de la nécessité de disposer de capitaux et d' »investisseurs » prêts à prendre le risque de perdre la rémunération, voire leurs apports. A souligner que les dividendes reçus par les ménages sont du même ordre de grandeur que le surcoût du régime de retraite des fonctionnaires d’Etat en regard du régime général. Le premier rémunère une prise de risque, le second représente une rente, sans rôle économique. Où est la morale ?
L’idée que les profits seraient toujours plus importants, au détriment des revenus du travail est par ailleurs fausse. En effet, il existe sur le long terme une grande stabilité dans la répartition de la valeur ajoutée, avec 2/3 pour le travail et 1/3 pour les entreprises. La seule exception notable depuis 50 ans a été la période 1973 – 1982, où les politiques d’inspiration keynésienne ont conduit la part du travail à plus de 70 % de la valeur ajoutée. En déconnectant l’augmentation du coût du travail des gains de productivité et en pénalisant la capacité de financement des entreprises, elles ont abouti à une accélération du chômage
La condamnation du profit vient de la « vulgate » marxiste, pour reprendre l’expression de Raymond Aron : le profit trouverait sa source dans « l’exploitation du travailleur », c’est-à-dire dans le fait que son travail n’est pas intégralement rémunéré. On a mesuré les résultats de cette conception métaphysique du monde, là où elle a été appliquée. Le profit a un rôle économique et il doit faire l’objet d’une régulation, qui vient à la fois de la concurrence et de la juste revendication des salariés. En revanche, ceux qui au nom d’un ordre moral dont ils s’érigent juges, condamnent systématiquement le profit, trop souvent manoeuvrent pour s’octroyer une part de richesses qu’ils n’ont pas contribué à créer.
Oui.
Le but d’une entreprise est de faire du profit , pas de fournir du travail , voila deja une evidence a rappeler a tous
Par ailleurs , je crois que preter de l’argent a l’etat , est une source formidable de profit … Et la ceux qui exploitent les travaileurs sont les politiciens trop laches pour agir
Quand on entend une personne reprendre les mots de Kennedy , sur qui doit agir pour son pays , il m’apparait que nous sommes nombreux a savoir qu’il ya aura des sacrifices a faire .. le hic c’est que les gouvernants , eux ne font rien pour leur pays , a part parler de notions datant du XIX siecles .
Quand j’entends des politiciens de gauche , mais aussi de droite parler de "Super Profits " , je suis pétrifié . Quelle est donc cette notion qui fait qu’une entreprise qui diffuse largement un produit , soit d’un coup fustigée ?
Bravo M Lambert pour cette nouvelle analyse argumentée. J’apprécie tout particulièrement votre pédagogie. Je suis convaincu par vos arguments mais je voudrais ajouter quelques éléments à votre propos.
A mon avis, beaucoup de personnes jugent les profits des entreprises scandaleux parce qu’ils ne comprennent pas pourquoi, même avec des diplômes, les salaires sont si bas. Je connais beaucoup de jeunes qui débutent après leur BTS en poche avec le salaire minimum. Comment vivre à l’heure actuelle avec un SMIC surtout lorsqu’on est célibataire ? Je pense qu’un allègement de charges sur tous les salaires aurait permis d’éviter cette "smicardisation".
Les gens ne comprennent pas non plus le manque de réglementation des subventions publiques versées aux entreprises. Pourquoi n’oblige-t-on pas les entreprises qui délocalisent à rembourser toutes les aides publiques reçues. C’est une question de bonne gestion des fonds publics. Quelle est l’efficacité de ces aides ? J’aimerai connaître votre avis.
Enfin, je tiens à préciser que les agents fonctionnaires ne sont pas responsables des avantages sociaux de la fonction publique. Certes, certaines inégalités peuvent paraître inacceptables mais il faut aussi dire qu’un fonctionnaire, à niveau d’études équivalent, touche un salaire beaucoup moins élevé et ne bénéficie pas d’un plan de carrière qui pourrait lui permettre d’évoluer. Si on met en débat le statut des fonctionnaires, il ne faudra pas oublier ces éléments.
The Economist dans son edition du 2 Septembre 2006 dans la section "Economic focus" fait part de faits qui semblent contredire l’affirmation de votre avant-dernier paragraphe.
En effet, il semblerait que la mondialisation, en offrant un surplus de travailleurs, affecte negativement les salaires. L’article cite une etude faite par Grossman et Rossi-Hansberg qui demontre que les salaires des emplois peu qualifies aux USA sur la periode 1997-2004 sont particulierement affectes (le resultat est net, c.a.d, qu’il prend en compte les benefices induits par la mondialisation comme la baisse de prix sur certains produits).
L’article continue en indiquant qu’en Amerique, dans la zone euro et au Japon, la proportion des salaires dans le revenu national touche un bas historique multi-decennal, alors que les profits des entreprises ont augmente. C’est comprehensible s’il l’on considere que le ratio [capital]/[main d’oeuvre mondiale] a diminue.
Ces tendances seront evidemment corriges un jour. Mais il me semble logique de considerer que l’arrivee d’ 1.5G de travailleurs, soit le quasi doublement de la main d’oeuvre mondial, cree des desiquilibres que l’ont ne peut ignorer.
Nous avons une configuration actuelle qui est de mon point de vue particulierement mauvaise pour la vision capitaliste a la francaise, puisque nous avons d’un cote une pression croissante pour plus de flexibilite, donc plus de risque supporte par le travailleur, sans pour autant plus de benefices, puisque le pays a soigneusement eduque ses employes a ne pas risquer leurs economies dans les marches financiers et que nos hommes politiques ont invente le concept ahurissant de solidarite inter-generationnel en revendiquant les vertus de la retraite par repartition, privant ainsi la nation de fonds de retraite capables de profiter des benefices des entreprises.
Merci, ami Mamertin, de votre réponse. Je précise que ce billet n’est pas de notre hôte mais de moi-même et je n’en suis que davantage flatté que vous ayez pu faire la confusion.
Pour les bloggeurs, je précise que votre pseudo signifie "qui habite Mamers", sous préfecture de la Sarthe, et dont un des élus au début du XXe siècle fut Joseph Caillaux, l’inventeur de l’impôt sur le revenu, dont l’épouse avait "révolverisé" le patron du Figaro en 1914 – date à vérifier – (elle s’était d’ailleurs bien sortie, me semble-t-il des aventures judiciaires qui ont suivi).
