Le Figaro de ce jour nous informe que le Trésor et Euronext lancent un marché secondaire des emprunts d’Etat, aux caractéristiques identiques aux marchés actions. Je m’en réjouis car, pendant 2 ans à Bercy, j’ai, sans succès, suggéré cette idée. C’était, me disait-on, impossible à l’époque. Incompatible au plan communautaire. Et totalement désuet !
Je tenais cependant beaucoup à cette idée car je rêvais de pouvoir proposer aux Français des titres d’emprunts d’Etat à zéro pour cent. Considérant cette démarche comme très pédagogique pour traiter concrètement de la dette de notre Pays. En effet, comment convaincre nos compatriotes que la dette de leur Etat est aussi la leur ? sauf à leur proposer d’en prendre une toute petite partie à leur charge ? Je n’avais naturellement rien inventé puisque Antoine Pinay, à 2 reprises, avait utilisé cette méthode, à une époque où les marchés financiers n’étaient certes pas ce qu’ils sont aujourd’hui, j’en conviens volontiers.
Prêter un peu de son épargne à l’Etat sans intérêt, c’est rêver me direz-vous ? Je n’en suis pas si sûr. D’abord parce que la contrepartie de ce prêt gratuit, pour une durée de 5 ans par exemple, pourrait être une exonération de droit de succession, voire d’ISF. Il ne serait pas choquant de pouvoir transmettre, moyennant un plafonnement pour éviter les abus, ces titres à ses enfants en franchise de droits. Ne devront-ils pas de toute manière, comme contribuable, participer au remboursement.
L’Etat verrait le service de sa dette s’alléger un peu, ce qui desserrerait d’autant l’étau dans lequel il étouffe. Puis ce serait un sondage, en grandeur nature, révélateur de l’opinion publique française sur sa réelle volonté de sortir son pays de la situation difficile dans laquelle il se trouve au regard de ses finances publiques.
Cher Alain,
Je suis prêt à prendre des titres d’emprunt à 0, voire à payer une contribution exceptionnelle pour résorber ma part de la dette mais seulement une fois qu’on aura vraiment réformé…
Je me refuse à mettre de l’argent dans un panier percé !
Au fait, nous sommes endettés vis à vis de qui ? (À qui sont payés les intérêts de la dette ?)
Accepter de prendre en charge de la dette d’état en contrepartie d’un avantage fiscal (en contrepartie duquel il faudra certainement accepter des restrictions à la liberté de spéculer sur les titres acquis) est certainement le meilleur moyen de signer un chèque en blanc aux futurs élus de la République, ce qui serait, à mes yeux du moins, une catastrophe ou du moins, un péril immense pour les générations futures. Or, comme ces futurs élus ne sont guère, à ce jour, que d’anciens élus ou les fidèles de ces derniers, cela revient à redonner à ceux qui ont mené les finances publiques au désastre dans lequel elles se trouvent les moyens de persister et s’entêter dans l’erreur, les dépenses somptuaires, les grands programmes militaires ou peut-être même une nouvelle grande loi organique pour l’école.
Sans la menace d’une hausse éventuellement rapide et brutale des taux d’intérêts par la Banque Centrale Européenne, je doute qu’un des candidats crédibles à l’élection présidentielle de 2007 ne choisisse tôt ou tard de sombrer dans le clientélisme et la gabegie, ne serait-ce que pour sauver les têtes de ses fidèles députés 5 ans plus tard, aux législatives.
Peut-être nous autres citoyens avons-nous eu tort de nous effrayer de l’hypothèse d’une mise sous tutelle des finances publiques par le FMI en 1983. Sans doute avons-nous eu tort d’accepter le principe de la monnaie unique pour gagner du temps sans s’assurer que les hommes qui nous gouvernent changeraient, deviendraient responsables.
Recourir à l’usage d’instruments financiers inédits est certainement ici reculer pour mieux sauter, surtout lorsque l’on ne renonce pas par ailleurs au train de vie d’une ex-grande puissance. Alors, s’il faut recourir à de tels outils, soit : mais avant tout, que l’état prenne quelques engagements permettant aux citoyens de croire qu’il ne s’agit pas, une fois de plus de gagner du temps.
Bonjour,
C’est vrai que solliciter un emprunt d’Etat à taux zéro pourrait être de nature à faire prendre conscience à nos concitoyens de l’urgence à résoudre notre pb d’endettement. D’autant que cet emprunt côté sur le marché boursier sera de toute façon source de rémunération. En conséquence, je considère cette rémunération serait largement suffisante. Vos propositions de contre-partie d’allégement fiscal particulièrement sont donc déplacées. Les dépenses de l’Etat ne diminue pas alors que ses sources de revenu se réduisent. je trouve particulièrement scandaleux que nos ministres se battent bec et ongles avec nos partenaires européens pour maintenir un taux de tva de 5.5% pour le bâtiment (c’est vrai le marché de l’immobilier se porte mal en ce moment) et même de le réduire pour les restaurateur.
