Un premier billet pour revenir sur la portée de la loi organique n° 2005-779 du 12 juillet 2005 modifiant la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, appelée également par certains : LOLOLF. Cette loi organique constitue une première modification de la LOLF alors même que celle-ci n’est pas encore entrée pleinement en application.

Issue d’un projet de loi du ministre des Finances N. Sarkozy déposé en octobre 2004, pour des raisons, il faut le concéder, plus politiques que budgétaires, le projet s’est considérablement enrichi durant les 10 mois de son adoption.
Il n’en reste par moins que les modifications restent assez minimes même si certaines peuvent être mises en avant :
_ La fixation des modalités d’utilisation des surplus du produit des impositions de toute nature (art. 1),
_ Information sur les emplois rémunérés par les organismes subventionnés (art. 4 et 5)
_ Les opérations de partenariat public-privé (art. 7 et 8)
_ L’information du Parlement en LFI concernant les mesures de régulation budgétaire (art. 9)
_ La possibilité d’ouvrir un débat sur rapport annuel de la Cour des comptes (art. 10).

En réalité, ces modifications ne sont que des ajustements minimes et non un « toilettage » de la LOLF consécutif aux travaux de sa mise en oeuvre. Certains y étaient donc assez peu favorables jugeant cette modification ne s’imposait pas vraiment car quelque peu anticipée (M. Alain Lambert notamment). Je suis personnellement de leur avis.

Il n’en demeure pas mois que la LOLOF a, à tout le moins, une portée symbolique. Alors que l’ordonnance du 2 janvier 1959 était critiquée d’une part pour son intangibilité (deux modifications mineures en 71 et 95) et pour son inadaptation à l’évolution de la gestion publique, la LOLF, avant même sa mise en application totale, a d’ores et déjà fait l’objet d’une modification certes minime. On peut y voir le symbole d’une volonté forte pour le Parlement et le Gouvernement de poursuivre le mouvement de modernisation des règles en matière budgétaire afin que la LOLF ne soit pas un texte « gravé dans le marbre » (D.Migaud) comme a pu l’être l’ordonnance organique…

Reste, comme l’indiquait Alain Lambert, qu’une modification de la LOLF sans doute plus profonde (un « toilettage ») sera nécessaire pour tirer les conséquences de ses premières applications pratiques. On peut donc raisonnablement penser que d’autres « LOLOLF » suivront.

Pour ma part, je pense qu’une telle révision de la LOLF doit faire place à une grande concertation, sur le modèle des travaux d’élaboration de la LOLF, de la part de l’ensemble des acteurs de la réforme budgétaire (auditions, contributions de la Cour notamment) et à un consensus politique identique à celui qui a prévalu à son adoption.

Quelques sujets me paraissent particulièrement à propos comme, par exemple, une réglementation dans la LOLF des programmes de fonctions supports, une clarification du régime juridique des mesures de mise en réserve (qui malgré les encadrements successifs laissent subsister des incertitudes juridiques), une codification du cadre de déclinaison opérationnel et l’intégration d’un volet responsabilité dans la LOLF. Mais, pourquoi ne pas envisager également de profiter d’une telle modification pour aller plus loin dans le rééquilibrage des pouvoirs budgétaires…
Reste à s’interroger sur une question fondamentale qui est celle du bon moment pour amorcer une telle réflexion. Faut-il commencer dès que le palier symbolique de la première année d’application sera dépassé ? Faut-il laisser quelques années de pratique à la LOLF ? L’opinion de l’un des « pères fondateurs » de la LOLF me paraît, sur ce point, des plus intéressants… et je ne doute pas que Monsieur Lambert nous apportera son point de vue…

À noter également que certains de ces domaines (tels le cadre de déclinaison ou le volet responsabilité) pourraient être « codifiés » dans un « droit dérivé de la LOLF » (c’est-à-dire concrètement dans des textes d’application). Or, il faut noter que l’ensemble des règles issues des travaux de mise en oeuvre de la LOLF sont développées dans des guides, documents de travail, au mieux des circulaires…. Or, ce gouffre normatif entre la loi organique et les textes relatifs à son application me semble préoccupant (mais c’est un autre débat).

Quoiqu’il en soit, la LOLOLF « version 1.0 » est ainsi le signe que la LOLF sera, contrairement à l’ordonnance de 59, un texte évolutif qui pourra s’adapter non seulement aux succès et aux échecs de sa mise en application mais également aux évolutions à venir de la gestion publique.