Vous posez vous-même d’excellentes questions auxquelles je vais tenter de répondre.
Sur les salaires du privé :
Peut on dire qu’ils sont bas ? J’ai souvent écrit que la France est un pays au coût du travail cher … même si au final, le revenu disponible n’est pas forcément très élevé.
J’explique : Lorsqu’un salarié dispose d’un salaire brut de 100, son entreprise paie 150 (charges dites "employeurs" qui sont un élément du coût du travail, qui represente 50% du salaire brut quand celui-ci est supérieur à 1,6 fois le SMIC). Son salaire net est d’environ 75 (par déduction des charges salariées). Donc, le salarié ne reçoit que la moitié de ce que paie l’entreprise.
Et ce n’est pas fini. Il faut payer ensuite les impôts (IRPP, TVA, fiscalité locale, sur les carburants – la TIPP – etc.). Au total, on peut estimer à 40 % ce qui reste des revenus du travail !
2eme observation : le salaire reflète la productivité. J’ai déjà mis en cause la qualité de notre système éducatif, qui vit trop souvent sur des mythes. Si je ne m’associe pas au "haro" quasi général sur les enseignants qu’a suscité les propos de Madame Royal, je déplore malgré tout l’absence de systèmes pédagogiques alternatifs et concurrentiels capables d’integrer l’ensemble des jeunes, alors que l’EN aujourd’hui laisse trop de monde de coté.
Et il y a l’impact des 35 heures ! Travailler moins, c’est sympa … mais cela affecte la productivité, donc la rémunération … La France est un pays où le temps de travail est l’un des plus faibles du monde, il y a donc des conséquences.
Concernant la rémunération des fonctionnaires, mes observations restent identiques. Il faut raisonner en coût du travail. Regardez les seules retraites des fonctionnaires d’Etat : elles sont financées à hauteur de 60 % par le contribuable. Pour calculer le salaire réellement payé, rajouter 2 fois le montant de la cotisation salariée, soit 14 % du salaire brut.
Par ailleurs, la fonction publique est massivement sous productive : empilement de structures, quasi absence de mobilité géographique et fonctionnelle, insuffisance d’équipement, absence de pilotage par objectif et a fortiori de suivi … De plus, le système de rémunération et d’avancement qui valorise tout particulièrement l’ancienneté n’est pas particulièrement stimulant.
L’intention de l’article est excellente. Rappellons au passage qu’"en face", vous avez çà : http://www.agoravox.fr/article.p...
Hélas le fond me semble peu clair et la forme peu convaincante.
petit problème de forme : ça manque de graisse judicieusement placée. Par exemple un truc comme <b>"les ménages ont reçu 48 milliards (6 % de la valeur ajoutée), dont 29 milliards de dividendes (3,5 % de la valeur ajoutée)"</b> aurait quand même une autre gueule.
problème mi-forme, mi fond : on jongle avec trop de notions comptables (et donc arbitraire !) pour que ça soit clair : EBE, amortissement, charges, dividandes, investissement, valeur ajoutée… En outre, il se trouve que les donnée 2005 sont disponibles, alors pourquoi prendre celle de 2004 ?
problème de fond : le terme de "profit" est trop flou : fr.wikipedia.org/wiki/Pro…
Vous étiez donc coincé à la base.
Vous avez choisit l’EBE (des seules entreprises non financières) ? pourquoi pas … mais, ausssi, pourquoi, c’est à dire pourquoi pas n’importe quel autre solde intermédiaire de gestion de la "valeur ajoutée" au "résultat net" ?
fr.wikipedia.org/wiki/Sol…
ou même les dividendes, ou plus généralement les "revenus de a propriété" du TEE (http://www.insee.fr/fr/indicateu... ?
Evidemment le choix de l’un ou l’autre de ces indicateurs n’est sans doute pas totalement neutre. mais de toute façon vous êtes obligé de traduire le terme de "profit", et vous avez toute chance de vous faire accuser de tromper votre monde avec des notions complexes hors sujet.
bien essayé, donc, mais…
Ce qui frappe dans vos chiffres, c’est le rapport 2/3 pour le salarié sous forme de salaire, et 1/3 pour l’entreprise. Et il semblerait que ce ratio n’ai changé que marginalement depuis 150 ans. En fait, si je vous lis bien, c’est moins d’1/3 pour l’entreprise ou l’investisseur (particulier ou banquier), puisque ce 1/3 comprend les investissements.
Ce qui a changé fortement cependant, c’est la manière dont le 2/3 au salarié est réparti. Sur ces 2/3, la moitier est redistribué: impot, santé, retraite, prestation chômage, RMI etc. L’ouvrier qui crée les richesses par sont travail, peut se sentir légitimement floué puisqu’il crée 100 de richesse, et ne retrouve que 33 sur sa fiche de paye.
A HdF et Michel
A HdF
Les chiffres que j’ai (travaux de Picketti) indique une stabilité autour de la répartition 1/3 2/3; au USA, on a plutôt du 70 – 30. Cela ne remet pas en cause ce que vous dites car il y a des fluctuations de plus court terme. C’est d’ailleurs pour cette raison que je parle de profits régulés. La régulation me semble, comme toujours, essentielle …
Michel
En effet, je calcule en ratios bruts, c’est-à-dire que je ne déduis pas les amortissements – qui constituent une charge considérable -.
Concernant le travailleur, qui a un salaire brut de 100, son employeur a payé 150 et il lui reste après fiscalité un pouvoir d’achat réel de 30. En fait, il va percevoir ensuite de la redistribution, y compris sous forme de services gratuits des administrations : l’école de ses enfants, le policier qui le verbalise pour un excès de vitesse … L’économie française est une économie de redistribution.
Mr A.B. Galiani, votre discours ici passe mal : Moulinex est passée à Alençon et Alençon a été repassée, et a libérée la femme alençonnaise.. : c’était la chute du premier employeur privé de la ville d’Alençon, d’autres entreprises sous-traitantes ont suivi : catastrophe économique, sociale, politique… . Il faut plusieurs années pour bâtir une entreprise et seulement quelques décisions discrétionnaires pour réduire à néant tout un bassin d’emploi.
cela fait 5 ans que les premières lettres de licenciement étaient envoyées aux salariés de Moulinex, triste anniversaire ! Un peu de décence et de mesure dans vos propos jeune homme!
Alençon , La Normandie se souvient et n’oublie pas!
http://www.solidarite-moulinex.c...
