En cette fin de soirée, nous avons enregistré l’émission de Jean-Marc Sylvestre sur LCI « Le Club de l’Economie ». La diffusion est demain jeudi à 10h10, 14h10 et 0h00. Avec ses invités : Erik Izraelewicz, Christian Saint Etienne, et Philippe Chalmin, nous avons tranquillement débattu de plusieurs sujets et notamment de celui devenu classique du « patriotisme économique », appliqué à la question d’actualité, celle de la Sogerma dont EADS a d’abord annoncé la fermeture avant d’égrainer maintenant le maintien d’un certain nombre d’emplois.
Je ne m’habitue toujours pas à ce concept, (à moins que ce ne soit un slogan) du « patriotisme économique ». Il ressemble à une comptine que l’on chante aux enfants pour les endormir. L’agitation, la communication fébrile des pouvoirs publics voulant faire croire aux Français que ce sont eux qui créent, qui décident en dernier ressort de l’avenir des emplois me met mal à l’aise. Car c’est faux et c’est dangereux. Faux, car, en économie de marché, les décideurs politiques n’ont que peu d’influence sur la création d’emplois, sauf en menant une politique favorisant la croissance économique. Et dangereux, car c’est accroître encore la croyance folle qu’ont nos compatriotes dans les vertus de l’économie administrée et dans la capacité des gouvernants à faire ou défaire l’emploi. Non les gouvernements n’ont pas pouvoir de vie et de mort sur les emplois ! Et rien n’est pire que de le faire croire ! Nous finirons par être les seuls au monde à vivre dans cette terrible illusion. J’espère donc que cesseront ces moulinets de bras (ou de verbe) qui sont d’un autre âge et qui déconcertent nos compatriotes parfois douloureusement touchés.
Disons-le sans ambages, ce qui compte :
- c’est que des emplois soient crées sur notre territoire. (Que les capitaux soient étrangers ou français – que les dirigeants soient noirs, blancs ou jaunes).
- Attirons les capitaux étrangers. Ils créeront des emplois. Jouons nos atouts : des infrastructures de qualité – une main d’oeuvre très qualifiée – une démographie dynamique – un système bancaire et financier parmi les meilleurs.
- Cessons de diaboliser la mondialisation. Elle est une chance. Elle serait un handicap si nous continuions à nous dresser, à nous-même, des handicaps inutiles : comme notre marché du travail si complexe et si peu flexible.
- Otons la camisole de contraintes administratives, fiscales, juridiques, sociales que nous avons passé à tout entrepreneur qui investit, risque, réussit.
- L’heure n’est pas au repli, ni au « patriotisme économique » folklorique, mais à l’offensive, aux adaptations, à la conquête. Au travail qu’il faut encourager et récompenser.
- Cessons de vouloir convertir le monde à notre modèle. On fait rire de nous ! Prenons le monde, tel qu’il est, et investissons-nous pour l’enrichir de nos valeurs, c’est le seul moyen pour que notre voix soit mieux entendue.
la question du patriotisme économique semble bien franco française!ailleurs on dépense son énergie à se battre dans la compétition mondiale et non à vouloir ériger des murs qui s’avère être des lignes maginot ! oui les entreprises attendent désespérément qu’on leur ôte la camisole .dans des conditions favorables,elles sauront céer des emplois.des vrais!
Mr Lambert,
vous avez raison dans l’exposé
mais rares sont les politiciens qui harmonisent déclarations et action
Monsieur Sarkosy a fait preuve d’autant de "patriotisme économique"
que les autres ministres des finances lorsqu’il fut brièvement à Bercy
Monsieur Breton a agit de même: voir Gaz de France/SUEZ…
Les examples de résistance à la fibre du patriotisme économique
sont très rares… Pouvez-vous en citer quelque uns ?
Mais, il ne faut pas se leurrer, tous les pays font du patriotisme économique. De la Chine aux Etats-Unis ! Les plus puissants et les plus avancés font du capital risque économique dans des domaines qui intéressent l’Etat. Mais, le rôle de l’Etat, c’est avant tout de redonner le goût aux entrepreneurs d’entreprendre, de les aider, de redonner la place au travail pour tout le monde.
Nous sortons d’un système presque soviétique, il y a encore du chemin à faire. Mais pour mettre en place un autre système, cela mettra des années. Il faut que de nouvelles structures se créent, s’associent pour devenir plus grosses et apportent une alternative à ce qui existe déjà.
