La dette fait régulièrement la une de la presse économique et, parfois, les échos qu’elle suscite atteignent le grand public. En raison de la façon dont elle engage l’avenir, un point semble approprié. Aussi, ce billet est le premier d’une série consacrée à l’ensemble de l’endettement de la France et des Français, à l’issue de laquelle, du moins je l’espère, les enjeux apparaîtront plus clairement. Commençons par notre quotidien : Ce premier « papier » portera sur l’endettement des ménages qui, selon la Banque de France, étaient endettés – presque exclusivement auprès des établissements de crédit – à hauteur de 740 milliards d’euros en février 2006, soit 12 000 euros par habitant.
Tentons de porter une appréciation sur cette valeur. Nos voisins européens (de l’Europe des 15) sont beaucoup plus endettés à titre personnel, avec 16 337 euros par habitant. Cependant, si les Français apparaissent plutôt réservés vis-à-vis de l’emprunt, ils rattrapent rapidement ce retard. Ainsi, leurs encours de crédit représentaient environ la moitié de leur revenu disponible (c’est-à-dire ce dont ils disposent une fois payés les impôts et perçues les prestations sociales) en 1998 et 60% en 2004. Cette valeur reste toutefois toujours très en deçà de la moyenne européenne, de 91 %.
L’immobilier est la première raison du recours à l’emprunt. Le niveau des taux d’intérêt a été, en effet, tout particulièrement attractif ces dernières années, parfois inférieur à 3%. De plus, les banques ont diversifié leur offre : prêt à taux révisables, qui permettent d’emprunter plus, allongement des durées de remboursement, jusqu’à 30 ans …
Au final, en constatant que l’endettement des ménages représente moins de 10% de la valeur de leur patrimoine, la situation peut être qualifiée de saine. Aussi, il est tentant d’utiliser les marges d’endettement pour soutenir la consommation, d’autant qu’aujourd’hui seul un ménage sur deux est endetté. A cet égard, la législation vient d’autoriser les crédits à hypothèque rechargeable, c’est-à-dire pour lesquels il est possible d’obtenir un nouveau prêt garanti en complément d’un prêt ancien, à hauteur de la valeur du bien hypothéqué. Pour leur part, les retraités pourront obtenir des banques des rentes viagères gagées sur leur logement, le remboursement ayant lieu avec la liquidation de la succession.
Cependant, une politique fondée sur l’endettement des ménages est elle durablement concevable ?
Tout d’abord, le crédit a alimenté la demande immobilière, laquelle a tiré les prix à la hausse. La Banque de France alertait récemment sur l’envolée de ces derniers, avec une augmentation de l’ordre de 10 à 15 % par an, et estimait qu’ils étaient surévalués de 30%. Il y a donc ici risque d’explosion d’une « bulle ». La deuxième limite touche à l’inflation, puisque le financement des ménages se fait par concours bancaires donc par création monétaire. La Banque Centrale Européenne a déjà alerté sur les excès de crédit et, conformément à sa mission, a mis en oeuvre une politique de prévention de l’inflation, même si la hausse des prix est également imputable au renchérissement des matières premières. Ainsi, le taux directeur de la BCE, le « repo », celui qui sert de référence aux banques pour fixer le prix des crédits, est passé de 2% à la fin de 2005 à 2,5 % aujourd’hui et, peut être, à 2,75 % d’ici à quelques semaines …
Enfin, l’endettement appelle des remboursements dont le poids peut peser à terme sur l’activité économique par effet d’éviction : les échéances réduisent la consommation et l’épargne des ménages est utilisée à les désendetter au détriment du financement de l’investissement des entreprises.
En parallèle, existe le risque de surendettement, qu’il convient cependant de ne pas exagérer. Les banques sont plutôt prudentes dans la distribution de crédit. Le surendettement, caractérisé par l’incapacité de faire face au remboursement des dettes non professionnelles, concerne moins de 4% des emprunteurs et sa principale cause tient dans les « accidents de la vie » (divorce, chômage).
Au final, il n’en demeure pas moins qu’une politique de croissance fondée sur l’endettement des ménages reste une politique de court terme, à utiliser avec prudence. Surtout, il faut s’interroger sur la question de savoir si les Français auront envie de s’endetter toujours plus ? Tout dépendra de leurs anticipations … Ce sujet sera développé dans un prochain billet.