Quelle est la logique ? Demander aux Français de venir en aide à l’Etat alors que lui-même se coupe d’une partie de ses revenus (même si les charges sur les emplois ainsi créés combleront une partie des pertes) est une érésie !!! Encore une fois, nous subissons le poids des lobbies ou plutôt le poids de promesses démagogiques de certains…
C’est une excellente idée, au vu du montant annuel des intérêts payés par l’Etat français pour sa dette… ça permettrait de responsabiliser un peu les citoyens (en échange, par exemple et comme vous le suggérez si bien, d’une franchise lorsqu’on transfère ces titres à ses enfants…)
Bonsoir Alain Lambert,
Ca me parait être à première vue, une bonne idée, notemment si des avantages fiscaux y sont attachés.
Mais je suis plutôt pessimiste sur l’avenir de ce marché qui sera étroitement corrélé aux politiques économiques menées en France. Sans vouloir être rabat-joie, si la politique de redressement des finances ne fonctionne pas, et que s’enclenchent les réductions de notations de la dette, (qui auraient d’ailleurs dû intervenir depuis longtemps) je crains fort que ces titres ne nous ramène à l’époque peu enviée des emprunts russes.
Bien sûr, l’état français n’est pas l’empire russe de 1917. Cependant je ne peux m’empêcher de penser que si la dette continue à s’accroître, comme c’est le cas depuis 20 ans, la valeur de ces titres ne peut que chuter.
Pinay, en son temps, avait parfaitement maitrîsé l’endettement grâce à des politiques adaptées, dont l’arme principale avait été la dévaluation. Celle ci n’étant plus d’actualité, je vois mal nos politiques prendre les mesures qui s’imposent pour la réduire.
Je ne suis pas contre la création de ce marché mais juste sceptique sur son succès.
Je subodore seulement la naissance d’un nouvel Eurotunnel qui pourrait ruiner les porteurs les moins informés, à savoir les particuliers.
Je n’ai pas analysé les caractéristiques de ce marché, mais si les investisseurs ont la possibilité de vendre ces titres à découvert, je ne donne pas cher de la valeur de l’emprunt français (certains zinzins – investisseurs institutionnels – vendant une obligation empruntée avant de la racheter à un prix moindre pour la rendre au propriétaire).
Sinon toutes mes félicitations pour ce blog,
A bientôt,
Polydamas
Si c’était et c’est toujours une bonne idée, vos anciens collaborateurs ou hauts fontionnaires su Ministère des finances sont fautifs et vous n’avez pas su les convaincre, ou pas pu les contraindre, auquel cas vous devriez mieux vous imposer, voire les changer si vous reveniez à Bercy! Mais aviez vous aussi convaincu vos supérieurs?
Si, pour attirer des épargnants vers un taux zéro, il faut de nouvelles déductions fiscales, quel est l’intérêt? Ca doit se calculer, mais dans ce calcul il faut inclure les coûts pour l’état de l’élaboration de la législation,de la règlementation, du contrôle, etc, et pour les épargnants, du conseil fiscal… Et toujours plus d’administration, bureaucratie, paperasserie, temps perdu.
Pour réduire le poids de la dette: moins de gaspillages dispendieux et contre-productifs!
Une idée intéressante, mais aux interprétations dangereuses :
Il n’y a que l’Etat pour inventer les "emprunts" aux opérateurs de téléphone remboursés par les utilisateurs du téléphone (nous), les emprunts à taux nuls, les CDD renouvelables n fois. J’ai parfois du mal à voir qui incarne l’exemple dans ce pays.
Heureusement qu’il n’y a pas de "stock-options" dans l’administration, les pauvres fonctionnaires seraient ruinés.
Même si ce type d’emprunt est intéressant car il permet au pouvoir de conserver son indépendance vis-à-vis d’éventuels capitaux étrangers, ne pensez vous pas qu’il serait dangereux de passer le message suivant :
nous avons trop de dettes, nous avons une solution, c’est de vous (le peuple) emprunter en vous permettant de payer moins d’impôts.
Donc, plus je vais réclamer des ronds-points dans ma ville, des bus scolaires, des services divers et variés, plus je vais augmenter la dette et donc payer moins d’impôts ? Mon raisonnement est très réducteur, mais il illustre la nécessaire communication qui doit être associée à une telle mesure.
Une capacité à échanger des réductions d’impôts ?
Si ce marché a un fonctionnement identique aux marchés d’actions, il aura un cours, donc possibilité d’acheter et de vendre à un certain prix. Que va représenter cette action ? Une capacité à payer moins d’impôts.
