La politique en France souffre de l’idée mortelle que les problèmes ne peuvent se résoudre que par des dépenses supplémentaires. Alors que c’est quasiment toujours le contraire : c’est l’excès de dépenses qui crée les problèmes.
J’ai acquis cette conviction définitive dans la gestion de la belle ville d’Alençon qui a connu le redressement financier le plus spectaculaire des villes de France de sa strate.
La belle fonction de Maire m’a instruit d’un principe et m’a offert un enseignement.
Le principe est qu’il faut toujours mettre ses actes en conformité avec ses paroles, en d’autres termes : toujours faire ce que l’on dit !
Comme sénateur, comme rapporteur général du budget, comme président de la Commission des finances, puis comme Ministre délégué au Budget, je n’ai cessé, sans grand succès, de rappeler aux gouvernements successifs la nécessité absolue que l’Etat réduise ses dépenses et les impôts. Il n’est pas suffisamment enseigné aux Français que l’impôt est égal aux dépenses et qu’il augmente avec elles. Qu’il est illusoire, voire stupide, de croire que l’on puisse augmenter les dépenses et baisser les impôts. Et que les dépenses de l’Etat engendrent invariablement deux impôts : l’impôt avoué (celui prélevé chaque année) et l’impôt caché (le déficit), celui renvoyé à plus tard, à nos enfants qui devront honorer notre dette.
Pour n’avoir pas cessé depuis plus de 15 ans de le rappeler, je me devais, au moins, d’avoir mis, depuis l’origine, mes actes en accord avec mes paroles.
Ce principe de « moins de dépenses pour moins d’impôts », je me le suis appliqué à moi-même, c’est-à-dire à la Collectivité dont j’ai eu la charge.
J’ai maintenu, fermement, avec une constance de métronome, le cap, autour de 5 priorités : 1-la maîtrise des coûts de fonctionnement : à périmètre équivalent, l’accroissement du fonctionnement a été limité à moins de 0,27 % par an, soit un réduction en euros constants. 2-l’autofinancement a été multiplié par 48 et se situe désormais dans la meilleure moyenne des villes. 3-l’investissement a été multiplié par 4. 4-la maîtrise de la dette : les intérêts de la dette ont été divisés par 6. 5-et l’allégement de la fiscalité le plus spectaculaire réalisé par une ville en France, sur la même période.
Cette discipline de fer, ces efforts ont été très féconds car ils nous ont obligé à analyser, par le plus menu détail, le fonctionnement de la ville, à instaurer un contrôle systématique de gestion, à faire une allocation la plus productive possible des ressources.
Ces efforts n’ont jamais obéi à aucune obsession d’esthétique comptable mais à la compréhension que c’était le seul moyen pour retrouver les marges de manoeuvre nécessaires pour équiper notre ville, soutenir l’activité de nos entreprises, l’emploi et de venir en aide aux plus démunis.
Cette démarche me permet aujourd’hui de tirer un enseignement majeur : il n’y pas d’ambition sociale sincère sans discipline financière ! L’action sociale aura été la première bénéficiaire de notre gestion rigoureuse. Car le recul de la dette a libéré de nouveaux moyens.
En conclusion, je retire de cette expérience que la politique, pour servir l’intérêt général, requiert plus de courage, de constance, de volonté que de science et de discours. Elle impose de ne pas toujours faire ce qu’il plaît aux habitants d’entendre, mais ce qui est leur vrai intérêt et celui de leurs enfants.
Je veux souligner aussi qu’il ne faut jamais confondre fin et moyens. Plus la fin est noble et sociale, plus les moyens mis en oeuvre doivent être économes et performants. Je continue d’être indigné d’entendre parfois que si la cause est belle et généreuse, on peut être souple sur les moyens. Mais chaque euro économisé sur les moyens peut s’ajouter au résultat de l’oeuvre engagée.
Notre fonction d’élu nous appelle chaque jour à respecter des préceptes simples : ne dépensons jamais avec l’argent public ce qu’on ne dépenserait pas avec son propre argent. N’oublions jamais que l’impôt est un prélèvement autoritaire sur le fruit du travail des autres.
Soyons attentifs à l’attente de nos électeurs sans jamais cesser de nous demander ce qui est vraiment leur intérêt et celui des générations futures. Parce qu’au fond, le jugement des électeurs est sans doute un danger temporaire, mais celui de l’histoire est plus redoutable encore, car il est éternel.