A.B. Galiani
"La deuxième limite touche à l’inflation, puisque le financement des ménages se fait par concours bancaires donc par création monétaire."
Il est effectivement opportun, alors que l’on célèbre encore le décès du regretté JK Galbraith qui rappellait à quel point l’octroi incontrolé de crédits bancaires perturbait la stabilité de la monnaie par l’accroissement de la masse monétaire sans création parallèle de valeur, d’observer que la difficulté pour la France à rembourser sa dette publique se réduit au fur et à mesure que la masse monétaire en euros augmente, surtout si cette augmentation a lieu sans création de valeur, puisqu’un tel phénomène n’est rien d’autre que de l’inflation cachée (personne ne s’est-il jamais étonné du fait que l’inflation officielle reste basse alors que les loyers et le prix de l’immobilier augmentent 5 à 10 fois plus vite que l’indice officiel des prix à la consommation ?).
Galbraith soulignait également que la création de masse monétaire est parfaitement équivalente à l’impôt et nettement plus indolore. Mais puisqu’une création directe de masse monétaire n’est guère envisageable pour un payx appartenant à la zone euro, il reste possible de réduire en valeur la dette publique sans pour autant relever les impôts ni réformer l’appareil d’état simplement en poussant à la création indirecte de monnaie par la facilitation du recours massif au crédit bancaire par les citoyens.
Bien entendu, cela revient à perturber gravement le fonctionnement des producteurs de biens et de services, qui doivent, le plus souvent, s’approvisionner en matières premières et vendre à l’extérieur de la zone monétaire dans laquelle s’exerce leur activité, et donc, l’emploi, l’investissement et l’innovation.
A L’agent
Ce que vous dites est fort exact. Soit la création monétaire sans création de richesse en face entraîne de l’inflation, cette inflation réduit alors la dette en euro constant ; soit la vitesse de circulation de la monnaie se réduit, les ménages accroissant alors leurs encaisses, mais on voit mal pourquoi ils emprunteraient pour cette seule raison. Le crédit a quand même pour vocation à alimenter la demande.
En cas de forte inflation, on peut assimiler la perte de valeur de chaque unité monétaire à un impôt invisible qui contribue ainsi au remboursement de la dette. Ma conviction, cependant, est que la BCE ne laissera pas faire, conformément à sa mission première.
Concernant la création monétaire, je saisis mal ce que vous appelez "création indirecte" . La création monétaire a 2 origines : la "planche à billet", c’est à dire la création par la Banque Centrale, ce qui est severement règlementé aujourd’hui, et le crédit bancaire (qui consiste à donner du pouvoir d’achat sans en retirer à personne). Les "crédits à l’économie", c’est à dire les crédits bancaires constituent la principale contrepartie de la masse monétaire, elle n’a rien d’indirecte.
"Au final, il n’en demeure pas moins qu’une politique de croissance fondée sur l’endettement des ménages reste une politique de court terme,"
Je me permets de remettre une couche sur le sujet qui me tient à coeur et que j’ai abordé dans un commentaire sur l’article "Tenir la distance" sans réaction de votre part.
Vous semblez, et les 3/4 de la classe politique avec vous, considérer la croissance économique comme une fin en soi. La croissance du PIB n’indique en rien le bonheur des français, j’espère que vous en êtes conscient. D’autres indicateurs (le BIP40, par exemple) montrent même qu’une augmentation de la croissance se traduit généralement par une augmentation des inégalités. Par ailleurs, tous les scientifiques le disent : une croissance infinie dans un monde fini est strictement impossible. D’ailleurs, les européens consomment déjà trois planètes (les américains 5), est-ce vraiment raisonnable de chercher à soutenir la croissance ?
Le lien entre croissance et émissions des gaz à effet de serre est établi…
Bref, aujourd’hui, ce dont nous avons besoin, ce n’est certainement pas de croissance du PIB. Il faut, à tout le moins, intégrer dans cet indicateur quelque part, le coût écologique de nos agissements. D’ailleurs, quand on l’aura fait, il n’y aura plus de problème de délocalisation, le transport devenant suffisamment prohibitif pour empêcher les chinois de nous vendre leurs chaussettes…
Je serais heureux d’avoir, cette fois, une réaction de votre part à ce sujet.
Vous dîtes que la dette des ménages se situe aux alentours de 12000 euros par ménage. Je pense qu"elle est bien plus élevée en réalité car les ménages sont toujours à la base du système économique.
