Thomas Ferenczi, dans sa chronique du Monde d’hier intitulée « Oublier la Constitution », concluait qu’il valait mieux se résoudre à ne rien faire et renoncer carrément au Traité, afin d’éviter d’interminables controverses et susciter éventuellement entre les Etats des tensions qui les empêcheraient d’agir. Je ne partage pas cet avis. Je pense au contraire que, dans le brouillard épais de déprime que notre continent traverse actuellement, il nous faut percer l’horizon, forcer les conformismes, réveiller les consciences, dominer les peurs, nous obliger à préparer l’avenir, instiller de l’énergie. Repartir à la conquête de l’opinion, sans nous laisser décontenancer par un échec qui, pour inquiétant qu’il soit, ne visait pas la question posée.

Pourquoi ne pas interroger à nouveau les Français et les Néerlandais sur la Constitution ? Et seulement la Constitution ! C’est à dire sur la première partie. Elle ne comprend que 60 articles. Moins que la Constitution française, exactement le même nombre que la Constitution américaine. La longueur normale d’une Constitution, quoi !
Peut-être pouvons-nous y ajouter la 2ème partie : la charte des droits fondamentaux. Cela passionne les juristes, les philosophes, les associations, On en compte déjà beaucoup : les droits de l’homme et du citoyen de 1789, la Charte des Nations Unies, la Charte européenne des droits de l’homme…C’est la dernière rédigée et paraît-il la meilleure actuellement sur le marché, enfin on se demande qui pourrait être contre ? Cette Charte a d’ailleurs été approuvée à l’unanimité ce dont personne n’a jamais parlé.
En revanche, il faut éviter de soumettre à référendum la troisième partie, c’est à dire les politiques actuelles de l’Union. Cela n’a aucun sens. D’autant qu’elles n’ont pas vocation à avoir de valeur constitutionnelle au sens juridique du terme et qu’à l’épreuve du temps, elles changeront inévitablement. Valéry Giscard d’Estaing, Président de la Convention, n’était d’ailleurs pas favorable à l’insertion de cette partie dans la Constitution. Comme il avait raison ! Car c’est cette partie là qui a tout fait échouer. Elle visait à ce que chacun y trouve ce qui pouvait l’intéresser. Dans les faits, chacun a fini par y découvrir ce dont il ne voulait absolument pas.
Je ne parviens pas, pour ma part, à m’accommoder d’un échec. Ce n’est ni dans ma nature, ni dans l’idée que je me fais du service de la France et des Français. Si je veux bien entendre que le peuple a toujours raison, je lutterai cependant jusqu’à mon dernier souffle pour faire entendre une voix dissonante de celle de sa majorité si ma conscience me dicte de le faire.
Puis, en cette année 2006 qui va commencer, je me dis que ce pourrait être pour le Président de la République une bonne occasion de délivrer un dernier message aux Français avant le terme de son mandat et au crépuscule de sa vie publique. Il n’a plus rien à perdre personnellement depuis que chacun, y compris lui même, sait qu’il ne se représentera pas. Un seul but doit désormais le guider : ouvrir la seule voie possible d’avenir pour la France : L’ Europe !