On exploite bien les salariés, les petits entrepreneurs, le citoyen et le contribuable.. Et nos entreprises meurt sous l’incompétence de grands dirigeants peu scrupuleux qu’intéressés par le profit non par l’humain et de politiciens s’affairant avec eux, qui de droite ou de gauche sont en train de ruiner le pays, et trop souvent manoeuvrent pour s’octroyer une part de richesses qu’ils n’ont pas contribué à créer, s’octroient de manière arbitraire des places indemnisées s’ils n’ont pas de portefeuille ou ne sont pas élus, personnes qui pourtant devraient faire leur boulot et créer dans notre pays, à Alençon et en Normandie un environnement favorable à la réussite des entrepreneurs, des acteurs économiques, sociaux, culturels !
Un peu de décence et de retenu que diable, jeune homme, arretez de donner des leçons de profit et d’ordre moral !
Pauvre France, Pauvre Normandie, Pauvre Alençon !
Alain Lambert, vous allez à contre courant… et j’aime bien ça.
Je vous soumets une démarche pas mal d’un de vos collègue.
Perben organise une rencontre avec les blogueurs lyonnais.
C’est une belle démarche
C’est sur http://www.perben.com
A Gem
Me voilà étrillé par Gem. Ceci dit, sans la liberté de blâmer …
Pourquoi ai-je pris 2004 ? Jusqu’à une date récente, je n’ avais pas ceux de 2005 dans leur intégralité et ça ne change rien à la démonstration.
Pourquoi ai-je pris l’EBE ? la raison est simple : c’est le premier indicateur de la rentabilité de l’exploitation d’une entreprise, puisqu’à ce stade, les salariés ont été rémunérés. Et pourquoi ai-je enlevé les sociétés financières et les entrepreneurs individuels ? pour simplifier : prendre les banques ne change rien à la démonstration sinon que le poste "intérêt" pour des raisons évidentes devient très important. Quant aux EI, leurs revenus sont à la fois une rémunération du capital et du travail.
Vous avez mis le doigt sur l’essentiel : mesurer le profit n’est pas simple. Et je n’ai pas déduit l’amortissement. Que les notions soient complexes, certes, mais je vous trouve bien sévère de me reprocher de vouloir tromper mon monde.
Il est certain qu’il est plus facile de condamner en vrac le profit à l’instar de l’article dont vous donnez l’accès. Il est clair que n’ayant pas perçu le rôle de financement des investissements joué par les profits, l’auteur (qui a quand même une légère teinte populiste, non ?) ne donne pas dans la dentelle.
On peut également se poser la question de savoir s’il y aura encore des investissements dès lors que la rentabilité de ces derniers devient nulle ? Ou, dit encore d’une autre façon, est qu’il existe des gens prêts à se lancer dans des projets économiques qui leur laisseraient seulement les pertes et aucun gain ? (pour les techniciens : cf. Keynes et l’efficacité marginale du capital). La Grande Bretagne de Callaghan a créé une tranche d’impôt à 98 % … On se souvient qu’ainsi son chômage a explosé à plus de 20 %.
Juste une précision qui a échappé à l’auteur de l’article d’Agora : sur les 177 milliards d’€, de dividendes, seuls 29 Mds sont versés aux ménages. Les autres sont versés aux entreprises (circulation intra groupe notamment). Mais pour être logique, il faudrait prendre aussi les intérêts et coupons d’obligations, qui comme les dividendes, rémunèrent les capitaux fournis … mais sont dus, même lorsque les entreprises sont déficitaires ! Peut être est ce simplement la fourniture de capitaux qui est condamnable ?
Analyse très pertinente, néanmoins j’ai tendance à considérer que si les entreprises font des profits énormes, c’est soit qu’elles sont très en avance par rapport à la concurrence (notamment grâce à l’investissement), soit qu’elles occupent un secteur très peu concurrentiel ou dans lequel la concurrence a été biaisée par la réglementation. Pour reprendre le titre de l’article, je considère que les profits des compagnies de distribution d’eau, par exemple, sont scandaleux, car, du fait de leur situation de quasi monopole, elles engrangent des profits colossaux aux dépends du consommateur qui n’en a pas pour son argent.
pour AB GALIANI et GEM
L’EBE est le meilleur indicateur pour une entreprise non financière ou non holding. Il mesure le revenu dégagé avant politique d’investissement et financière. Et au moins on sait ce qui se cache derrière alors que l’EBITDA anglo saxon est un agrégat extensible.Moi j’aime bien l’ETE(excédent de Trésorerie d’exploitation) car il mesure que revenu brut disponible.
benefice n’est pas trésorerire !!!!
Sur la notion de profit "sens littéraire du terme", il est indispensable
car le moteur des affaires.
Maintenant on peut gloser ou digresser.
la loi de la baisse tendancielle du taux de profit(non pas de Marx qui lui en a tiré une conclusion dialectique mais de Ricardo)
le profit sert aussi aux emplois de demain à l’autofinancement partiel ou total des investissements.
par contre il est vrai que les revenus du salaire se sont moins développés que les dividendes ces dernières annéesmais est ce anormal ? pas sûr
J’aimais bien un concept dans les années fin 70, celui des comptes de surplus(on voit la répartition entre les capitalistes(sens historique), les salariés, les fournisseurs.
moi ce qui me heurte le plus est le capitalisme boursier et financier aux dépends du capitalisme réel.
la destruction des actions pour faire remonter les cours, l’apologie du 15% annuel .les raiders qui attaquent et qui revendent à la déocupe comme dnas l’immobilier.
Pour moi la démonstration est si touffue, si peu compréhensible. Faîtes plus simple, cela doit être possible.
Le profit n’est pas condamnable en soit. Seule sa répartition pose problème.
Je vais faire très simple, en 1973, le salaire d’un PDG d’une grande entreprise était 27 fois le salaire moyen des salariés de l’entreprise en 2000 c’était 300 fois!
Carrefour cette année augmentation des salaires 1,7..%, augmentation des dividendes 17%, voila, les travailleurs pauvres.
A Contre Courant
Faire plus simple ! Délicat, car la notion est complexe … j’ai déjà beaucoup simplifié.
Ce n’est pas tellement la répartition du profit qui pose problème, mais celle de la valeur ajoutée. Les salaires sont liés à la productivité du travail … Il y a derrière la productivité la question du temps de travail et de la qualification, ce qui renvoie aussi à l’efficacité de notre système éducatif.