Des finances de l’état car ils paient les impôts donc lils représentent les sources de remboursements d’emprunts.
Du budget des entreprises car les rembousements d’emprunts sont au final répercutés sur les prix.
Plus je lis les économistes et plus je trouve qu’on peut tout dire et le contraire de tout. Ca me fait penser au jeu partisan de faire parler les sondages.
La seule information intéressante que je relève dans votre billet c’est la mention de la création de la masse monétaire par les banques sous forme de crédit. Voilà une information qui mériterait d’être méditée. En vertu de quel privilège une banque a-t-elle le pouvoir de créer de la monnaie si elle ne crée pas une valeur en échange ? Les ménages qui rembourseront leur crédit auront eux le privilège d’aller trimer pour y parvenir.
Les banques ont la possibilité de créer de la monnaie (via le crédit) uniquement parce qu’elles peuvent "justifier" de fonds de garantie sous forme de dépôts. Le volume d’ouverture de crédit est proportionnel aux volume de dépôts (en gros). Mais cette création de monnaie n’en reste pas moins qu’un jeu d’écriture sans création de valeur, ce que j’appelle en terme de droit une escroquerie.
Bref je pense que plus on économicise la pensée et plus elle perd en bon sens…
"je saisis mal ce que vous appelez "création indirecte" . La création monétaire a 2 origines : la "planche à billet", c’est à dire la création par la Banque Centrale, ce qui est severement règlementé aujourd’hui, et le crédit bancaire"
Tout à fait d’accord avec vous : je suis sans doute ici tombé dans ce travers qui consiste à vouloir employer des mots pour leur sens commun aux yeux du plus large lectorat (création indirecte en insinuant que c’était une création de monnaire différente de la création "normale", c’est à dire, la fabrication physique de monnaie qui est la planche à billets).
Il me semble que trop de nos concitoyens accordent au papier monnaie une valeur objective (10 euros = 1 billet de 10 euros) en oubliant que, même en première et très grossière approximation, la valeur de la monnaie est égale à la valeur de l’ensemble des biens divisée par la quantité de monnaie en circulation, celle-ci incluant les simples "jeux d’écriture", parmi lesquels, le crédit bancaire. D’où mon commentaire, qui ne souhaitait guère que souligner votre thèse, tout en insistant sur le caractère particulièrement politique qu’ont les pratiques en matière de crédit bancaire au sein de la zone euro (pratiques qui reviennent à déléguer la politique monétaire de l’union aux banques privées, ce qui est quelque peu cocasse à mes yeux).
A Merome,
Votre question sur la "décroissance raisonnée" était adressée à notre hôte, non à moi même …
Ceci dit, en raison de l’interet qu’elle présente, je me suis promis de rédiger un billet à ce sujet, cependant, laissez moi un peu de temps.
Effectivement, je n’avais pas vu le changement d’auteur. Bien, j’attends votre billet avec impatience.
"En vertu de quel privilège une banque a-t-elle le pouvoir de créer de la monnaie si elle ne crée pas une valeur en échange ?"
Ce privilège, puisqu’il faut le nommer ainsi est accordé discrétionnairement par les autorités créant ce que la banque manipule, c’est à dire, la monnaie. Interrogez-vous sur cette étrangeté : avez-vous jamais entendu parler de la libre création et libre implantation de banques au sein du marché commun ? A-t-il jamais été question de permettre la création d’entreprises dont la vocation première serait le crédit bancaire ordinaire ?
Les banques n’existent que pour une et une seule chose : créer de la monnaie à la demande sous la forme de crédit bancaire. Depuis la généralisation des banques centrales (qui n’est pas si récente) la politique d’octroi de crédit bancaire se construit, pour l’essentiel, par rapport de force entre banques et banques centrales.
Bien entendu, vous l’aurez compris : chaque fois qu’une banque octroie un crédit, le bénéficiaire du crédit s’enrichit et l’ensemble des autres citoyens s’appauvrit, puisqu’il y a création de masse monétaire sans création de valeur. En théorie, si la monnaire créée sert à, par exemple, créer une entreprise, on peut raisonnablement espérer que "tout le monde " s’enrichira par ce que produira l’entreprise. Mais lorsqu’il s’agit simplement d’achat immobilier, il est difficile de voir en quoi la communauté appauvrie par la création sans contrepartie de monnaie s’enrichit.