Il y a plein de choses à faire en France, comme par exemple désengorger Paris qui crée trop de malheureux stressés et des problèmes de logements. Nous manquons d’un continuum économique comme ont su très bien le réaliser les Pays-Bas. C’est un peu l’idée des pôles de compétitivités qui ont été récemment lancés et qui j’espère permettrons à tous les acteurs de se l’approprier la dynamique.
Aujourd’hui, nous devons raisonner global et marché européen en premier.
Le plus grand souci à mon avis reste la volatilité et le manque de pérénité dans les investissements industriels sur le moyen et long terme. Tous nos jeunes brillants en commerce et en finance n’apprennent qu’à faire des "coups". Si j’emprunte pour acheter cette société, que je fusionne les deux, je peux déduire des impôts les intérêts de l’emprunt, je revends celle-là, je gagne x et j’achête ma maison à Hawai.
Il y a décorellation entre la logique financière et la logique industrielle et humaine. La valeur d’une entreprise n’est pas uniquement financière, elle est également humaine : c’est l’association d’individus aux compétences précises, avec parfois des années d’expériences uniques sur des domaines bien particuliers qui font la valeur de l’entreprise. On m’avait dit que les hommes passent, mais que les institutions restent, je suis de plus en plus convaincu qu’il n’est de valeur que d’hommes et que pour valoriser une entreprise, en plus de son bilan, il faut prendre en compte sa compétence humaine.
Pour en revenir au patriotisme économiqe, avons-nous les moyens d’infléchir l’activité du marché avec nos investissements publics, non : ce serait un raisonnement équivalent a celui qui avait été tenu par ce trader de la Barrings : influencer le marché avec l’investissement de tout son capital. C’est la faillite assurée.
Faut-il un interventionisme étatique dans l’activité industrielle ? Définissons ce que l’on appelle interventionisme au préalable. Mais, je dirais oui, sauf dans certains domaines.
Avons-nous les moyens de redynamiser le pays ? Il est déjà très dynamique dans certains domaines, il faut l’aider à se battre.
Pour vous donner un petit exemple du patriotisme économique, j’ai moi-même vecu le cas d’une société française qui a inventée un concept novateur en 1992 de sécurisation des transactions Internet. Les fonds d’investissement dans le domaine en France étaient nuls. La France a "découvert" Internet bien plus tard, vers 94 environ.
Cette société a donc été présenter son idée lors de conférences aux Etats-Unis pour trouver des investisseurs. A la fin de la conférence, un représentant du gouvernement a convoqué tous les industriels présents dans la salle et a dit : "Comment cela ce fait-il que nous n’ayons pas déjà ce produit aux US ? Je lance la semaine prochaîne une consultation publique pour qu’un industriel américain réalise la même chose." La société française a perdue toute chance de s’implanter aux US. Les US ont lancer la première société dans le domaine qui est devenue l’une des leaders mondiale.
La stratégie américaine est une stratégie de dominant : elle a besoin, pour rester leader, de concentrer toutes les nouvelles idées pour lancer ses produits, qui, boostées par le marché intérieur, innondent la planête.
Et, si le français est en majorité anti-américain car les américains sont des concurrents idéologique qui veulent sauver le monde à notre place, et que cela n’est pas acceptable par notre grand pays qui veut faire de ses valeurs des valeurs universelles, il faut tout de même constater que le système fonctionne quand même mieux chez eux et qu’ils n’ont pas l’air, dans leur grande majorité, malheureux.
Alors je pense que l’on peut débattre sur la manière de le faire du patriotisme économique, mais que cela revient à poser la question : quelle politique industrielle ?
Le refus de la mondialisation et l’antiliberaliralisme hysterique sont le fait de grands feodaux qui refusent de perdre les privilèges qu’ils ont obtenus sur une collectivité "captive". La nouveaité, l’étranger sont dangereux car remettant en cause ces privilèges. L’antimondialisme est un nouveau visage de la xenophobie et du racisme comme ATTAC est un nouveau visage de l’extrême-droite.
Comme je serai dans le train à ce moment là ou dans un endroit sans le cable, je remercie l’âme charitable qui voudra bien m’adresser le fichier de l’enregistrement. Merci d’avance. Fidèlement, AL.