Comparer des augmentations de dividendes avec celles des salaires n’a de sens que sur une longue pèriode. En effet, les dividendes peuvent être à zéro une année… ce qui ne sera jamais le cas des salaires.
Concernant les rémunérations de certains grands patrons, je suis largement d’accord avec vous. Il y a manifestement un fort dysfonctionnement dans la régulation.
Allons, vous savez bien que le creusement des inégalités dans la répartition des richesses est une tendance lourde observable au niveau international.
Concurrence fiscale oblige, les moins-disant en matière d’inégalités sont irrésistiblement attirés dans l’orbite des mieux-disant. Sinon, comme on nous le serine, ici comme ailleurs, les fortunes fuient le pays.
A quelle logique a-t-on affaire dans un tel système de captation de la richesse par les plus performants et de leurs affidés au détriment des moins performants qui fournissent les armées de réserve de main-d’œuvre exploitable ou jetable selon les besoins des dominants.
Quelle est donc cette logique économique qui justifie la domination du faible par le fort au nom de l’efficience globale dont les progrès sont massivement captés par les dominants, comme il se doit dans un système policé seulement en apparence, par un de ces tours de passe-passe accomplis par ces prestigiditateurs que sont les économistes pétris de raisonnements sophistiqués (tiens je viens de découvrir la parenté entre sophistiqué et sophisme !!!) ?
Cela chauffe sur AgoraVox. Vous avez le génie pour mettre le feu !
voir :
http://www.agoravox.fr/article.p...
A Sophia,
Les choses sont infiniment plus complexes que votre credo ne les presente … Tout d’abord, la notion d’négalité est à définir et rien que ça. J’écrirai surement un billet là dessus un jour … Ensuite, il est interessant de savoir qui profite vraiment de la redistribution ; a cet égard, je vous renvoie à mon billet du 11 novembre ; c’est peut être là les vraies inégalités.
J’emet une remarque a propos des profits de certaines compagnies . Il y a en France une concurence dans la distribution de l’eau , 2 groupes et privé et un acteur local qu’est le maire . Si certaines compagnies de distribution d’eau sont prohibitives , c’est parce que :
Pour des raisons techniques :Parfois les captages sont eloignés du fait de la pollution
Pour des raisons de laissez faire . La concurence existe , mais certains signent sans la faire jouer pleinement . Il existe des syndicats communaux de production d’eau , et ceux ci etant dirigés par les maires peuvent fournir a un prix juste .
Le systeme a ete parfois perverti par certain pour financer leurs campagnes politiques .. Gros profit des compagnies d’eau , oui , mais grace au pots de vin versés .
Quant a l’essence , le gros des profits sont realisé par l’etat … Super profit rime plutot avec super impot .
C’est vrai que la renumeration de certains patrons a derivé .. mais c’ets l’affaire des conseils d’administration . Si les entreprises etaient davantage aux mains de petits actionnaires , la gestion serait plus juste .. De ce cote la , pourquoi l’etat est il encore actionnaire de si nombreuses sociétés .. il a fait preuve de son incompetence dans la gestion avec le credit Lyonnais .
Mr Gqliqni
Je me refuse a debattre de cela. Ces gens la qui ont fait deja un tort immense a la France sont si bas que je ne peux accepter de les rejoindre a leur niveau. Pauvre France
A Cl Picaut
Merci, cher ami bloggeur, d’enrichir le débat en lui donnant de la profondeur historique.
En effet, il y a chez Marx (ou plus exactement chez ses disciples) une loi d’airain, celle de la baisse tendancielle du taux de profit. Mais comme cette dernière n’a jamais été relevée durablement, les economistes marxistes en ont conclu a des phénomènes qui masquent la tendance. Forcement, puisque la perspective historique du capitalisme est de sombrer.
Chez Ricardo (le même que celui de l’effet ricardien), c’est plus un problème de marginalisme puisqu’il estime que le coût supplémentaire de chaque unité de travail nécessaire à la croissance de la production est lui-même croissant …
Je reconnais n’être pas rentré dans ces considérations. Pour être franc, je ne crois ni en l’une ni en l’autre.
Alors, à votre idée ?
A A.B. Galiani, votre intervention de lundi 20 novembre 2006 à 10:22
"Joseph Caillaux, l’inventeur de l’impôt sur le revenu, dont l’épouse avait "révolverisé" le patron du Figaro en 1914 – date à vérifier –
Monsieur Gaston Calmette est décédé le mardi 17 mars 1914 à minuit quinze.
Merci, Dab, pour cette précision.
Je dirai que Monsieur Calmette avait pour le moins manqué d’élégance en publiant les lettres que celle qui allait devenir Madame Caillaux écrivait à son futur mari.
les profits doivent servir aux remunerations des salariés et retraités,des actionnaires,aux consommateurs(baisses de prix),aux frais du pays qui met a disposition des moyens de travail aux entreprises et prend en charge bien des degats et consequenses de productions et d’inegalités sociales lié a leurs activités,aux charges des habitants qui autorisent et favorisent l’epanouissement des entreprises(formation,….), aux investissements et aux frais de recherches de nouveaux produits etc…Le probleme c’est le partage,les mieux placés et les plus forts se servant le mieux en dehors de toutes considerations economiques,de justice et d’avenir de l’entreprise et ses assujetis. l
Le probleme c’est le partage,les mieux placés et les plus forts se servant le mieux en dehors de toutes considerations economiques,de justice et d’avenir de l’entreprise et ses assujetis.
OK.
Commencez à appliquer vos bons principes.
Etalez tout ce que vous possédez,sauf votre cervelle, et on pourra commencer à se servir.
@AB Galiani et Cl Picaut
Mon propos visait surtout à pointer la difficulté, voire l’impossibilité, de la démarche.
A la réflexion, je pense qu’il aurait été possible de de simplifier grandement le propos : au lieu de partir de l’EBE, d’en exclure les flux financiers, puis d’en déduire les impôts et l’amortissement (avec à chaque fois la nécessaire explication du pourquoi mais avec une insupportable contrainte de quantité de texte…), pourquoi n’être pas parti, tout simplement, du résultat net qui correspond justement parfaitement à cette série d’opération ? fr.wikipedia.org/wiki/Sol…
Ou bien s’appuyer plus fortement sur les calculs intermédiaires de l’INSEE :
valeur ajoutée nette 2005 des sociétés : 795 Mds, salaires versés par elles : 605 Mds, auquel on doit ajouter 34 Mds de prestations sociales pour un total de 639 Mds soit 80 % de la VA nette ! Et elles ont, de plus, versés 41 Mds d’impôts à la production (subventions déduites) et 39 Mds d’autres impôts, soit encore 10% de la VA, ce qui laisse, si je compte bien, 76 Mds (9,5 % de la VA) pour les "profits".