" Les ménages qui rembourseront leur crédit auront eux le privilège d’aller trimer pour y parvenir."
Les pensionnés et rentiers verront la valeur d’échange en marchandises de leur rentes en numéraire baisser (inflation cachée ou non) de la même manière. En ce qui concerne les capitalistes (détenteurs de capital), le phénomène est plus complexe : mais, en termes simples, on peut alors considérer que tout octroi de crédit est grossièrement équivalent à un prélèvement fiscal.
"Les banques ont la possibilité de créer de la monnaie (via le crédit) uniquement parce qu’elles peuvent "justifier" de fonds de garantie sous forme de dépôts. Le volume d’ouverture de crédit est proportionnel aux volume de dépôts (en gros). Mais cette création de monnaie n’en reste pas moins qu’un jeu d’écriture sans création de valeur, ce que j’appelle en terme de droit une escroquerie."
En théorie, lorsque les prêts sont remboursés, la monnaie créée à l’occasion du prêt est "détruite" : cependant, l’existence d’un volume important de prêts bancaires en courzs introduit l’existence d’une masse monétaire sans support matériel duquel l’économie s’accomode : par contre, l’économie s’accomode assez mal de variations incontrôlées de la politique d’octroi de crédits par les banques : et c’est précisément l’évolution encore récente mais continue de cette politique que signale Galiani.
j’ai plusieurs remarques
* d’une façon ou d’une autre la dette publique sera reportée sur les citoyens, comme ça été fait avec la CRDS, qui n’est rien d’autre qu’un remboursement d’emprunt. Donc, l’endettement des citoyens doit être ré-apprécié en conséquence. Les français s’endettent collectivement au lieu de le faire individuellement, mais au final ça ne change pas grand chose sur le plan de la dette (là ou ça change, c’est la nature de la dépense, la création de richesse qui s’en suit ou non)
* il est évident que le crédit bancaire augmente la quantité de monnaie, mais il me semble faux d’affirmer qu’il n’y pas de création de valeur en même temps : quand une banque accorde un crédit, en fait elle valide un projet dont elle estime qu’il sera créateur de valeur (ou, au moins, capable d’exploiter une valeur préexistente mais dormante, sans circulation monétaire équivalente), et qu’en conséquence elle peut anticiper la création monétaire correspondante.
En moyenne, il y a bien création de valeur et de biens lorsqu’il y a un crédit : les immeubles anciens prennent de la valeur, certes, mais cette valeur ne deviennt réelle qu’au moment de la vente, qui nécessite bien l’émission d’une quantité de monnaie équivalente à la mise en circulation du bien. Et les constructions nouvelles continuent à un train d’enfer (avec une baisse des prix subséquente).
Reste à savoir si la création de valeur par le crédit est équivalente, supérieure, ou inférieure à la création monétaire… Question ardue, mais on peut supposer que sur la longue période et en moyenne, ça doit être équivalent, avec des périodes où le crédit ne fait que constater une richesse produite antérieurement, et des périodes où il anticipe la richesse future. Noter bien qu’il est abusif d’en déduire que le crédit monétaire favorise la création de richesse, même si cet abus ne porte généralement pas à conséquence puisqu’il y a bien coincidence : le crédit (monétaire) n’est que le "signe" d’un accord, une validation d’un projet.
Projet qui n’est pas forcément vertueux, il faut le souligner : financer une guerre ou le pillage de ses propres citoyens est un projet qui peut être financièrement valide…
* il est incorrect d’imputer la création monétaire aux banques. Ce sont les emprunteurs qui "battent monnaie", le rôle des banques se limite à celui de contrôleur de la solvabilité et d’"imprimeur". Et c’est bien pourquoi il est exact que l’emprunteur s’enrichit par sa dette : c’est bien lui qui gagne dans l’opération, beaucoup plus que la banque qui prend une modeste commission. Enfin, plus exactement, l’emprunteur se donne un "effet de levier" qui les moyens de s’enrichir, mais l’argent obtenu peut tout à fait être gaspillé (ne suivez pas mon regard…). Et, puisqu’on en parle, ce n’est pas un hasard si la fin de l’émission monétaire par l’état a été accompagnée d’une hausse considérable de la dette publique : c’était une façon maladroite mais parfaitement logique d’obtenir le même effet.
