Lucy Fer relance ses questions et notamment celle de savoir si nous pouvons raisonnablement espérer revenir sous la barre des 3% de déficits publics, dans le respect du pacte de stabilité et de croissance.

 

 

 

Il pose la question pour 2006 et 2007. Mais posons-nous là d’abord pour 2005 ! Car la France a été en déficit excessif en 2002, 2003 et 2004. Or, le pacte de stabilité autorise cette situation seulement trois années consécutives. Si nous sommes donc au dessus de 3% en 2005, nous ouvrirons une nouvelle crise en Europe.

Alors, est-ce évitable ?

Rappelons-nous tout d’abord que 3% est un solde, c’est à dire la différence entre les recettes et les dépenses, comparée au PIB (et non aux recettes). Pardon de rappeler cette évidence, mais elle semble si souvent oubliée. Rappelons également que notre déficit 2004 était de 3,7 %.

S’agissant des dépenses, celles de l’Etat sont tenues péniblement, en augmentant au rythme de l’inflation. Celles de la Sécurité Sociale ne le sont pas du tout. Quant aux recettes, le rapport (associé à la loi de finances pour 2006) qui vient d’être présenté par le Gouvernement sur les Prélèvements Obligatoires, ne laisse, en rien, espérer qu’elles seront supérieures à celles initialement prévues. Comme le solde en prévision s’établissait à 3%, il est à craindre que le dérapage des dépenses entraîne le déficit au dessus de la barre.

Les conjoncturistes, aujourd’hui, sont d’ailleurs tous sceptiques sur les prévisions du gouvernement pour 2005 comme pour 2006. Selon le consensus desdits conjoncturistes, le déficit public serait au moins de 3,2 % en 2005 (contre 3 % prévu par le Gouvernement) et, loin de se réduire, il augmenterait en 2006, passant à 3,3 % (contre 2,9 % selon le gouvernement). Aucun conjoncturiste ne prévoit de déficit public inférieur à la prévision du gouvernement. Pour l’année 2005, seuls trois conjoncturistes sur vingt prévoient un déficit égal à la prévision du gouvernement. Evidemment, il reste toujours la solution « coquine » des « soultes » puisées dans les caisses des satellites de l’Etat. N’oublions jamais que nous n’avons été qualifiés pour l’euro que grâce à une soulte prélevée sur France Télécom. Depuis beaucoup d’entreprises ou d’institutions ont été mises à contribution. En 2004, une soulte de 1,6 milliard d’euros a été perçue au titre de la prise en charge du démantèlement des sites nucléaires de Marcoule et Pierrelatte, en 2005, les industries électriques et gazières ont effectué un versement de 8,4 milliards d’euros pour l’adossement des retraites de leurs salariés à la CNAV. Aujourd’hui on parle d’une soulte versée par La poste : Thierry Breton a annoncé mardi dernier que « des recettes exceptionnelles devraient être comptabilisées en … 2006 ? Est-ce la soulte de 2 milliards d’euros que doit verser la Poste au titre de la réforme des retraites ?

Bref, il ne restera bientôt plus que le Secours Catholique qui n’aura pas été appelé à contribution.

Mon pronostic personnel est qu’il n’y a pas plus de chance de revenir sous la barre des 3% en 2005 que de connaître une canicule à Noël ! Sauf recettes exceptionnelles ! (lesquelles sont les phénomènes climatiques de la planète budgétaire). Pour 2006, ce devrait être pire.

Selon notre triste pratique habituelle (la sincérité budgétaire européenne en est encore à sa préhistoire), nous reconnaîtrons notre échec au dernier moment. Sans gloire ni, hélas, espoir !