Vous préférez prendre comme base la VA brute ? il faut ajouter 136 Mds ; le taux de profit monte alors à (76+136)/(795+136) soit 23%, dont 136 Mds (15% de la VA) doivent être réinvestit rien que pour maintenir le capital, ce qui laisse un profit réel de 76/931 = 8 % de la VA… (Pendant ce temps la part des salaires+ prestations descend aussi, à 639/931 = 69%)
Qui a dit que la baisse tandentielle du taux de profit était une légende ? Ca me semble au contraire une réalité bien observable ! Marx avait sans doute tort d’affirmer que ce taux atteindrait 0, mais déjà même pas 10% c’est bien peu.
J’ai appris hier la mort de Milton Friedmann "libertarien "de l’Ecole de Chicago.Je pense qu’il avait inspiré "L’Alliance pour le progrès" avec les "Peace Corps" du Président Kennedy.
A Gem,
Ah bon, car vous trouvez que c’est plus clair ? (sourire)
J’ai préféré faire la démarche de partir quasiment de la VA pour suivre la distribution …
Quant à la baisse tendancielle du taux de profit … en longue période elle est absente. La conception marxiste n’est pas scientifique au sens de Poppers, puisque lorsque la tendance n’est pas constatée, c’est la manifestation d’une contre tendance qui la masque.
Ce qui est interessant, c’est que finalement, vous arrivez à une conclusion assez proche de la mienne. Et
A Dab
Si je dois étaler ce que je possède pour que vous puissiez vous servir, je crains que vous soyiez déçu. Mais peut être m’offrez vous ainsi l’occasion de me débarrasser de ma vieille bagnole de 10 ans d’age.
Au demeurant, concernant ceux qui se servent, il faudrait parfois se rememorer ce que disait Nicolas Baverez sur l’appropriation des gains de productivité depuis le milieu des années 85 … et relisez aussi mon billet sur les mythes économiques. Vous trouverez quelques pistes de réflexion !
à A.B. Galiani,
Ah la fameuse compléxité elle a bon dos et elle est bien pratique pour confondre les foules ignorantes et les réduire au silence devant l’étendue du simplisme de leurs observations.
C’est oublier qu’il y a de nombreux économistes tout aussi érudits que ceux qui constituent votre libérale dream team qui soutiennent des thèses différentes voire opposées à celles que vous défendez.
A Béatrice,
Merci de nous rappeler cet évenement : quoique l’on pense de Milton Friedmann, il restera un des grands penseurs du XXe siècle, pour reprendre l’expression de Sorman. Une citation : "Ceux qui croient agir en fonction de l’intérêt général sont en réalité conduits à favoriser des intérêts particuliers qui ne font pas partie de leurs intentions".
Sur ce point au moins, je m’accorde avec lui.
A Béatrice,
Merci de nous rappeler cet évenement : quoique l’on pense de Milton Friedmann, il restera un des grands penseurs du XXe siècle, pour reprendre l’expression de Sorman. Une citation : "Ceux qui croient agir en fonction de l’intérêt général sont en réalité conduits à favoriser des intérêts particuliers qui ne font pas partie de leurs intentions".
Sur ce point au moins, je m’accorde avec lui.
à A.B Galiani,
"Mais peut être m’offrez vous ainsi l’occasion de me débarrasser de ma vieille bagnole de 10 ans d’age."
Dix ans pour une bagnole aujourd’hui ce n’est pas vieux.J’en possède trois :moyenne d’âge 14 ans! 365 chevaux DIN.
"relisez aussi mon billet sur les mythes économiques"
Pourrais-je avoir le lien ? Merci.
A Sophia,
Je ferai un jour un billet sur John Rawl et la théorie de la justice. J’y aborderai donc la question de l’égalité et de l’inégalité.
Que les forts aient tendance à profiter de leur force, sans doute ! Mais je me garderai bien d’assimiler les forts aux capitalistes (avides, c’est évident). A qui profite la redistribution (et nous sommes trés largement dans une économie de redistribution). Croyez vous que les chantres du tout public, de l’école unique et des monopoles soient des gens purement désinteréssés ? Lisez la citation de Friedmann que j’ai mis dans ma réponse à Béatrice …
Oui, Dab, le billet évoqué est sur ce même blog, à la date du 11 novembre … Et tant pis pour ma voiture, que vous ne jugez pas si vieille . Je la garde .
Voici un lien vers un article sur les Caillaux. http://www.herodote.net/histoire...
A Monsieur D., de Côte d’Or
Vous vous étonnez dans un message adressé directement à notre hôte, en termes fleuris, de l’absence de réponse qu’il devrait donner.
Donner à qui ? Voudriez vous qu’il réponde à chaque bloggeur, pour un billet que j’ai écrit et dont j’assume la responsabilité ? Le mode de fonctionnement des blogs en général et de celui d’Alain Lambert en particulier consiste à laisser les auteurs répondre directement. Vous comprendrez également que notre hôte a également ses propres engagements et ainsi, le partage des tâches contribue à faire vivre le blog. Vous conviendrez que je ne suis pas absent du débat, même s’il peut m’arriver parfois d’oublier certains bloggeurs, en raison de la volumétrie des réponses.
Dès lors que j’écris un billet dont je sais qu’il va à l’encontre des idées reçues, je m’engage dans le débat et participe à l’enrichissement mutuel. Je puis vous assurer que notre hôte est trés attaché à la qualité du dialogue et que c’est pour lui une forme de respect pour ceux qui partageant ou non ses idées contribuent à l’animation de ce site.
concernant la baisse du taux de profit, je considère que la seule erreur c’est de croire que le profit tend vers 0 : ce serait vrai dans une économie immortelle et parfaitement fluide, mais justement elle n’est ni l’une ni l’autre, puisqu’on ne profite d’une industrie que pendant un temps limité et qu’il faut un minimum de temps et d’efforts pour s’établir : ça laisse mécaniquement une marge minimum à ceux qui sont présents sur le marché (et une forte prime aux créateurs d’un marché, qui peuvent, au début, obtenir des rentabilités extraordinaires, mais ça ne dure pas pour eux…). La marge minimum dépend certainement des secteurs : quelque % pour les plus faciles d’accès, quelques dizaines de % ceux, tels que le luxe, où il est excessivement difficile de se faire une place.