*si j’ai bonne mémoire, tout le travail de l’école monétariste (Friedman & Co) vise à démontrer que la création monétaire, par l’état ou par d’autres, est sans effet économique. Ca reste discuté, mais c’est tout à fait plausible et c’est conforme aux observations (s’il suffisait de s’endetter pour s’enrichir, depuis le temps la martingale ne ferait plus débat, et l’Afrique sur-endettée, par exemple, roulerait sur l’or ). Auquel cas tout le discours sur la relance par la dette est completement vide de sens : en fait, le sens de la causalité serait dans le sens richesse -> crédit, sans bouclage rétroactif crédit -> richesse. Tout augmentation volontaire de la quantité d’argent (ou de crédit) à un effet rigoureusement nul, ce qui a un effet (éventuellement) c’est le changement dans la répartition de la quantité d’argent détenu par chacun. Selon que le crédit est plus au moins accessible à diférentes catégories de gens (par exemple : les ménages riches, les ménages pauvres, les retraités ou les jeunes, les entreprises, l’état) il y un effet sur la structure des dépenses, la valeur ajoutée créée, et la croissance.
* le truc vraiment dommage, c’est que le débat politique se base sur des théories économiques qui datent d’avant guerre, et dont SAIT aujourd’hui qu’elle sont complétement dépassées.
"En vertu de quel privilège une banque a-t-elle le pouvoir de créer de la monnaie si elle ne crée pas une valeur en échange ?"
Voilà une question qui me semble singulièrement posée à l’envers, la bonne serait plutôt :
1)"En vertu de quel privilège et par quel moyen technique peut-on empêcher de créer de la monnaie ?".
2)"comment peut-on s’affranchir de l’interdiction de battre monnaie, une fois qu’elle a été édictée ? "
La réponse se trouve en partie dans la situation actuelle : l’état contrôle le support matériel (par la force et seulement par la force), il tolère l’émission de crédit mais cette création monétaire est auto-limitée par la prise de risques qu’elle implique, prise de risque qui, à son tour, favorise une indexation du crédit sur la richesse détenue ou créée, et l’ensemble est à peu près stable.
"il tolère l’émission de crédit mais cette création monétaire est auto-limitée par la prise de risques qu’elle implique, prise de risque qui, à son tour, favorise une indexation du crédit sur la richesse détenue ou créée, et l’ensemble est à peu près stable.’
Il n’est pas très difficile de se convaincre de la fragilité de cette auto-limitation en étudiant l’histoire des innombrables crises économiques et du rôle qu’ont pu jouer l’émission incontrôlée de crédit par les banques dans ces crises, et notamment, en étudiant l’histoire de la monnaie en France, au Royaume-Uni, en Allemagne ou en Autriche ou aux USA de 1918 à 1939.
Il est cependant vrai que, de nos jours, les outils informatiques implantés dans les banques permettent à la fois un suivi très fin par les autorités de régulation des octrois de crédit par les entreprises concernées, ainsi que la construction d’indices et d’indicateurs très performant par les diverses officines de cotation évaluant la solidité des monnaies ou la qualité des politiques monétaires.
Il est par ailleurs intéressant de noter que l’administration américaine, qui considérait comme relevant de ses obligations de publier régulièrement divers indices permettant d’évaluer la masse monétaire en circulation (les initiés reconnaitront les indices M1, M2 et M3) a récemment cessé d’entretenir l’indice M3, comme relaté ici :
http://www.dailykos.com/story/20...
(Publicité : bien qu’étant gestionnaire fonctionnaire d’état, je me permets de signaler être à la recherche d’un nouvel emploi, par exemple, en informatique financière : l’adresse e-mail signalée est valide)
A Logik, Merome, L’Agent et Gem
Le débat qui s’est développé autour de la création monétaire a donné lieu à des arguments des plus intéressants et des plus pertinents. De façon assez étonnante, il n’est pas sans rappeler un autre débat qui eut lieu au milieu du XIXeme, entre les tenants de la « Currency School » et de la « Banking School », c’est-à-dire entre partisans d’une masse monétaire strictement adossée au stock d’or détenu par la Banque Centrale et partisans d’une liberté totale accordée aux banques commerciales pour créer leurs billets en considérant qu’un excès d’émission d’une banque serait aussitôt corrigé par la dévalorisation des dits billets émis par la dite banque. A l’époque, les établissements de crédit émettaient en effet des billets convertibles en or. Ce n’est que progressivement que les Banques Centrales obtiendront le monopole de l’émission, que les billets auront cours forcé, c’est-à-dire sans convertibilité et que la masse monétaire se déconnectera de l’encaisse « or » de la banque Centrale.