@Mon ami Djiheldé dont j’étais certain qu’il allait réagir,
Nous ne pouvons pas refuser la mondialisation, c’est un fait incontournable et un atout pour nous. Si l’on étudie les grosses structures étatiques nationales, on voit assez rapidement que du libéralisme ferait du bien. Je vois les difficultés qu’a la SNCF pour mettre en place un management par objectifs, je vois le retard irréversible que la France a pris dans le domaine du transport maritime en laissant à Rotterdam ce que le Havre aurait pu assurer.
Cependant, il faut bien étudier la stratégie politique pour y parvenir.
Il y a quelques temps les chinois ont essayé et réussi à racheter un de nos fleurons du luxe, domaine dans lequel la France a une réelle ressource : Marionneau. Nous avons joué la transparence et l’opération a été réalisée. Fair play les français.
Dans le même temps, la Société Générale, grande banque française, cherche à racheter une petite banque chinoise. C’est un véto complet des autorités chinoises.
Le libéralisme complet n’existe pas aujourd’hui sur la planète. Il faut composer.
Alors, oui à la mondialisation, oui au libéralisme économique, mais sur le plan politique économique, du pragmatisme et de la stratégie, une vision à moyen et long terme.
Cher Mr le ministre,
je suis très heureux de constater que des hommes politiques de droite restent lucides sur l’économie.
Le patriotisme économique est d’abord une manière de masquer l’impuissance des pouvoirs publics face au déclin de la france ou, en tout cas, face à son chômage endémique. Ensuite c’est une manière de signifier que les problèmes français viennent de l’extérieur et non de l’intérieur. Que ce soit vrai ou faux, ce que je sais, c’est que dans ce contexte de mondialisation, des pays occidentaux s’en sortent plutôt bien, sans pour autant être "anti sociaux" (pays scandinaves, canada, pays bas…).
Ensuite faisons attention aux répercussions que cela peut avoir sur les affaires de nos grandes entreprises françaises (d’ailleurs plus si française que ça) qui sont insérées dans l’économie mondiale. J’avais été particulièrement choqué par la réaction du gouvernement lorsque Mittal a annoncé son intérêt pour Arcelor, alors qu’Arcelor venait de racheté le canadien Dafasco. Si nous nous comportons ainsi avec les entreprises étrangères, les entreprises du CAC40 se verrons peut être bientôt mettre des bâtons dans les roues à l’étranger.
Enfin, ce genre de sujet montre bien qu’il n’y a pas une droite française, mais des droites, en fait les conservateurs et les libéraux. Pourquoi ne pas faire une scission entre les 2 tendances à l’UMP. Après tout, la formation d’un parti unique n’a pas été jusqu’à présent électoralement payante.
Cher M. Lambert, vous nous assénez vos certitudes avec une assurance qui frole l’irresponsabilité. A l’appui de vos croyances, pourriez-vous citer le cas de quelques pays où les pratiques que vous préconisez se traduisent par une franche réussite ?
Il serait utile de prévoir un lien RSS vers les commentaires de vos billets. Merci.
Il est 16h00. Je vais essayer d’enregistrer à 0h00. Je vous informe demain.
@ "Annabelle Penthésilée": tout est question de "niveau de patriotisme"
en restant en EUROPE la france est vraiment le "très mauvais élève"
des examples de zèle patriotique économique français:
-EDF rachete dans toute l’europe conformement aux traités européens
(y compris à Londres ou EDF possède London Electricity…)
mais EDF s’accroche "irrégulièrement" a son monopole…
-SUEZ et LYONNAISE rachètent dans toute l’europe conformement aux traités européens
(y compris à Londres ou lun d’eux possède ONYX qui ramasse les déchêts)
en France GDF s’interpose de manière "discutable" au rachat de SUEZ…
La liste est longue si l’on rajoute Alstom, Arcelor, Credit-LYONNAIS, Sanofi,…etc…
En ce qui concerne MARIONNAUD vous "désinformez" involontairement…
en fait MARIONNAUD n’était plus un fleuron mais une DECONFITURE quasi frauduleuse
(voir les archives de presse ci dessous) Marcel Frydman et BERCY n’ayant pu convaincre
AUCUN repreneur français (LVMH, PPR..) ou européen (Prada, Richemont,…)
Mr Frydman a été bien heureux de céder au Chinois Li Ka Shing