Concernant la répartition de la VA, il me semble que nous différons essentiellement sur trois points
* la prise en compte de "la consommation de capital fixe" : je trouve plus simple de l’exclure des profits, vous préférez l’inclure pour en déduire ensuite l’investissement. Votre approche est plus complexe et ne me semble pas forcément plus juste
* la prise en compte des impôts : vous considérez qu’ils sont pris sur les profits, il me semble qu’ils doivent être comptabilisés à part (pris sur la VA d’ensemble). Votre approche est comptablement et fiscalement correcte (les impôts sont bien la dernière chose qu’on déduit pour obtenir le résultat net), mais elle me semble trompeuse, car elle implique que le niveau d’impôts n’a aucun impact sur les salaires ni l’investissement…
* l’oubli des prestations sociales (5% de la VA quand même !)
à AB Galiani,
"Croyez vous que les chantres du tout public, de l’école unique et des monopoles soient des gens purement désinteréssés ?"
Non, mais entre deux mots je choisis le moindre. Je fais une différence entre des intérêts catégoriels qui profitent à de smillions de personnes et concourent à une certaine organisation de la société dont je n’ai pas toujours à me plaindre, loin s’en faut, et la captation légale de richesses considérables par une minorité avec la complicité de ses affidés qui espèrent qu’un jour viendra où ce sera leur tour de manger dans la gamelle.
Le système que vous préconisez est certes très efficient pour créer des richesses, mais c ‘est au prix de la compétition entre les individus qui attribue une prime disproportionnée aux plus performants !
Nous sommes certes encore dans une économie où la redistribution fonctionne encore dns une certaine mesure ; mais elle est de plus en plus contestée par la tendance lourde au darwinisme social.
Les rapports induits par la concurrence libre et non faussée entre les individus génère des comportements de plus en plus individualistes où les plus adaptables tirent très bien leur épingle du jeu ! D’autres débordant d’enthousiasme, mûs par une foi incandescente dans un avenir qui s’offre à leur ambition, veulent les imiter. Les autres servent de variables d’ajustement. Ils sont les sacrifiés.
Et les sacrifiés ne sont pas forcément les entrants, cet autre sophisme qui donne à croire que les affres de la précarité se dissiperaient à mesure que vous prenez de l’expérience. Mais ces propos qui se veulent apaisants, rassurants, relèvent de la prédiction de circonstance, de la psychologie sociale. Ils cherchent à rendre acceptable le délitement social engendré par un système qui porte en lui le germe de la destruction de la société en érodant méthodiquement les mécanismes de régulation socio-économiques pour faire place nette au libre jeu de la concurrence où l’individu performant selon les critères de l’efficience économique et à l’exception de toute autre considération ne relevant pas de la liberté individuelle, peut donner la pleine dimension de ses talents et donner libre cours au prédateur en lui.
Comme tout un chacun, vous êtes lié dans votre raisonnement par votre croyance dans la supériorité théorique d’un modèle dont la face visible laisse paraître un considérable accroissement de la richesse global. En revanche, la face cachée et inexplorée, les fondations de l’ensemble, succombe à l’attaque de la corrosion. La rouille est une menace sournoise, qui ronge lentement le corps auquel elle s’attaque sans faire de bruit.
Chère Sophia,
Je crains que votre ire ne vous conduise à négliger les leçons de l’Histoire. J’avais, il y a quelques temps, analysé les raisons pour lesquelles la France n’était pas une sociale démocratie et j’expliquais que c’était simplement parce que elle a sombré dans le corporatisme.
Je tiens à vous rappeler que les ménages perçoivent 29 milliards de dividendes. Il ne faut donc pas hurler à l’hémorragie, d’autant que ces flux rémunèrent une prise de risque.
Je me souviens de François Mitterand en 84, me semble-t-il, qui après avoir tapé sur les entreprises, a découvert que c’était elles qui créaient les emplois, et que sans capitaliste preneur de risque, plus d’investissement et plus d’emploi. Rappelez vous le sort funeste de l’ex Union Soviétique ou celui de la Grande Bretagne de Callaghan qui a découragé l’investissement en créant des tranches d’impôt à 98 % . Résultat : chômage porté à plus de 20 %.
Le premier responsable de la pauvreté en France est l’Etat. Le système éducatif, hérité de Jules Ferry, élimine à tour de bras.
Avec les 35 heures – soit dans un premier temps une réduction de la productivité de 10 % – a pénalisé la France qui a moins réduit son chômage que le reste de la CEE : manque à gagner de 150 000 emplois. La Suède, en réformant son Etat, ses retraites, sa fonction publique, a réduit son chômage de 1 million de personne tout en conservant un haut niveau de vie.
Pour aller jusqu’au bout de la réflexion, je parle d’une régulation des profits, car à la différence des rentes que vous défendez et qui sont la cause première de la pauvreté, ces profits ont un rôle économique. Le partage de la valeur ajoutée peut se discuter, et je pense pour cela à une nécessaire politique contractuelle, telle que le définissait André Bergeron … Encore faut il sortir du principe de relations sociales nécessairement conflictuelles et du mythe de l’Etat désinteréssé – car s’il y a aujourd’hui du darwinisme social, c’est bien au travers du mythe hégélien du service public, réservé à l’élite de la nation, pour le service de l’interet général -.
Quant à mon modèle de référence, chère Sophia, cherchez les, justement mes références. La famille libérale est vaste et comporte des écoles contradictoires, mais regardez quels sont mes auteurs cités, mes pays de référence, les ouvrages évoqués …
Ami Gem,
Si vous ne croyez pas que le profit arrive à 0, alors vous n’êtes pas adepte de la baisse tendancielle, mais plutot de la stabilité du tx de profit, autour d’un niveau d’équilibre. Ce n’est donc pas trés loin de la répartition que j’évoquais plus haut. Votre explication, au demeurant, est des plus interessantes.
Concernant mon approche, est on si éloigné ?