Comme le dit très justement l’Agent, la valeur d’une monnaie, c’est le pouvoir d’achat qu’elle confère. Ce que dit d’une autre façon Gem en évoquant Friedman pour qui ce n’est pas parce qu’on accroît la masse monétaire que l’on s’enrichit.
Pour répondre à Logik, comment le pouvoir, pourtant régalien, de battre monnaie a-t-il pu échoir aux banques ? sans doute parce que c’est le plus simple.
Rappelons les mécanismes de la création monétaire. Ce peut être par la Banque Centrale qui imprime des billets. Mais, ce sera plus fréquemment à l’occasion d’un prêt. Prenons un exemple : Monsieur et madame X obtiennent un prêt de 10 000 €. La banque enregistre dans sa comptabilité un prêt au nom de X pour 10 000 € et verse sur le compte bancaire de ses clients 10 000 €. Monsieur et Madame X ont accru leur pouvoir d’achat sans que personne ne voit diminuer le sien. Il y a donc bien eu création monétaire. Ce sont les crédits qui font les dépôts et non l’inverse. L’argent sur les comptes circulant ensuite entre banques, un établissement de crédit pourra toujours équilibrer sa trésorerie en empruntant à une autre banque, c’est le « marché interbancaire ».
Ceci dit, la Banque Centrale Européenne suit de près ces mécanismes. En effet, si la masse monétaire croît trop vite, alors c’est l’inflation, qui est, selon Milton Friedmann, toujours d’origine monétaire ou, selon les propos plus nuancés d’un ancien Gouverneur de la Banque de France, en lien avec un excès de masse monétaire. La Banque Centrale surveille M3 (qui est un agrégat et non un indice), qui regroupe tout ce qui peut être utilisé comme moyen de paiement ou transformé très vite en moyen de paiement. La FED (Banque Centrale US) au demeurant ne publie plus cet indicateur depuis quelques semaines. Mais allez faire un tour sur le site proposé par L’Agent, il y a des informations intéressants pourvu que l’on comprenne l’anglais. …
La Banque Centrale gère la masse monétaire au travers les taux, en fixant le taux directeur de refinancement (le « repo ») des banques commerciales. De plus, la réglementation fixant notamment les exigences en fonds propres des établissements de crédit peut être considéré comme un outil de politique monétaire puisqu’elle restreint la liberté de prêter.
Tant que la croissance de la masse monétaire est en lien avec la croissance économique, il est excessif d’affirmer que la création monétaire correspond à un transfert de richesse au profit de l’emprunteur. Pour faire simple, la situation nette de son patrimoine est augmentée du bien acquis mais diminuée de la dette. Au fur et à mesure qu’il rembourse, la dette se réduit donc le patrimoine augmente à concurrence des échéances. Rembourser ses dettes est donc une forme d’épargne.
En revanche, l’inflation réduit la dette des emprunteurs. Dans ce cas, l’emprunteur s’enrichit si l’intérêt qu’il paie est en dessous du taux d’inflation.
Cherchez qui aujourd’hui pourrait avoir intérêt à l’inflation, ce qui fait le lien avec les « prélèvements invisibles » évoqués par L’Agent.
Par ailleurs, mon propos n’était que de traiter l’endettement des français à titre personnel. Les différents intervenants ont voulu élargir à la dette publique car qui la paiera ? ce sera l’objet d’un billet à venir.
Enfin, pour alimenter la réflexion de Logik qui pense que les économistes disent tout et son contraire … Si je vous affirme qu’un véhicule roule à 70 km/h, que doit on en conclure ? rien bien évidemment : cela dépend du lieu, de l’état du véhicule, des conditions climatiques. C’est tout ce contexte que les économistes cherchent à apprécier pour porter un jugement.
Cordialement à tous
Pour maitriser l’endettement des ménages il n’ya pas deux solutions.
Revenir à l’interdiction de la publicité sur les prêts , placés depuis les années 1980 par les Ets de crédits non plus comme des actes basés sur la CONFIANCE inspirée par le comportement responsable d’un emprunteur
mais comme un simple OBJET de consommation, un PRODUIT, ce qui est un pur détournement de la pratique bancaire.
puisque contrairement aux prêts aux PME, où existe une centralisation des encours, on quitte le domaine bancaire pour entrer dans celui du commerce et vice versa puisque les Grandes surfaces se sont intitulées vendeuses de prêts.et ceci sans limites, harcelant même les particuliers en leur accordant des facilités de crédits automatiques par voie postale .