C’est très intéressant, car lorsque j’aurai fini de payer ma maison, le trou de la sécu, les retraites de la SNCF, le Crédit Lyonnais, celle des fonctionnaires, les conséquences de la désindustrialisation du pays, des délocalisations, la dette de l’Etat, les formations LOLF pour les députés, etc.. et avec tout ce que je vais toucher pour ma retraite, en 2040, j’ai tout de même pas le sentiment, à vu de nez, que je vais avoir beaucoup à leguer à mes enfants.
Mais, c’est promis, s’il me reste un peu d’argent, je vais payer notre dette. Enfin, il faut rester positif, l’important, c’est de savoir pourquoi on travaille. Bon aller, je vous laisse, j’y retourne, j’ai mes dettes à payer.
Annabelle: une remarque : vous savez, bien évidemment, qu’une maison se vend, pour l’essentiel, à l’endettement maximal auquel peut consentir la personne la plus désireuse d’en faire sa résidence à un instant donné et non pas à quelque valeur "objective" que ce soit. Votre maison aurait été donc été moins chère s’il y avait eu moins de français capables, au même titre que l’état, de s’endetter lourdement, tout en ayant été capables, éventuellement à leur insu, de s’enrichir grâce à l’économie nationale (à plus de 50% publique, faut-il le rappeler ,), particulièrement soutenue par l’argent public ces trente dernières années. Ainsi, la dette de la nation et le cours particulièrement élevé des meilleurs biens immobiliers sont deux facettes d’un seul et même même phénomène : le rôle économique capital (à tous les sens du terme) de l’argent public[*]. France Telecom, que vous citez, après avoir rapporté des sommes considérables à l’état pendant des années, a fait la fortune de certains, (parmi lesquels, les premiers de ses collaborateurs à partir) et a par la suite bien contribué à creuser la dette qui est, elle, nationale et indivisible. Telle est la caractéristique de l’économie publique : les pertes financières s’y inscrivent au bilan de la nation, les bénéfices financiers à celui des individus concernés.
Et c’est ici que je souhaite contredire Alain Lambert :
Ce rôle économique capital de l’argent public incite à la plus grande prudence quand à toute innovation financière en la matière (malgré les innovations imaginées par Bercy ces trois dernières années pour couvrir la dette par des procédés à mon humble avis risqués), puisque tout dispositif mal foutu sera immanquablement détourné de sa fonction d’origine au profit des plus rapides et des plus malins (regardez par exemple ce que dit la presse sur le dispositif fiscal dit "de Robien"), ce qui aura pour plus probable conséquence une aggravation des inégalités. Et je tiens par ailleurs à souligner que l’envergure des inégalités sociales, réelles ou supposées, est, au fond, le premier facteurs d’aggravation des troubles sociaux et la seule réelle motivation du "dialogue sociale" en général. Même si je ne m’étonne guère qu’un tel constat ne soit pas perçu comme un inconvénient par ce gouvernement, je m’inquiète que tel ne soit pas le cas dans sa plus probable alternative (j’appelle un chat un chat pour simplifier)
Et enfin, arrêtons les fantasmes sur les capitaux étrangers : l’immense mérite des financiers internationaux est qu’ils sont absolument lisibles et prévisibles, en un mot, transparents. Par contre, les financiers nationaux savent au besoin jouer de la complexité des réseaux d’intérêt pour faire de toute action publique une nouvelle occasion de s’enrichir : on ne peut pas leur en vouloir : c’est leur métier. Enfin, et je crois utile de le souligner, depuis la mise en oeuvre de la monnaie unique, la notion de "capital étranger à la nation française" n’a aucun sens. Par exemple, dans l’hypothèse d’Alain Lambert, je pourrai aller emprunter de bons euros chez un industriel italien et les placer sur la dette française pour maximiser le rendement en réductions d’impôts, quitte à reverser une partie de mon bénéfice à mon ami industriel italien… le plus légalement du monde : or, j’imagine qu’un tel dispositif ne pourrait avoir de succès que si son rendement réel est concurrentiel par rapport à l’offre du marché (et déjà, surtout avec les dernières réductions d’impôts sur les actions, le rendement brut d’un portfeuille d’action prudent est déjà particulièrement élevé par rapport à l’inflation).
Et s’il s’agit de disposer d’un baromètre d’opinion, qu’on commence par faire un baromètre juste : que l’état mette sa dette sur le marché sans dispositif fiscal, et paye le taux d’intérêt que le marché exigera de lui, ne serait-ce que pour inciter les citoyens qui paient peu d’impôts à imaginer pouvoir éventuellement bénéficier des fruits d’une éventuelle croissance dans une nation financièrement bien gérée plutôt que de continuer à donner du travail à l’administration fiscale.