– j’ai calculé en valeur brute, comme le font d’ailleurs le plus souvent les comptables nationaux, dont j’ai d’ailleurs suivi la logique ; le PIB est hors amortissement par exemple. Il est clair que la prise en compte de l’amortissement ramène le profit à "quia" ; si je considere que le profit inclut les dividendes versés aux ménages, il reste aprés amortissement env 38 milliards … Il n’y a pas là matière à augmenter substanciellement les salaires et sa "confiscat ion" suffirait à tuer l’investissement et l’emploi. En revanche, l’investissement est qq part une utilisation faite du profit. L’investissement dépend à mon sens de 2 variables : la rentabilité attendue (principe de l’efficacité marginale du capital, selon Keynes) et la possibilité de lever des capitaux pour financer : profit, appel aux actionnaires (ces derniers répondant d’autant plus facilement qu’ils reçoivent des dividendes) ;
– l’impôt sur les sociétés participe du partage des profits. La gauche en 81 a d’ailleurs découvert que lorsqu’on l’augmentait, les entreprises investissaient moins.
– Pour le 3eme point, parlez vous des cotisations sociales payées ? je les ai incluses dans le coût du travail.
à AB Galliani
Merci pour vos réponses.
L’ire que vous m’attribuez n’est pas la cause de ma prose car je ne sens pas en moi le flot tumultueux de la colère.
En revanche, ma dénonciation de la tendance libérale que vous incarnez est déterminée et ferme.
Je ne suis pas pour l’immobilisme. Mais je ne suis pas pour autant prèt à suivre le mouvement de l’hyper compétition où les plus démunis, qui se comptent par millions, sont immanquablement sacrifiés. Observons ce qui se passe aux Etats-Unis où l’assistance est laissée aux bons soins des âmes charitables. Et les Britanniques ne font guère mieux.
Quand j’entends les caciques de la droite, et d’ailleurs, fustiger les 35 heures, je suis écœuré car personnellement je suis un bénéficiaire des 35 h ; l’emploi que j’occupe a été créé suite à la loi de réduction du temps de travail et j’apprécie au combien le temps ainsi libéré pour m’adonner à des activités de mon choix.
Le point pivot de ma réflexion se situe ici : non pas dans la quête du toujours plus de revenus, mais dans le plaisir du travail bien fait au service d’une société qui prend en considération mes aspirations essentielles à un bien-être existentiel empruntant à la sobriété et à la liberté de disposer de mon temps pour me livrer à des activités plus gratifiantes car plus créatives que ce que je peux ccomplir dans le cadre de mon emploi.
Et cette approche qui est la mienne relève autant de la conduite individuelle de ma propre existence que d’un choix de vie se confrontant au domaine du politique.
Votre approche politique est trop soumise à l’économie comme grande ordonnatrice de nos sociétés (communautés humaines). Cette vision est notoirement insatisfaisante. Encore une fois, ça fonctionne pour les meilleurs, mais par delà les résultats économiques qui en mettent globalement plein la vue, ce modèle de production créé énormément de disparités, de souffrance.
Le véritable progrés social, tel que je le conçois, consiste à permettre aux gens de vivre mieux avec les ressources actuelles.
Par exemple, je ne demande pas à ce que mon espérance de vie soit prolongée, je ne demande pas plus de confort dans mon automobile, plus de sécurité, plus de nanotechnologies, plus d’OGM, plus de transports en avion.
Je dispose du minimum pour exercer dignement ma liberté et je puis m’en satisfaire. Améliorer l’ordinaire? pourquoi pas. MAis pas à n’importe quel prix.
Cette société qui subordonne tout à l’économique est une société névrosée.
Notre organisation actuelle peut changer et elle changera. Les résistances planétaires actuelles à la mondialisation financière traduise le désir de chercher à transformer les rapports socio-économiques qui déterminent les lignes de force qui traversent et organisent les groupements humains.
L’avenir cherche à s’inventer. Le sgens ne savent pas forcément ce qu’ils veulent avec précision. Je ne prétends pas qu’il existe une solution clé en main. Mais beaucoup de gens savent plus ou moins nettement le monde dont ils ne veulent pas. Et celui que vous voulez justifier avec votre théorie économique n’offre pas les garanties de solidarité et de sagesse dont le besoin se fait sentir chez des dizaines de millions d’individus.
Et ne me répliquez pas que le communisme est sans avenir, que les corporatismes avancent masqués. Je suis conscient de ces réalités ainsi que la plupart de mes semblables. Et alors ? Est-ce parce que les chercheurs ne trouvent pas au premier coup, ni au deuxième, ni au troisième qu’ils abdiquent ? Au contraire, ils se servent de ce qui n’a pas marché pour faire progresser leur recherche…
En effet, Sylvia, nous accédons au domaine des choix philosophiques, pour lesquels, je crains, il ne puisse y avoir de vérités incontestables et intangibles. Encore que j’aurais tendance à croire qu’une société immobile – car votre conception telle que vous l’exposez est celle d’un immobilisme très conservateur – est une société qui meurt. Mais c’est de l’ordre de la conviction.
A l’exception des 35 heures, qui restent encore du domaine de l’économiste, et je maintiens ma position ! Bien que vous affirmiez avoir bénéficié d’un emploi grâce aux 35 heures, globalement cette politique a été néfaste : elle a éliminé les plus fragiles. Et la France de 96 à 2002 est un pays qui a été parmi les moins performants en création d’emplois.
Les faits sont têtus, disait Lénine (vous voyez, je suis éclectique dans mes références) : la France est un pays avec le niveau de dépenses publiques parmi les plus élevés du monde (peut être plus que les pays nordiques), c’est un pays où la redistribution est forte (60 % du revenus des ménages, en comptant les services gratuits des administrations vient de la redistribution), c’est un pays où l’on travaille le moins. Pardonnez moi, mais s’il faut chercher la cause de la pauvreté, c’est dans le manque d’efficience de certains choix …
On peut se mettre à taper sur les profits, mais il faudra être logique : pour les raisons évoquées à un autre bloggeur, on cessera d’investir, et le niveau de vie baissera. Je sais, cela ne vous ennuie pas. Ce sont vos convictions. Ceci dit, vous n’aurez pas lutté contre la pauvreté, puisque tout le monde se trouvera appauvri. C’est un choix ! mais en même temps, vous aurez maintenu, voire renforcé une France à deux vitesses, entre celle qui cumule toute les sécurités, et celle qui crée les richesses. Vous n’aurez jamais que reconstitué la société d’ancien régime.
Puisque vous me prêtez des convictions qui ne sont pas les miennes, sachez que je crois en la régulation, laquelle passe aussi par la concurrence, c’est-à-dire en des mécanismes qui corrigent le dysfonctionnement. Aujourd’hui, l’Etat a grippé ces mécanismes parce que certains groupes sociaux se le sont appropriés. Et quand vous dites que les gens savent ce dont ils ne veulent pas, je peux vous donner raison, mais ce n’est pas forcement une société meilleure et plus juste.