Qu’on ne s’étonne pas aprés celà de voir des particuliers de nature peu responsables crouler sous les dettes ! et venir pleurer sur leur sort impécunieux comme si ils n’étaient pas responsables de leur situation!
Au lieu de revenir à une meilleure maitrise en interdisant la publicité
sur les prêts à la consommation, pas glop pour la croissance !! on
a estimé plus opportun d’autoriser les irresponsables à " planter" leurs fournisseurs et créanciers avec un accés à la faillite individuelle !
Cç c’est de la nouvelle gouvernance !!
il n’y a pas de centralisation des encours qui permettrait d’aider le particulier à ne pas s’endetter hors de sa capacité de remboursement.
Pour souligner l’ensemble du propos, peut-être peut-on souligner l’annonce du niveau record d’endettement des ménages français (désormais à 64%, pour un niveau de 40% quelques années avant l’euro. Comme nous l’avons expliqué, ce niveau d’endettement a généré à elle seule une nette augmentation de la quantité de devises en circulation (en l’occurence, environ +20%), laquelle s’est inévitablement traduite par une hausse des prix, du fait de l’enrichissement des emprunteurs (et notamment, de l’enrichissement des ex-propriétaires de biens immobiliers dont la valeur s’est envolée de +40% ces quatre dernières années). Bien entendu, cette envolée de la masse monétaire en circulation a généré de la croissance au sens économique courant de la chose, mais de la croissance sans création de valeur (bien que génératrice de recettes fiscales).
C’est donc sans grand étonnement qu’on constatera quasi-simultanément que la très forte progression de leur cours en bourse qu’avaient connu de nombreuses sociétés cotées l’année dernière s’est sensiblement réduite ces derniers jours, les investisseurs constatant que la croissance observée ces quatre dernières années provenanit, pour l’essentiel, de mécanisme d’origine monétaire.
Mais on constatera au passage une chute du prix des matières premières, laquelle découle d’anticipations déçues sur l’activité industrielle.
A Lebrun
Je pense que la publicité sur les crédit babcaire est déjà solidement règlementée. D’ailleurs, comme je l’écris dans cet article, le surendettement concerne peu de clients et vient d’abord des "accidents de la vie". Reglementer davantage ne changerait rien ou si peu.
A l’agent
Globalement, votre idée se défend. Cest d’ailleurs ce qu’affirmait un groupe de parlementaires qui voyait dans l’endettement de quoi soutenir la demande. Je reste assez nuancé sur ce point de vue et je crains comme vous le soulignez une sorte de fuite en avant, avec des effets d’illusion de richesse qui pourrait être douloureux quand ils vont se dissiper.
Si on considère que dans certains pays de l’U.E. par ailleurs étudiés par les politiciens français pour leurs indicateurs économiques enviables (je pense notamment au Royaume-Uni et à l’Espagne), l’endettement des ménages peut atteindre 75 à 150%, on constate qu’effectivement, il y a de la marge. D’un autre côté, on observera que c’est un moyen détourné, mais efficace, de soutenir la croissance par la consommation, à condition d’orienter ladite consommation vers des produits dont l’évolution des prix n’est pas prise en compte pour le calcul de l’inflation ‘immobilier, par exemple)
permanent.nouvelobs.com/e…
Il faut cependant bien constater que l’écart de niveaux d’endettement entre citoyens français et citoyens d’autres pays de la zone euro se traduit également par un bien mailleur pouvoir d’achat pour les citoyens endettés que pour ceux qui ne le sont pas.
Mais d’un autre côté, l’augmentation rapide de la masse monétaire en circulation favorise évidemment la rentabilité, et donc, la création de petites entreprises locales alimentées par la monnaie brutalement mise en circulation (artisanat, commerce de proximité, services) et donc, l’emploi, et notamment l’emploi peu qualifié. Renforcer le pouvoir d’achat des propriétaires tout en favorisant l’emploi peu qualifié en créant des incertitudes sur la solidité des rentes et pensions ou sur la solvabilité effective des classes moyennes est un programme qui a de bonnes chances d’obtenir un consensus entre la gauche et la droite parlementaire.