C’était les 23 et 24 mars 2000, il y a 6 ans déjà, à deux jours près, que les Chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne ont arrêté, à Lisbonne, pour la première fois dans l’histoire de l’Europe, une stratégie économique et sociale globale à dix ans couvrant la période 2000-2010. Cette stratégie était résumée dans un objectif ambitieux : faire de l’Union, « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde ». Cette stratégie était mesurée par quatorze indicateurs parmi lesquels la croissance (3 % par an), la part du PIB consacré à la recherche (3 %), le taux d’emploi global de la population (70 %), le taux d’emploi des femmes (60 %), le taux d’emploi des travailleurs âgés de 55 à 64 ans (50 %).
Elle reposait sur trois objectifs principaux : 1- la transition vers une société et une économie fondée sur la connaissance ; 2- la modernisation du modèle social européen ; 3- une évolution saine des équilibres macroéconomiques.
Où en sommes-nous, si nous devions dresser, six ans après, un bilan d’étape ?
Non seulement, nous n’avons pas progressé vers les objectifs fixés, mais, en outre, l’Europe risque d’être écartée de la compétition mondiale pour plusieurs raisons : faible croissance, baisse du niveau des investissements productifs et de la demande, fragilisation des emplois, fermeture de sites européens de production, exode des chercheurs, creusement des déficits publics, coût croissant de la protection sociale liée au vieillissement de la population et au chômage de masse. Sous le vocable de « stratégie de Lisbonne » se cachent en réalité les principaux enjeux de l’avenir économique et industriel de l’Europe : sa place dans la mondialisation, le choix de ses stratégies de développement, l’avenir de sa jeunesse, la régulation des politiques de l’emploi, le policy mix entre les politiques économique et monétaire.
Triste anniversaire donc. Ne croyez-vous pas qu’il y aurait urgence à ce que les forces politiques de gouvernement se rapprochent pour débattre ensemble de ces sujets afin d’impliquer davantage la France dans cette stratégie et l’aider, dans le consensus, à être leader dans cet urgent « désembourbement » de l’Europe ? Au moment de la signature, le Premier Ministre était Lionel Jospin, et le Président Jacques Chirac, j’imagine qu’aucun des deux ne regrette sa signature.
Je prie pour que les Etats se décident enfin à faire une priorité absolue du passage qui suit et qui figure dans le rapport que vous citez :
«Ces initiatives conjointes prennent la forme de partenariats entre secteur public et secteur privé pour le soutien des recherches engagées dans des domaines nouveaux et prometteurs : par exemple, les piles à hydrogène et à combustible, la nanoélectronique, l’aéronautique et les transports aériens, ou encore, la médecine innovante ou les écotechnologies. Le système de navigation par satellite Galileo et la conception de systèmes de gestion intégrée du trafic ferroviaire et aérien sont d’autres grands exemples de projets industriels précurseurs qui présentent, pour la Commission, une dimension européenne très marquée. Le programme peut être étendu à de nouvelles dispositions en faveur de l’innovation, notamment pour les petites et moyennes entreprises. En outre, l’octroi d’aides d’État à de jeunes sociétés innovantes devrait être rendu plus facile, non seulement par une assistance financière directe, mais aussi par un accès plus aisé aux capitaux à risques.
De son côté, le programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité doit offrir de nouveaux financements communautaires, sous la forme de garanties et d’investissements en capitaux à risques, notamment pour la mise sur le marché de solutions novatrices dans le secteur des énergies renouvelables et de la demande énergétique. »
La stratégie de Lisbonne comporte des objectifs dont on ne peut, globalement, que se réjouir…
L’inconvénient, ce sont les politiques menées en France pour y parvenir…
Le rapport est effectivement très bien, court, net, et précis.
Le rapporteur est impitoyablement lucide sur la situation, on est plutôt dans le registre de la "volée de bois vert" que de la "langue de bois".
En outre, c’est la première fois que j’enttend parler du "PROGRAMME NATIONAL DE RÉFORME", ce qui en dit long sur l’importance qu’on y attache. M. bizet à des mots savoureux, que je ne résiste pas à citer intégralement :
"À l’exception notable de la France, tous les États membres ont désigné un coordonnateur national pour la stratégie de Lisbonne et ont profité de la circonstance pour améliorer la coordination interne entre leurs différents ministères concernés. La plupart des États membres, à l’exception, là encore, de la France, se sont véritablement efforcés d’associer leur parlement et les représentants des autorités régionales et locales à la rédaction de leur programme national de réforme."
En plus, le rapport est un parfait résumé, où j’apprend que Lisbonne ce ne sont pas que des objectifs et des indicateurs, ce sont aussi des recommandatiions politiquement iconoclastes en France, et je goute tout le sel de votre conclusion, M. Lambert, je suis impressionné par votre façon, l’air de rien, mettre les points sur les i. Ca ne me rend pas plus optimistes sur l’espoir d’avancer…