[*] C’est aussi pour cette raison qu’une importante dette d’état est un facteur d’aggravation des inégalités sociales (ce qui parle naturellement aux coeurs de gauche, mais devrait également parler aux coeurs de droits conscients de la fragilité de leur monnaie et craignant, à mon avis à juste titre, pour leurs héritiers)
J’ai retrouvé dans la revue de presse de votre site perso la Tribune que vous aviez publiée dans le Monde du 1er décembre 2004 sous le titre « assumer ou périr ». Vous y traitiez déjà de cet emprunt sans intérêt. Voici votre texte, le confirmer vous ?
"Trente années successives de déficit aboutissent à une montagne de dette. Elle a été multipliée par 10 depuis les années 1970, alors que notre pays connaissait une période de paix. Les intérêts de la dette représentent aujourd’hui notre première politique publique avec l’éducation nationale ; ils absorbent 80 % de l’impôt sur le revenu. Il y a vingt-cinq ans, ils étaient de 30 % inférieurs aux investissements civils. Ils sont, aujourd’hui, 2,5 fois supérieurs."
"Alors que chaque Français porte 16 600 euros de dette publique, la conscience de cette dette est nulle chez nos compatriotes."
"Je suggère donc de refinancer une petite partie de notre dette actuelle auprès des Français, au moyen d’un emprunt sans intérêts mais exonéré de droits de succession."
"Les avantages en seraient nombreux : alléger le coût immédiat de cette dette ; soulager en partie les générations futures du coût de notre inconscience financière ; faire prendre conscience de l’importance de cette dette et du fait qu’elle engage chacun."
"Je connais bien les inconvénients qui s’attachent à cette proposition, tant en matière fiscale que financière. Mais notre devoir est aussi d’éveiller les Français à la dimension d’une dette que ni l’inflation ni les dévaluations ne viendront plus jamais alléger."
NDLR. Ce sont les termes utilisés dans la Tribune que vous évoquez. Les chiffres méritent naturellement d’être mis à jour. J’envisage de plus en plus une catégorie « rétroblog » pour poster sur ce Blog les positions que j’ai pu prendre dans le passé. Manquant sans doute d’imagination, je constate chaque jour que j’ai peu changé d’avis. AL.
De toute manière, il faut bien utiliser des symboles pour faciliter la prise de conscience de tous sur des sujets qui se situent avouons-le au dessus de la compréhension d’une personne non spécialiste des finances publiques ?
Mais je suis en plein accord avec Marc ! Oui pour tous les efforts que vous voudrez bien nous demander à condition de ne pas alimenter un panier percé !
Donc donnez-nous des garanties pour que nos efforts n’encouragent pas nos gouvernants à toujours dépenser plus !
J’ai travaillé sous votre autorité à Bercy : je confirme que vous n’avez cessé de nous proposer cette idée comme moyen de pédagogie sur la dette à l’adresse des Français. J’admets parfaitement également que nous n’avons jamais été séduits par l’idée qui semblait anachronique par rapport au fonctionnement des marchés financiers. Comme quoi, tout change !
Encore une mesurette pour permettre à certains nantis de réduire leurs impôts pendant que les contribuables les plus nombreux et les moins fortunés continuent à payer des impôts.
L’emprunt sera dépensé, par les manques de rentrées dues aux réductions engendrées… le trou qu’on rempli en creusant un autre trou…
L’emprunt sera remboursé comment ? avec un nouvel emprunt ?
Un polytechnicien a téléphoné à sa mère pour se plaindre qu’il y a des asticots dans sa poubelle, voilà par quel genre de personnes est géré la France.
L’immobilier est en difficulté ?
Arrêtez de vouloir me faire pleurer ; quand je vois le nombre de lotissements et d’immeubles qui se construisent, et le prix de l’immobilier qui n’a jamais grimpé aussi vite que ces derniers mois, c’est aberrant. La valeur de la résidence principale acquise il y a 20 ou 30 ans, nous fait bientôt entrer dans la catégorie ISF !!!!
Les particuliers s’endettent pour 30 ans et plus, bientôt comme en Suisse où les emprunts des particuliers sont tellement longs qu’ils courent sur 2 générations…. Et on fait l’étonné !!
C’est ça l’avenir pour nos enfants ?
Les actions EDF (c’est pas de l’umprunt, ça?) sont soutenus par les gros investisseurs, pour pas qu’elle s’effondre, et ceux qui ont voulu récupérer l’envolée de mise sur le marché se retrouvent le bec dans l’eau (bien fait!), et maintenant EDF licencie, (le non remplacement des départs est un licenciement déguisé, parce qu’il n’y a pas "renouvellement de génération", les jeunes continuent à rester au chômage…)
Encore beaucoup d’idées lumineuses de ce type ???