Il y la société , je suis content , je ne souhaite rien de plus , celle de Sophia . C’ets le bonheur , a condition que chacun vive sa vie comme cela et que la population reste la meme .
Et il ya la vie , ou la population du monde croit , ou le systeme agraire d’il y a 100 ans n’aurait pas pu nourir la population actuelle .. Il a bien fallu faire plus , pour la cas ou , pour assurer l’avenir . Chacun fait des economie pour sa retraite , il nous faut individuellement faire du profit pour vivre .
Alors il est normal qu’une entreprise fasse de meme , pour s’affranchir d’une mauvaise conjecture , ou pour se reconvertir dans une nouvelle technologie .
Entre le Status Quo et l’evolution , la nature a tranché , elle colonise le monde , elle utilise toutes les ressources disponibles ..Le profit est naturel pour avoir un avenir .
Bien sur , une consommation trop exagéré" ou non controlée ammene a des réductions futures .. tout comme un profit trop grand ammene les clients a aller voir ailleurs . La verité c’est l’equilibre , ou plutot la limite de stabilité du système .
Cher Ornais,
J’apprécie toujours vos interventions. D’abord parce qu’elles savent moderer les interventions. Mais surtout, vous avez la qualité de savoir ramener sur terre et de rappeler parfois de solides evidences.
Ce qui me paraît essentiel, c’est de rémunérer chacun en fonction de son mérite. Mais déterminer la valeur, " le prix " du mérite, est bien difficile !
Pour être libéral, pour avoir été salarié puis " Entrepreneur ", maintenant en retraite après une vie de 50 ans de travail, je pense que la rémunération de certains dépasse la valeur, " le prix " de leurs mérite. Je pense à toutes les " célébrités" : Sportifs, artistes de tout poil qui tirent au surplus partie de leurs cachets de leurs passages répétés à la télévision (pour la réception de laquelle tous les Français paient une redevance) grâce à la complicité de leurs copains animateurs eux aussi grassement payés. Je pense aussi, mais dans une moindre mesure, aux Dirigeants de grosses Sociétés dont les salaires et avantages de toute nature sont manifestement exagérés. Pourtant ce sont toutes ces personnes qui sont glorifiées, honorées dans notre Pays !
Mais il est vrai que chacun est libre d’assister ou non aux spectacles et manifestations de nos " vedettes ".
@ A.B. Galiani :
C’est un plaisir de vous lire. Vos interventions sont toujours limpides, documentées et agréables à lire.
Cela dit, je voudrais rectifier une erreur.
Vous affirmez plus haut :
« Regardez les seules retraites des fonctionnaires d’Etat : elles sont financées à hauteur de 60 % par le contribuable ».
Ce n’est pas exact.
En fait ce n’est pas 60, mais 100% que financent les contribuables.
Comment les fonctionnaires pourraient-ils financer une partie de leur retraite, puisque ce sont déjà les contribuables qui assurent leurs salaires ?
En réalité, ce sont les contribuables qui assurent l’intégralité des salaires, des charges et des retraites des fonctionnaires.
Ces derniers remplissant une fonction au service de ceux qui les paient, et que l’on appelle des contribuables, qui de fait sont leurs employeurs.
Mais, que l’on ne me prête pas de mauvaises intentions, la moitié d’entre eux remplissent une fonction utile et nécessaire à ceux qui les paient. Les autres, constituant une charge financière sans utilité à ceux qui les paient.
Merci, cher ami Contribuable …
Mais pinaillons sur un point de détail : vous me dites que de toute façon les fonctionnaires sont payés par l’Etat. Je peux vous retorquer qu’une partie des recettes publiques est non fiscales. Ainsi, les dépenses publiques sont de l’ordre de 53 % du PIB, les prelevements obligatoires de l’ordre de 44 %. Mais le déficit public n’est lui que de l’ordre de 3 % en raison de ces recettes non fiscales. par ailleurs, le chiffre que j’évoque plus haut ne concerne que les fonctionnaires d’Etat. Le regime des fonctionnaires territoriaux fonctionne avec des charges employeur trés supérieures à celles du règime général – ce qui au final revient au même, tandis que les cotisations "employés" sont trés en deça de celles du régime général.
Primo : Ce chiffre de 60 % correspond au déficit que subirait une caisse de retraite des fonctionnaires d’Etat, si elle existait !
Deuxio : je considère que les charges y compris "employeurs" sont du salaires payés par le salarié puis reversé. Dans cet optique les cotisations sont donc bien payés par les salariés ;
Tertio : ces 60 % portent officiellement le doux nom de "cotisations fictives".
On comprend également pourquoi les syndicats de fonctionnaires parlent toujours en rémunération nette et non en rémunération "chargée". C’est dommage car ces dernières correspondent à ce qui est reellement payé !
@ A.B. Galiani
Merci pour la réponse, et permettez-moi d’y faire quelques commentaires.
Au sujet des recettes non fiscales :
Cela veut dire en clair qu’une partie de la sphère publique se livre à des activités marchandes, qui produisent des recettes qui ne sont pas fiscales.
Ce qui n’est pas normal, ce n’est pas son rôle.
Les activités marchandes n’ont pas à être dans la sphère publique.
Etre payé par les contribuables et se livrer à des activités marchandes. Il y a là une confusion des genres que je trouve assez malsaine.
Pour votre réponse humoristique sur la caisse de retraite :
La caisse de retraite des fonctionnaires ? En fait, elle existe parfaitement.
Elle se trouve précisément dans la poche des contribuables. Ces derniers en savent quelque chose.
A ce sujet, je voudrais vous faire part d’une question qui peut faire débat.
Comment se fait-il, que les contribuables paient aux fonctionnaires des retraites auxquelles n’ont pas droit eux même (que ce soit en montant, comme en durée), et ce, malgré les multiples reformes des modes de financement ?
François de Closet, qui ne peut pas être franchement taxé de « droite », a fourni dans son dernier bouquin des statistiques extrêmement intéressantes.
Il y apparaît que 1/3 de retraités, consomment 2/3 du budget global des retraites, et comme par hasard ce sont des fonctionnaires, tout simplement parce qu’ils restent en retraite deux fois plus longtemps que ceux qui la leur paie. Intéressant, non ?