qui a sauvé des emplois français que aucun groupe français ne voulait sauver…
Mr Li Ka Shing est très francophile et bienfaiteur d’institutions culturelles françaises…
MARIONNAUD. extrait des archives du quotidien Les Echos
Marionnaud : l’arrêt de la logistique déclenche une première grève [24/03/2006 – 94 mots]
Marionnaud restructure sa logistique en supprimant 250 emplois [17/02/2006 – 502 mots]
Parfums : LVMH et Coty victimes des trafics chez Marionnaud [10/11/2005 – 504 mots]
PPR a payé un informateur pour remonter la filière [10/11/2005 – 169 mots]
Le groupe Marionnaud visé par deux enquêtes judiciaires [07/11/2005 – 115 mots]
Marionnaud : l’ex-PDG Marcel Frydman plaide la « bonne foi » [18/10/2005 – 128 mots]
Marionnaud : l’AMF accuse l’ex-PDG de fraude [13/10/2005 – 718 mots]
Marcel Frydman reconnaît « une erreur » [13/10/2005 – 72 mots]
@ "Annabelle Penthésilée" après…
le patriotisme économique français "mal placé" et de + en + "anti-européen" laissant tomber Marionnaud fleuron déchu "oublié" par notre establishment, sauvé in-extremis par LiKaShing,
je ne partage pas votre vision des USA connaissant bien au moins deux CONTRE-EXAMPLES
de société "hi-tech" françaises qui se sont bien developpées grace aux investisseurs US:
-ILOG (côtée au NASDAQ),
-BusinessObjects (aussi côtée au NASDAQ),
je ne compte plus les entrepreneurs français ayant vainement cherché des capitaux en France
qui en désespoir de cause se sont expatriés et ont trouvé des capitaux en GB et/ou aux USA
parmi lesquels les fondateurs de eBay et de 3COM et même Mr Jean-Louis Gassée (BE, inc.)
Je suis entièrement d’accord avec vous jpp, tout est question de définition et de niveau d’intervention. Ces grands groupes ont tout intérêt à conserver leurs monopoles pour s’en servir de générateur de cash pour financer d’autres activités ou s’enrichir. C’est là que l’Etat et l’Europe peuvent intervenir pour générer de la concurrence.
Je ne savais pas pour Marionnaud, merci pour ces précisions.
@ "Annabelle Penthésilée"
que pensez-vous du patriotisme économique
qui dans le cas d’Arcelor va donner la préférence
à un "deal" privé avec un oligarque RUSSE
plutot qu’a une OPA dans les règles de l’art ?
video du club de l’économie
Débat sur LCI le 25 mai 2006
Bravo à Christian Bois d’avoir mis en ligne l’émission. C’est top !
Monsieur le Sénateur,
Comme promis dans mon commentaire à votre article sur le club de l’Economie, j’ai enregistré cette émission.
Au montage j’ai supprimé les informations, la publicité et la méteo, mais le fichier faisait encore plus de 150 MO (maximum admis par dailymotion.com). J’ai donc converti le fichier dans une définition moins bonne en divx mais le résultat est un peu décevant, regardable néanmoins. J’ai fait un article, consacré à cette émission, sur mon blog. Restait à trouver la façon de faire un trackback sur votre blog. C’est fait et vous l’avez accepté. Petit à petit j’apprends.
Je tiens à votre disposition un fichier de l’enregistrement complet au format mpeg2 ou divx, de bien meilleure définition.
Merci à Christian Bois pour son enregistrement.
@jpp
"que pensez-vous du patriotisme économique qui dans le cas d’Arcelor va donner la préférence
à un "deal" privé avec un oligarque RUSSE plutot qu’a une OPA dans les règles de l’art ?"
L’économie est faite de beaucoup de "deals" privé, nous ne pouvons les fustiger.
Mettons de côté la politique actuelle en matière de gestion du patriotisme économique. Nous n’en sommes qu’aux balbutiements qui s’apparentent plus à nos yeux à un interventionisme déplacé.
Cependant, je vois que cette vente à un oligarque Russe vous dérange, c’est donc qu’il y a des cas ou les "deals" vont au delà de ce que nous français voulons accepter.
Faire la liste de ce que nous n’acceptons pas est un début de politique économique.
@ Annabelle Penthésilée
c n’est pas "l’oligarque Russe" qui me dérangé
mais le fait que nos autorités aient clairement opposé Mittal
mais restent "coites" en ce qui concerne Severstal…
j’y vois deux poids deux mesures
et peut-être même une pointe de racisme…
alors que Mittal fait partie de l’UE et que Severstal n’en fait pas partie !